Les Marocains ne décolèrent pas. En cause? L’arrêt rendu le 10 décembre par la Cour de justice de l’UE (CJUE) annulant l’accord commercial portant sur les produits agricoles, signé en 2012 entre Rabat et Bruxelles. La justice européenne a, en effet, tranché en faveur des indépendantistes du Front Polisario, qui estimaient que l’application de cet accord au territoire contesté du Sahara occidental violait le droit international et les engagements de l’UE.
Alors que les deux partenaires sont désormais engagés dans des négociations pour conclure un accord de libre-échange, la décision de la Cour, basée au Luxembourg, a provoqué l’embarras des responsables européens. Dans un communiqué diffusé le même jour que la publication de l’arrêt, la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a rappelé, par voie de communiqué, l’importance accordée à Bruxelles aux relations bilatérales UE/Maroc : « L’UE considère que les accords bilatéraux ne sont pas remis en cause. Elle confirme son engagement envers le partenariat avec le Maroc, qui est un partenaire primordial dans le voisinage sud ».
Après cinq entretiens téléphoniques et une rencontre à Rome, la haute représentante, retrouvait son homologue marocain, lundi 14 décembre à Bruxelles, pour un conseil d’association prévu de longue date. « Pour ma part, l’objectif exclusif de cette réunion était d’obtenir des clarifications de notre partenaire européen », a indiqué Salaheddine Mezouar à l’issue de la réunion. Le ministre des Affaires étrangères du Royaume n’a pas caché son agacement, relayant les critiques largement diffusées au Maroc depuis l’annonce de la décision de justice : « On ne peut pas vouloir tout et son contraire », a-t-il souligné, exhortant les Européens à faire preuve de plus de cohérence. Le chef de la diplomatie marocaine a également insisté sur le fait que cette décision de la Cour était une difficulté interne à l’Europe. « C’est donc à l’Union européenne et aux États membres de la résoudre », a-t-il insisté, faute de quoi tous les accords en cours de négociations pourraient être remis en cause. Pour continuer dans la voie d’un partenariat privilégié, « nous ne pouvons accepter de voir nos relations prises en otage par des péripéties juridiques à forte connotation politique », a conclu Salaheddine Mezouar, insistant sur le précédent dangereux que constituait cet arrêt de la Cour de justice européenne.
Federica Mogherini a, quant à elle, annoncé que l’UE ferait appel de cette décision. Parallèlement, les services juridiques devront examiner les mesures urgentes à mettre en œuvre pour suspendre l’arrêt de la Cour. Celui-ci demande l’annulation – avec effet immédiat – de l’accord conclu en 2012.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles