Deux ans après la fin des négociations sur la modernisation de l’accord d’association conclu en 2002 entre le Chili et l’Union européenne (UE), l’accord commercial intermédiaire (ACI) aux règles modernisées entre en vigueur dès le 1er février. Les nouveautés concernent les règles d’origine et allègent les procédures douanières entre les entreprises chiliennes et européennes. Revue de détail des principales modifications et de leurs implications pour les exportateurs européens.
Terminés le certificat de circulation EUR.1 et les déclarations d’origine sur autorisation d’exportateur agréé. A compter du 1er février, pour obtenir un traitement tarifaire préférentiel, les preuves d’origine d’un produit se fonderont :
- Soit sur la connaissance de l’importateur de l’origine des biens (et sur sa seule responsabilité). L’exportateur doit fournir dans ce cas à l’importateur tout document probant sur l’origine préférentielle du produit.
- Soit sur une attestation d’origine établie par l’exportateur (auto-certification).
Deux cas de figure :
- Pour les envois d’une valeur inférieure ou égale à 6 000 EUR tout exportateur peut émettre lui-même une attestation d’origine.
- Pour les envois dont la valeur excède 6 000 EUR, il est nécessaire d’avoir le statut d’exportateur enregistré et, pour ce faire, de s’enregistrer sur REX, plateforme européenne réservée à l’auto-certification. Le numéro REX doit ensuite être reportée sur l’attestation d’origine, valable 12 mois (contre 10 mois dans l’accord UE-Chili de 2002) et dont les exportateurs enregistrés sont dispensés de signature.
- Pour effectuer cette démarche, les primo-exportateurs peuvent consulter le guide pas-à-pas de la Douane française.
Des règles d’origine plus souples
L’accord commercial intermédiaire (ACI) qui entre en vigueur le 1er février entre l’UE et le Chili s’inspire des accords conclus avec le Royaume-Uni et le Japon et de leurs règles d’origine modernisées. Plus souples, elles doivent permettre de faciliter les échanges commerciaux.
En ce sens :
- La séparation comptable qui permet de déterminer différentes origines de matières fongibles (identiques et interchangeables) est acceptée. En revanche, le stockage mixte de produits fongibles originaires et non originaires n’est pas autorisé.
- Le calcul de l’origine s’effectue à partir des coûts moyens des matières et composants.
- La notion de non-modification des produits remplace la règle du transport direct. Elle permet également le fractionnement des envois.
- La clause de non-ristourne, qui impliquait que les matières non-originaires aient supporté les droits de douane exigibles dans le pays d’obtention du produit, est supprimée. En pratique, cela signifie que des matières non originaires peuvent être utilisées pour la fabrication d’un produit dans l’UE ou au Chili tout en bénéficiant d’une ristourne de droits lorsque le produit acquiert l’origine préférentielle UE. Le droit suspendu n’aura pas à être acquitté lorsque le produit sera exporté. Le « perfectionnement actif sur les composants tiers » ne gêne donc plus l’acquisition de l’origine préférentielle.
Il sera néanmoins possible de réclamer rétroactivement une préférence tarifaire, jusqu’à 2 ans après l’importation.
Des exportations françaises dominées par l’aéronautique
Ces nouvelles règles européennes ont vocation à fluidifier le commerce avec le Chili, troisième partenaire de la France en Amérique latine, derrière le Brésil et le Mexique. Plus de 300 filiales d’entreprises françaises, dont les trois quarts des entreprises du CAC 40, sont en effet présentes dans le pays et déploient souvent des activités dans d’autres marchés de la région.
En 2023, les exportations ont atteint 1 milliard d’euros (Md EUR), en recul de 21,6 % par rapport à 2022 en raison de la baisse de près de 70 % des produits de l’industrie aéronautique et spatiale, premier poste des livraisons françaises au Chili.
Les exportations concernent principalement les secteurs de la pharmacie, la cosmétique et parfumerie, l’automobile, l’agroalimentaire et les équipements électriques, tandis que les principales importations sont constituées essentiellement de cuivre qui représente 68 % des exportations chiliennes vers la France, mais aussi de produits agroalimentaires et de produits de la filière bois.
Alternative à la Chine pour les importations de lithium
Deuxième producteur de ce métal au monde derrière l’Australie, le Chili fournit un quart des achats européens de cuivre. Le secteur minier, piler de l’économie nationale, produit également des métaux indispensables à la transition énergétique comme le lithium (batteries) dont il détient 33 % des réserves mondiales.
Il est également le deuxième producteur mondial de molybdène, indispensable à la fabrication d’acier de haute qualité, à la production d’essence sans plomb et à celle de semi-conducteurs.
Alors que l’UE tente de réduire sa dépendance aux métaux chinois tout en menant sa transition énergétique, le Chili fait depuis plusieurs années l’objet d’une attention particulière.
Ainsi, en juillet 2023, Bruxelles a conclu avec Santiago un accord sur la commercialisation de lithium et d’autres métaux indispensables à la réalisation des objectifs européens en matière de décarbonation. En échange de facilitations d’approvisionnement, l’UE doit d’investir localement pour développer la transformation sur place de ces métaux et ainsi augmenter leur valeur ajoutée.
Toutes marchandises confondues, les échanges de l’UE avec le Chili ont bondi de 169 % entre 2002 et 2022. Une hausse spectaculaire qui méritait bien un accord commercial modernisé.
Sophie Creusillet
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