L’irréductible social-démocrate wallon poursuit sa bataille pour un commerce mondial plus équitable. Après avoir retardé la ratification de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Canada (CETA), Paul Magnette, le ministre-Président de la région wallonne, a réuni une quarantaine d’universitaires européens et américains pour demander à l’UE de négocier autrement les traités commerciaux internationaux. Parmi les premiers signataires d’un texte baptisé la «déclaration de Namur», figurent notamment les économistes français plutôt classés à gauche Philippe Aghion, Thomas Piketty et Jean-Paul Fitoussi. Un signe que la défiance envers la politique jusqu’à présent conduite par Bruxelles ne s’atténue pas.
Les revendications inscrites dans le document, et transmises lundi 5 décembre à Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, visent à répondre aux inquiétudes suscitées par la négociation du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) et l’accord similaire en cours de discussion avec les Etat-Unis, le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership). Les signataires estiment d’ailleurs que les pourparlers avec Washington doivent être suspendus « compte tenu de l’asymétrie des partenaires »*.
Principal objectif de Paul Magnette : garantir à l’avenir plus de démocratie et de transparence dans les discussions de libre-échange. Comment ? En organisant un débat avec les parlements nationaux avant d’engager des négociations et, une fois celles-ci lancées, un compte-rendu régulier et détaillé devra être présenté aux élus. Le chef du gouvernement wallon prône également l’abandon du principe d’application provisoire.
Les futurs traités commerciaux devront aussi contribuer au « développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités et à la lutte contre le réchauffement climatique », insistent les signataires. Les pays négociateurs devront, par exemple, avoir ratifié les instruments internationaux en matière de défense des droits de l’homme et des normes sociales, ou encore l’Accord de Paris sur le changement climatique.
La «déclaration de Namur» prône ensuite l’exclusion du champ d’application des accords les services publics et les services d’intérêt généraux. Sur la question controversée du règlement des conflits entre Etat et entreprises, les signataires recommandent enfin de « privilégier le recours aux juridictions nationales et européennes » et de n’instaurer des tribunaux arbitraux que s’ils offrent toutes les garanties de compétence et d’impartialité. Reste à savoir l’étendue du soutien que cette plateforme recueillera.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles