Le nouveau règlement européen sur les IG (indications géographiques) artisanales et industrielles (IGAI, ou CIGI en anglais) est entré en vigueur le 16 novembre. Il marque une étape importante dans la protection des noms de produits artisanaux et industriels européens qui témoignent de l’originalité et de l’authenticité des compétences traditionnelles de leurs régions.
Nous l’avions annoncé comme imminent après le feu vert du Conseil européen le 9 octobre dernier, intervenu après celui du Parlement européen : le règlement « CIGI » – pour Craft and Industrial Geographical Indication, ou indications géographiques artisanales et industrielles (IGAI)- est en vigueur depuis le 16 novembre.
Comme pour les appellations IGP dont bénéficient certains produits agricoles et alimentaires, il permettra d’harmoniser la reconnaissance et l’enregistrement des indications géographiques (IG) des produits artisanaux et industriels européens de grande valeur, tels que, par exemple, la porcelaine de Limoges, les couteaux de Solingen, le marbre de Carrare ou la broderie de Madère.
S’ouvre à présent une période de transition qui va permettre de mettre en place et roder le nouveau système et procéder aux enregistrements des appellations candidates au label IG au niveau européen.
Concrètement, selon un communiqué de la Commission européenne, les États membres, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), la Commission et les parties prenantes disposent à présent de deux ans pour se préparer à l’application complète du nouveau système, qui est prévu pour décembre 2025. Les IG nationales existantes pour les produits artisanaux et industriels cesseront d’exister un an après la date d’application du règlement au profit du système européen, qui sera géré par l’EUIPO.
Protection unifiée à l’échelle de l’UE
Jusqu’à présent, les systèmes de protection juridique des IG variait d’un États membre à l’autre, obligeant les producteurs à s’enregistrer dans chaque pays. De plus, seuls 16 États membres sur 27 sont doté d’un système IG national. Mettant fin à cette disparité, le nouveau règlement européen introduit « un enregistrement unique couvrant l’ensemble du territoire de l’UE ».
Bien entendu, pour bénéficier de cette protection, les produits artisanaux et industriels candidats devront répondre aux exigences nécessaires à la protection du CIGI, avec notamment un ancrage territorial historique des savoir-faire des producteurs candidats reconnu.
Une fois cela fait, avec un seul enregistrement d’indication géographique, la protection sera donc assurée dans les Ving-sept États membres de l’UE.
Comment s’enregistrer ?
En pratique, la procédure d’examen et d’enregistrement se fera en deux phases : les producteurs déposeront d’abord leurs demandes d’IG auprès des autorités des États membres désignés; ensuite, celles-ci soumettront les demandes retenues pour une évaluation et une approbation plus approfondie à l’EUIPO. En France, c’est l’Inpi (Institut national de la propriété industrielle) qui gère les IG (l’Inao, pour sa part, gère les IGP agricoles et alimentaires).
Une procédure de demande directe auprès de l’EUIPO sera également possible pour les États membres qui obtiennent une dérogation de la Commission, s’ils n’ont pas mis en place de procédure d’évaluation nationale ou s’ils n’ont pas de producteurs intéressés. La Commission conservera la possibilité de se prononcer sur une demande d’IG dans certains cas.
Valorisation des IG par les producteurs
Les producteurs artisanaux et industriels concernés par une IG déposée auront la possibilité de mettre en valeur leurs noms d’indication géographique protégés en affichant un logo distinct sur leurs produits. « Cet étiquetage permettra aux consommateurs d’identifier les produits artisanaux et industriels ayant des caractéristiques spécifiques liées à leur origine géographique, les aidant ainsi à faire des choix éclairés lors de l’achat de ces produits » précise la Commission.
Les producteurs pourront déclarer eux-mêmes la conformité de leurs produits aux spécifications du produit, mais gare aux abus en ligne ou hors ligne, y compris sur les noms de domaine Internet ! Les autorités publiques devront en effet procéder à des contrôles et à des vérifications sur le marché des produits portant le nom d’une IG enregistrée. « Un système dissuasif avec des amendes en cas d’infraction est prévu » indique la Commission.
Un coup de pouce à la visibilité internationale
Si le nouveau règlement devrait favoriser la valorisation des savoir-faire dans les régions d’Europe, il pourrait aussi présenter un intérêt en termes de développement international.
Pour la Commission, en effet, il « facilitera l’internationalisation des produits artisanaux et industriels européens en accordant une protection de l’indication géographique aux producteurs de l’UE sur les marchés de pays tiers parties à l’Acte de Genève de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et dans le cadre d’accords commerciaux bilatéraux ».
Concrètement, « les producteurs artisanaux et industriels de l’UE auront la possibilité de demander une protection internationale pour les noms de leurs produits, ce qui renforcera leur compétitivité mondiale ».
La réciproque sera également vraie : les producteurs de pays non membres de l’UE pourront également demander une protection IG dans le cadre de ce nouveau régime de l’UE pour leurs produits artisanaux et industriels bien connus qui sont conformes aux exigences de l’UE.