Cet article a fait l’objet d’une Alerte confidentielle diffusée auprès de nos abonnés dès le 5 juillet à 14H00. Il a été mis à jour le 6 juillet à 11H00.
Le suspens a donc duré jusqu’à la fin. Annoncé mardi 3 juillet dans la matinée, le sommet UE / Japon qui se tient aujourd’hui 6 juillet à Bruxelles a été organisé dans la précipitation pour précéder le G20, qui doit se tenir les 7 et 8 juillet à Hambourg. Même si la date avait déjà été évoquée*, les négociateurs du JEFTA (Japan-EU Free Trade Agreement), le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Japon, attendaient l’issue d’un nouveau round de pourparlers décisif qui s’est tenu la semaine passée à Tokyo. Dans un communiqué, la Commission a indiqué que les deux parties espèrent « annoncer un accord politique » sur le traité commercial ce jeudi à Bruxelles.
« Les bases d’un accord sont sur la table », a tweeté Cecilia Malmström, la Commissaire au Commerce. Autant de précautions de langage qui démontrent que certains points litigieux devront être réglés au plus haut niveau politique, au cours de ce sommet. Mais selon une source à la Commission européenne, les sujets qui fâchent, en particulier l’accès aux marchés, l’agriculture et le volet automobile, font désormais l’objet d’un compromis.
Depuis plusieurs semaines, les négociateurs des deux blocs mettent les bouchées doubles pour signer un accord politique avant la tenue du G20 de Hambourg. Pour Angela Merkel, qui présidera cette grande messe, le deal permettrait d’envoyer un signal fort, en faveur du libre-échange au reste du monde, en particulier à Donald Trump, attendu en Allemagne pour le G20.
La Commission n’a donc pas lésiné sur les moyens. Outre l’envoi des équipes de négociateurs techniques pour le dernier round de discussions à Tokyo, la commissaire au Commerce et son collègue à l’agriculture, Phil Hogan, se sont également rendus au Japon, à la fin de la semaine passée, pour des consultations décisives. D’ultimes négociations ont encore eu lieu le 4 juillet à Bruxelles avec Fumio Kishida, le ministre des Affaires étrangères nippon. Plus prudent que ses homologues européens, ce dernier déclarait, avant son départ : « De dures négociations se poursuivent. Il est difficile d’en anticiper le résultat. Je vais (à Bruxelles) avec la ferme volonté de parvenir à accord général ».
Un accord de principe qui couvrirait 90 % du pacte commercial
En toute vraisemblance, donc, Donald Tusk et Jean-Claude Juncker, les présidents du Conseil et de la Commission, devraient aujourd’hui 6 juillet, aux côté de Shinzo Abe, le premier ministre japonais, la signature d’un accord politique de principe qui couvrirait plus de 90 % des volets du pacte commercial.
La question de la protection des investissements par exemple, n’en fera pas partie. Bruxelles souhaite promouvoir la création d’une cour multilatérale de règlement des différends investisseurs/Etat pour remplacer, à terme, les clauses d’arbitrage ISDS présentes dans des centaines d’accords bilatéraux sur l’investissement. Un sujet sensible sur lequel Tokyo n’a pas voulu marquer son accord à ce stade.
« Nous visons cet automne pour finaliser un compromis sur les ultimes points litigieux », indique un négociateur européen qui se félicite néanmoins des progrès considérables réalisés au cours de ces dernières semaines de négociation marathon. Le compromis qui devrait être signé le 6 juillet éliminera notamment les droits de douanes sur les voitures et pièce détachées importées du Japon, et sur les produits agricoles exportés de l’UE vers l’archipel, les deux principales pierres d’achoppement au cours de ces pourparlers lancés en 2013.
Présenté comme aussi ambitieux que le CETA, l’accord de libre-échange conclu dans la douleur avec le Canada, le JEFTA pourrait peser bien plus lourd économiquement. L’UE et le Japon représentent à eux seuls un tiers de la croissance économique mondiale. Et, juste après la Chine, le Japon est le deuxième partenaire commercial asiatique de l’Europe. Selon des estimations de la Commission européenne, l’accord devrait permettre une hausse de 32,7 % des exportations japonaises vers l’Europe. Celles de l’UE pourraient augmenter de 23,5 % et représenter un gain de PIB de 0,8 % à long terme.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
*UE / Japon : un accord politique sur le libre-échange espéré début juillet