Embellie en vue dans les relations entre Bruxelles et New Delhi à deux semaines du prochain sommet entre les deux blocs, prévu en format virtuel le 8 mai. Depuis le début de l’année, et malgré les restrictions sanitaires liées à la Covid-19, les échanges et réunions de travail se sont multipliés pour organiser le lancement du dialogue de haut niveau Union européenne-Inde sur le commerce et les investissements. Le Moci fait le point.
Lors d’une première rencontre virtuelle le 5 février dernier, Piyush Goyal, le ministre indien du Commerce et Valdis Dombrovskis, son homologue européen, ont dressé l’état des lieux des relations entre les deux blocs et programmé les prochaines étapes pour renforcer leur partenariat.
« Nous avons récemment amorcé un dialogue économique de haut niveau entre l’UE et l’Inde et nous explorons également plusieurs voies en matière de commerce, tout en gardant à l’esprit le sommet UE-Inde qui se tiendra en mai », a déclaré le Commissaire letton en charge du Commerce.
Au menu des discussions, l’accès au marché et la possibilité d’une coopération entre les deux parties sur la réforme de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Mais aussi les nombreux sujets et enjeux communs tels que la sécurité, les migrations, l’énergie, et le climat.
Un regain d’intérêt pour le partenariat indo-européen
Relégué au second plan par la précédente Commission européenne, le renforcement du partenariat indo-européen suscite aujourd’hui un regain d’intérêt à Bruxelles et figure dans plusieurs dossiers clés défendus par l’équipe d’Ursula Von Der Leyen. Priorité affichée dans le cadre des nouvelles orientations commerciales de l’UE, le réchauffement des relations avec New-Delhi représente également une pièce centrale de la future stratégie de coopération de l’UE avec la région indopacifique.
Le Conseil, organe de représentation des Vingt-sept États membres dans l’architecture communautaire a d’ailleurs adopté ses conclusions sur le sujet le 19 avril. Elles « veilleront à favoriser un ordre international fondé sur des règles, des conditions de concurrence équitables ainsi qu’un environnement ouvert et équitable pour le commerce et les investissements », résume un communiqué.
La Commission et le service européen d’Action extérieure ont été chargés de présenter, d’ici à septembre 2021 une communication conjointe pour énoncer des pistes d’action concrètes.
La France et l’Allemagne soutiennent la reprise des pourparlers
Priorité de la présidence portugaise de l’UE, la reprise des pourparlers de libre-échange avec New-Delhi fait l’objet d’un consensus fort parmi les Vingt-sept.
Le sujet a d’ailleurs été évoqué par Jean-Yves Le Drian, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, lors de sa visite en Inde entre le 12 et le 15 avril dernier. Même soutien affiché par l’Allemagne qui, à l’instar des autres pays européens, encourage ce rapprochement dans le but, notamment, de contrer l’influence de Pékin dans la région, et de réduire la dépendance de l’UE vis-à-vis de la Chine.
Sur le plan économique et commercial, l’UE a également tout intérêt à renforcer ses liens avec l’Inde et son marché de 1,25 milliard d’habitants. Or, aujourd’hui, les investissements européens en Inde restent limités et bien inférieurs à ceux d’autres grandes économies émergentes. Et le retrait du Royaume-uni de l’Union ne va rien arranger.
De nombreux obstacles en matière de commerce
Une nouvelle rencontre bilatérale entre Piyush Goyal et Valdis Dombrovskis doit se tenir le 29 avril par visioconférence. Et le sommet UE-Inde, programmé le 8 mai prochain à Porto « doit être l’occasion d’annoncer la relance officielle des négociations », pronostique un diplomate portugais.
Reste à savoir si l’alignement favorable des planètes sera suffisant pour surmonter les nombreux obstacles à la conclusion d’un accord, dont le protectionnisme.
Ainsi, parmi les points d’achoppement rencontrés avant le gel des pourparlers en 2013, figurent notamment les demandes, côté européen, d’une réduction des tarifs douaniers, qui peuvent atteindre 60 % pour les voitures, et jusqu’à 150 % pour les vins et spiritueux. Quant à l’Inde elle réclame le retrait des barrières protectionnistes sur le Vieux Continent dans le secteur des services.
Pour avancer, une solution est sur la table : scinder les discussions sur le commerce et l’investissement, les deux parties estimant qu’un pacte sur le second volet sera plus facile à conclure.
Les accords bilatéraux scellés par New-Delhi avec les Vingt-sept ont expiré en 2017 et 2018, « ce qui a entraîné une hausse des coûts d’investissement et une certaine incertitude parmi les investisseurs européens », souligne un responsable à Bruxelles.
Quant aux discussions sur les questions litigieuses relatives à l’accès au marché, « elles risquent de prendre plus de temps à être réglées », reconnaît cette même source. Un accord sur le volet investissement pourrait toutefois encourager les deux blocs à mettre de côté leurs différends sur le volet commercial.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles