Après les menaces, place au dialogue. Les autorités de Bruxelles et Pékin ont décidé, le 22 juin, d’entamer des discussions sur le contentieux commercial relatif aux véhicules électriques chinois. Il était temps à quelques jours de l’échéance du 4 juillet, date prévue par la Commission européenne pour la mise en œuvre de droits compensateurs provisoires.
C’est lors d’un échange téléphonique entre le vice-président et commissaire européen au Commerce Valdis Dombrovskis et le ministre chinois du Commerce Wang Wentao, le 22 juin, que les deux partis auraient convenu d’entamer des discussions sur le dossier, selon diverses sources de presse chinoises et occidentales.
L’ouverture de discussions avaient été d’entrée proposée par la Commission européenne, au moment de l’annonce de l’instauration de droits compensateurs à l’import de 17 % à 38,1 % sur les véhicules électriques chinois, à la suite de l’enquête menée à partir d’octobre 2023 sur les subventions publiques dont auraient bénéficié les constructeurs chinois. L’application de ces droits compensateurs provisoires, qui iraient jusqu’à quadrupler les droits de douane (10 % actuellement), est prévue le 4 juillet et les droits définitifs en novembre.
L’Allemagne, dont l’industrie automobile joue gros dans ce dossier, a mis tout son poids pour convaincre Pékin de se mettre autour de la table : le ministre allemand de l’Économie, Robert Habeck, était en visite en Chine le même jour, déclarant dès son arrivée que les portes de la discussion étaient « ouvertes ».
Les discussions s’annoncent délicates.
Pékin nie, Bruxelles a des arguments
La partie chinoise a nié jusqu’à présent toute concurrence déloyale des constructeurs chinois et brandi la menaces de représailles, enclenchant a son tour des enquêtes anti-dumping sur les spiritueux et le porc européens.
Les représailles pourraient ne pas s’arrêter là. Selon des informations rapportées par le journal progouvernemental Global Time, lors d’une réunion à huis clos qui s’est tenue le 19 juin et à laquelle ont également participé des constructeurs automobiles européens, l’industrie automobile chinoise « a demandé au gouvernement d’adopter des contre-mesures fermes (et) a suggéré que l’on envisage positivement d’augmenter les droits de douane provisoires sur les voitures à essence dotées de moteurs de grosse cylindrée ».
Mais l’Union européenne dispose d’arguments démontrant le contraire, pour l’instant non rendus publics.
D’après Bloomberg, une nouvelle étude indépendante -mais de source américaine- publiée le 21 juin montre que l’industrie chinoise des véhicules électriques a reçu au moins 231 milliards de dollars de subventions et d’aides gouvernementales de 2009 à la fin de 2023, soit sur 15 ans. Emanant de Scott Kennedy, un spécialiste de la Chine au Center for Strategic and International Studies, Think Tank bipartisan basé à Washington, cette étude publiée sur son blog montre que la moitié de ces subventions a pris la forme d‘exonérations de taxe à la vente, le reste étant composé de rabais aux acheteurs approuvés au niveau national, de financement gouvernemental pour les infrastructures telles que les bornes de recharge, d’achats gouvernementaux de véhicules électriques ainsi que de programmes de soutien à la R&D.
Des informations contestées par Pékin. Dans un communiqué immédiatement publié par le ministère chinois du Commerce, le 21 juin, celui-ci accuse l’UE d’avoir « intimidé » et « contraint » les entreprises chinoises à fournir des informations « trop larges » lors de son enquête anti-subventions.
Les discussions s’avèrent également délicates du fait des intérêts parfois divergents des Etats-membres de l’UE, qui pourraient faire le jeu de Pékin. L’Allemagne, en particulier, pour laquelle la Chine est le premier partenaire commercial, est particulièrement inquiète d’une éventuelle guerre commerciale dont elle serait la principale perdante. Rien que pour ses marques Mercedes ou BMW, la Chine représente jusqu’à 40 % de leurs volumes de ventes.
A la veille de l’arrivée de Robert Habeck en Chine, c’est bien Berlin qui a été pointé du doigt par les autorités chinoises pour faire pression sur Bruxelles : « Le protectionnisme (de l’UE) ne protègera pas la compétitivité (de ses constructeurs) et ne fera que ralentir la lutte mondiale contre le changement climatique et la promotion d’une transition verte et à faible émission de carbone », a indiqué Zheng Shanjie, le président de la Commission nationale du développement et de la réforme, cité par l’agence Chine Nouvelle. « Nous attendons de l’Allemagne qu’elle fasse preuve de leadership au sein de l’UE et qu’elle prenne les bonnes mesures » a-t-il ajouté.
A suivre…
C.G