Ces derniers jours, à quelques semaines du 15e round des négociations du projet de Partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (PTCI, en anglais TTIP/Transatlantic Trade and Investment Partnership, ou encore TAFTA) Matthias Fekl a affiché la détermination de la France, qui demandera, a-t-il expliqué, l’arrêt définitif des négociations lors de la réunion des ministres du Commerce extérieur de l’Union européenne (UE), le 22 septembre à Bratislava. Les propos sans équivoque du secrétaire d’État au Commerce extérieur, qui accuse au passage les États-Unis de consentir juste à donner à l’UE « des miettes », est en phase avec ceux du numéro un social-démocrate allemand, le ministre de l’Économie Sigmar Gabriel, selon lequel « les discussions avec les États-Unis ont de facto échoué ». Ils confirment aussi le scepticisme grandissant de Paris vis-à-vis de ce projet de traité et de la volonté américaine d’aboutir, perceptible ces derniers mois*.
Si des deux côtés du Rhin, les socialistes semblent s’accorder pour un arrêt des négociations, le sentiment partagé par Matthias Fekl et Sigmar Gabriel n’est pas aujourd’hui partagé par toutes les parties au projet de traité. Même en France, où François Hollande s’exprimait le 30 août, à l’occasion de la Semaine des ambassadeurs (29 août-2 septembre), le président a été plus nuancé que le secrétaire d’État français. Il a ainsi indiqué qu’il ne fallait pas « cultiver une illusion qui serait celle de conclure un accord avant la fin du mandat du président des États-Unis », alors que Matthias Fekl parlait, lui, d’arrêt « définitif » et de « fin » des négociations. Pour le chef de l’État, les « discussions ne pourront pas aboutir à un accord d’ici la fin de l’année ». Rien de plus. « La négociation s’est enlisée, les positions n’ont pas été respectées, le déséquilibre est évident », a constaté François Hollande.
Commission européenne et États-Unis pour la poursuite des négociations
Quoi qu’il en soit, techniquement, la Commission européenne ayant reçu des États membres un mandat de négociation pour le TTIP, rien ne l’oblige à mettre un terme aux pourparlers avec Washington. La commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a été claire, à cet égard, tout en faisant preuve d’une certaine diplomatie, en affirmant que les négociations « sont difficiles », mais « n’ont pas échoué », que l’objectif demeurait « de conclure avant la fin du mandat Obama » en janvier 2017 » et que « si ce n’est pas possible, il est logique de faire le plus de progrès possible ».
Les États-Unis, pour leur part, ont annoncé leur intention de poursuivre les échanges, malgré la position française. Outre-Rhin, la chancelière, chrétienne-démocrate, Angela Merkel, a, quant à elle, toujours considéré cet accord « dans l’intérêt absolu de l’Europe » et, à l’opposé des déclarations de son ministre de l’Économie, ne semble pas s’éloigner de cette ligne à un an d’élections législatives s’annonçant périlleuses pour son parti.
Matthias Fekl a évoqué l’opacité, le manque de transparence qui entoure les négociations. Ne faut-il pas y voir aussi la peur de la France d’ouvrir son marché agricole, au moment où la paysannerie française, sur fond de démantèlement de la Politique agricole commune (Pac), peine à s’adapter à un environnement plus ouvert, caractérisé par la volatilité des prix et une compétition accrue ? Au Parlement européen, les députés socialistes et radicaux se sont réjouis de la volonté de Paris de demander la clôture des discussions d’un « projet d’accord qui semblait s’inscrire avant tout dans l’intérêt des multinationales, au détriment de la puissance publique, des travailleurs et des consommateurs européens ». Et le groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen ainsi de soutenir la nécessité pour l’Europe, notamment, « de protéger son agriculture, son industrie ».
F. P.
* Lire dans de précédentes éditions de la LC : UE / États-Unis : un 14e round de négociations du TTIP pour rien ? et Libre-échange / UE : comment M. Fekl précise au député J-P. Bacquet la position française sur le TTIP / TAFTA
Pour prolonger :
– UE / Libre-échange : du CETA au TTIP, les parlements locaux veulent avoir leur mot à dire
– UE / États-Unis : ce qu’il faut savoir des avancées du 13e round de discussions du TTIP
– UE / États-Unis : les marchés publics, pomme de discorde dans les négociations TTIP