« La baisse de l’euro par rapport au dollar est sans conteste une bonne nouvelle. Nous ne sommes pas capables encore aujourd’hui d’en mesurer l’impact, mais il est certain que cette tendance va être favorable dans les mois à venir », confiait Fabien Bova, directeur général du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), le 19 mars, à l’issue de la présentation du bilan 2014 et de la stratégie 2015 des vins de Bordeaux, à Paris.
Au CIVB, la prudence est de mise après une année 2014 difficile. La quantité des vins commercialisés a, en effet, glissé de 8 % à 685 millions de bouteilles (75 cl par bouteille) et le chiffre d’affaires réalisé est tombé de 13 % à 3,74 milliards d’euros. « Une baisse », qui était « attendue, eu égard à la faiblesse de la récolte 2013, mais aussi au fort ralentissement en Chine, avec les mesures d’encadrement sévères par les autorités chinoises, l’enquête anti-dumping et le besoin de stabilisation de ce marché », a expliqué Bernard Farges, le président du CIVB.
2015, a-t-il encore affirmé, « sera encore impacté par la mise en marché de la petite récolte 2013 », mais, selon lui, toute « une série d’indicateurs sont aussi passés au vert », comme « une récolte 2014 de grande qualité », « de faibles niveaux de stocks » ou « des prix stables sur notre cœur de marché ».
Un rebond attendu en Chine
L’an dernier, la chute des livraisons au Royaume-Uni et surtout en Chine a fait plonger les exportations globales de bordeaux, réalisées à 55 % hors de l’Union européenne (UE), tant en volume (- 9 %) qu’en valeur (- 13 %). Au Royaume-Uni, le quatrième débouché extérieur en volume (197 000 hectolitres) et le troisième en valeur (200 millions d’euros), les ventes ont ainsi perdu le quart de leurs quantités et reculé de 46 % en valeur. En Chine, premier marché tant en volume (366 000 hl) qu’en valeur (221 millions d’euros), la commercialisation de bordeaux a baissé de 19 % en volume et 21 % en valeur.
Parallèlement à une baisse des exportations des grands crus dans l’ex-Empire du Milieu, « nous observons, en ce qui concerne l’entrée de gamme, que les importateurs, gagnant en professionnalisme, ne cherchent plus systématiquement du bordeaux à très bas prix. Comme le consommateur a acquis un certain degré de connaissance, ils veulent des vins de meilleure qualité, c’est-à-dire un bon produit à un bas prix », a rapporté Allan Sichel, vice-président du CIVB.
« N’oublions pas que les Bordelais ont des positions particulièrement fortes en Chine, a réagi Bernard Farges, persuadé que cette « présence forte devait leur permettre de repartir ». Le président du CIVB considère aussi le redressement « en cours » du cognac en Chine « comme un indicateur favorable pour le bordeaux ». En revanche, il est inquiet des avantages qui y sont octroyés à la concurrence étrangère. Déjà l’accord commercial signé entre la Chine et le Chili donnait un avantage compétitif aux vins de cette nation d’Amérique du Sud. Mais le 17 novembre dernier, un accord de libre échange (ALE) entre Pékin et Canberra a été signé, libérant notamment les vins australiens de toute taxe à l’entrée sur le marché chinois.
Une soif de bordeaux en Allemagne
S’agissant du marché britannique, « le Royaume-Uni fournit du bordeaux à la Chine. Londres est une plaque tournante des très grands crus de bordeaux », a rappelé Allan Sichel. A l’inverse, bordeaux a connu une belle envolée en Allemagne, son deuxième débouché en volume (288 000 hl) et cinquième en valeur (166 millions d’euros), avec respectivement des hausses de 8 % et 16 %. « Traditionnellement a relaté le vice-président du CIVB, l’Allemagne, un des plus gros importateurs au monde en volume et marché très concurrentiel, a toujours largement acheté du bordeaux à un prix très très bas. Le prix moyen était même un des plus bas existant avec les Pays-Bas ». Ce qu’il constate aujourd’hui, c’est « une hausse du prix moyen », des importateurs qui « sélectionnent mieux » les produits et des consommateurs « prêts à payer un peu plus ». Selon lui, « bordeaux est en train de gagner une identité et un positionnement sur le marché allemand ».
Outre-Rhin, « en 2013, le CIVB a communiqué sur les blancs secs, ce qui a fonctionné. Nous avons développé également nos relations avec les journalistes allemands et en 2014 bordeaux a aussi remporté un appel d’offres du distributeur Lidl », a énuméré Bernard Farges. En développant sa communication sur le vin blanc, alors que bordeaux est surtout connu pour son rouge en Allemagne, le CIVB y voit la confirmation de sa stratégie de communication, basée sur l’authenticité, le terroir, l’alliance cuisine-vin et les trois couleurs : blanc, rouge et rosé.
« Bordeaux est un marque connue dans tous ses pays prioritaires. Nous cherchons à créer de la proximité et de la considération », a ainsi exposé François Jumeau, directeur du Marketing du CIVB, en présentant la prochaine campagne de communication « Vins de Bordeaux, il y a tant à découvrir » (notre photo). Sont ainsi représentés de légers papillons aux ailes de couleur (blanche, rouge et rosé) et aux corps en forme de bouteilles.
François Pargny