Les organisateurs de la première Université d’été de l’internationalisation des entreprises (UEIE) ont tenu parole : un livre blanc* pour améliorer l’écosystème exportateur français a été élaboré à partir des échanges entre participants et a été remis le 13 septembre en mains propres à Jean-Yves Le Drian, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Le titre du document reprend le thème de l’UEIE 2019, qui s’est tenu le 5 juillet à Marseille et à réuni environ 150 participants, professionnels de l’accompagnement l’export des secteurs privés et publics en France et à l’étranger, consultants, chefs d’entreprises mais aussi universitaires et financiers : « Venez imaginer avec nous un écosystème exportateur français plus performant ! ».
Il est endossé par les différentes organisations à l’origine de cette initiative : Adepta, Bpifrance, Medef International, OSCI, Fabrique de l’exportation et l’association d’universitaires Atlas AFMI.
Que retenir du document ?
L’écosystème exportateur : un facteur clé du succès à l’export
Pour les auteurs, l’écosystème exportateur d’un pays « réunit tous les acteurs qui contribuent directement ou indirectement à l’internationalisation des entreprises du pays, qu’il s’agisse d’acteurs publics, consulaires, privés, associatifs, etc. ».
C’est donc un « sujet important » car c’est, selon eux, « souvent un facteur central dans l’explication du succès ou de l’échec de ses entreprises à l’international », celles-ci dépendant beaucoup, pour la réussite de leur parcours, de « facteurs exogènes » : accès à des ressources humaines, capacité à échanger avec des entreprises plus internationalisées, connaissances des marchés, accès à des réseaux d’influence et d’information, variété de services…
Partant de ce postulat, et évitant les généralités, il se focalise sur les possibilités d’actions concrètes pour améliorer l’efficacité de l’écosystème français actuel et palier à certaines de ses faiblesses, en s’inspirant notamment des pratiques de pays voisins, dont l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne.
Cinq axes d’action
Toute une série de recommandations d’actions concrètes en ressortent, regroupées en cinq grands axes thématiques.
1/- Stimuler les stratégies coopératives à l’international
Il s’agit d’améliorer la capacité des entreprises à coopérer davantage, quelle que soit leur taille. Avec 3 recommandations d’actions concrètes :
– Amener les réseaux d’entreprises (fédération, associations, pôles de compétitivité) à proposer à leurs membres de se joindre à des coopérations export en créant des occasions (événements, rencontres, etc.)
– Amener les réseaux d’intelligence économique à travailler avec les réseaux d’entreprises en mode « pull », c’est-à-dire à remonter des opportunités de marchés, plutôt qu’à promouvoir les offres (mode « push »). Un rôle que les auteurs verraient bien joué par Business France.
– Mieux concevoir l’ingénierie des coopérations, en mobilisant des think tanks et des chercheurs sur le sujet.
2/- Mieux exploiter les réseaux du commerce international français
Ils sont nombreux et denses, mais pas toujours bien connus des entreprises françaises qui, en outre, n’ont pas suffisamment le réflexe « réseau ». D’où trois recommandations :
– Établir une cartographie sectorielle et géographique des réseaux français à l’étranger, tâche que pourrait accomplir Medef International.
– Valoriser la prospection par la mobilisation de réseaux, en multipliant les messages via les fédérations, les pôles de compétitivité, la Team France Export (TFE), les écoles et universités…
– Préserver la pérennité et la diversité des réseaux tout en assurant la plus grande porosité possible entre eux, tâche qui reviendrait au secteur privé et sur laquelle pourrait être mobilisé Medef international.
3/- Déployer à l’international des ressources humaines mieux formées avec deux solutions, la formation et/ou l’externalisation.
Les besoins en compétences des entreprises qui s’internationalisent sont criants et beaucoup ont du mal à recruter. « Le métier d’assistant des ventes export est cité comme l’un des plus tendus sur le marché de l’emploi en ce moment » souligne le livre blanc. Mais manquent aussi les titulaires de Master « Export management & international business » : « il n’existe en France que quelques dizaines de Masters, qui forment chacun 20 à 30 diplômés par an » alors que la seule université de Leeds en produit 700 par an… En attendant, les entreprises méconnaissent les possibilités d’externalisation d’un certain nombre de fonctions à l’export.
D’où trois recommandations :
– Aider les entreprises à réussir leurs recrutements export en mobilisant organisations professionnelles, TFE, etc.
– Booster le nombre de Masters en exportation en mobilisant Universités et Écoles de commerce.
– Promouvoir le recours à l’externalisation en mobilisant l’OSCI, la TFE, etc.
4/- Développer les pratiques et la connaissance par les PME et ETI du financement de leur ventes export.
Le constat peut être résumé ainsi : les possibilités de financement à l’export sont suffisantes, reste à faire en sorte que les entreprises se les approprient et les intègrent dans le marketing de leur offre pour en faire « un avantage compétitif ».
D’où trois recommandations :
– Identifier/Former des consultants capables d’aider les PME à rendre leur offre export « finançable ». Actions à mener via la mobilisation des banques et de Bpifrance, de l’OSCI, des organisations professionnelles regroupant les directeurs administratifs et financiers (DAF) externalisés ou à temps partagé…
– Promouvoir encore et toujours cet avantage compétitif via la TFE, les banques et Bpifrance.
– Assurer un benchmark permanent de l’ensemble des offres de financement proposées par les autres pays via la FBF et Bpifrance.
5/ Améliorer la reconnaissance sociale de l’effort d’internationalisation des entreprises.
Les auteurs touchent là aux faiblesses culturelles de la France en matière d’ouverture et de culture de l’international. En France, l’exportateur souffre d’un manque de reconnaissance, contrairement à l’Italie, l’Allemagne, le Royaume-Uni ou la Suisse. Un manque qui doit être combattu.
D’où trois recommandations :
– Valoriser les entreprises exportatrices, ce qui passe par la mobilisation de TFE, des organisations professionnelles, de Medef International, etc.
– Créer un récit de l’exportation française, via la mobilisation de clubs d’entreprises, de porte-paroles de l’exportation française, de Medef International, etc.
– Rendre hommage aux compétences des personnes qui font l’export en France, via la mobilisation de TFE, des fédérations, de Medef International, de think tanks, des enseignants, etc.
Dans sa conclusion, le document insiste aussi sur le fait que l’écosystème exportateur français est un « bien commun », au service de « tous les exportateurs », de la responsabilité de « chacun des acteurs ». Non s’en avoir dit au préalable un dernier mot sur la « subsidiarité » : il ressort des échanges de l’UEIE que « sur le plan de la méthode et de la gouvernance, le principe de subsidiarité (est) fondamental pour permettre une action conjointe et sereine des acteurs publics et privés », une « subsidiarité agile, conforme aux réalités économiques et pratiques rencontrées par nos entreprises dans les territoires où sur les marchés cibles visés ».
C. G.
*Le livre blanc est dans le document Pdf attaché à cet article