Dit de « nouvelle génération, l’accord vise à supprimer non seulement les barrières tarifaires au commerce, mais aussi les barrières non tarifaires, comme les normes et les réglementations des biens et des services. Autres avantages : le traité mettra fin aux restrictions en matière d’accès aux marchés publics, ouvrira le marché des services « et il offrira aux investisseurs un environnement prévisible », résume-t-on à la Commission européenne.
Compilés dans un document de plus de 2000 pages*, les différents chapitres du traité prévoient des avancées significatives dans un certain nombre de secteurs.
Suppression des droits de douane dans les deux sens
La mesure devrait permettre une économie de 600 millions d’euros par an pour les exportateurs européens. La plupart des droits de douane seront supprimés dès l’entrée en vigueur du traité. Après sept ans d’application, aucun ne subsistera sur les produits industriels.
Les perspectives sont similaires dans les secteurs agricoles et alimentaires. 92 % des produits européens pourront être exportés au Canada en franchise de droits. Même chose pour les vins et spiritueux qui connaîtront un accès facilité au marché canadien. Des quotas ont néanmoins été définis pour un certain nombre de produits sensibles comme la viande de bœuf et de porc, le maïs doux ou le blé tendre pour l’UE et les produits laitiers pour le Canada. Seule une quantité limitée de ces produits bénéficiera d’un accès préférentiel sur les marchés des deux blocs.
Chaque année, le Canada pourra exporter sans droits de douane vers l’Europe 45 840 tonnes (t) de bœuf sans hormone (contre 4 162 aujourd’hui), 75 000 t de porc sans ractopamine (contre 5 549), 100 000 t de blé ou encore 8 000 t de maïs doux. En échange de ces quotas, l’Europe a obtenu un nouveau contingent de fromage admis sans droits de douane au Canada -16 800 t de fromage de qualité et 1700 t de fromage industriel- qui s’ajoutera au contingent existant de 13 472 (le standard OMC) par an.
Marchés publics : ouverture à tous les niveaux
Grande avancée consentie par le Canada à l’UE : l’ouverture de ses marchés publics à tous les niveaux de pouvoir. Les autorités provinciales du pays gèrent en effet une partie importante des dépenses publiques du pays. Chaque année, que ce soit au niveau fédéral, provincial ou municipal, elles achètent pour plus de 30 milliards de biens et services à des entreprises privées. Les firmes européennes seront par ailleurs les premières à bénéficier de cet accès privilégié aux marchés publics du pays. Aucun autre accord conclu par le Canada n’offrait de telles possibilités à des sociétés étrangères.
Seuls deux domaines, dans les provinces de l’Ontario et du Québec, font toujours l’objet de restrictions de la part du Canada. La première restriction concerne les entreprises publiques du secteur de l’énergie, où certains types spécifiques de contrats sont exclus. Le second domaine est celui des transports publics. Avec l’entrée en vigueur du CETA, l’accès aux marchés publics des provinces et territoires canadiens sera illimité pour le matériel roulant européen, sauf dans ces deux provinces où les marchés seront plus ouverts mais sous certaines conditions. Jusqu’à présent les autorités de l’Ontario et du Québec avaient exigé un pourcentage élevé de contenu local. Résultat? La participation à des appels d’offres concernant des véhicules de transport publics n’était pas rentable pour les entreprises européennes. La solution convenue entre Bruxelles et Ottawa, au cours des négociations, a permis de réduire et de simplifier les restrictions imposées, donnant ainsi, pour la première fois, un accès préférentiel aux entreprises européennes soumissionnant pour du matériel roulant dans ces deux provinces.
Coopération renforcée en matière de réglementation
Un forum sera mis en place dès l’entrée en vigueur de l’accord pour faciliter la coopération réglementaire entre les deux blocs. S’il ne limitera en rien le pouvoir de décision des autorités réglementaires européennes et des Etats membres, il permettra de mettre en avant des suggestions à ces autorités et aux législateurs.
Parallèlement l’UE et le Canada ont également convenu de renforcer les liens entre leurs organismes de normalisation pour réduire les entraves techniques aux échanges. Dans un certain nombre de secteurs – tels que les équipements électroniques, les jouets, les machines, les appareils de mesurage – les deux parties se sont entendues pour accepter les certificats d’évaluation de la conformité émis par leurs organismes compétents.
« Cela signifie qu’un organisme d’évaluation de la conformité de l’Union peut tester des produits de l’UE destinés à l’exportation vers le Canada conformément à la réglementation canadienne, et vice versa », précise-t-on à la Commission européenne. Dans ces secteurs, la réalisation des mêmes essais pourra être évitée, réduisant les coûts tant pour les entreprises que pour les consommateurs. Un avantage qui profitera particulièrement aux PME, les plus affectées par les coûts de ces barrières non tarifaires.
Droits de propriété intellectuelle (DPI) : harmonisation
Ce volet vise à harmoniser les règles applicables au sein des deux blocs en matière de DPI. Pour les nouveaux médicaments, par exemple, les titulaires de brevets européens pourront faire appel des décisions d’autorisation de mise sur le marché au Canada. Le système de protection des données du pays devrait également se rapprocher de celui en vigueur au sein de l’UE.
Destiné notamment à protéger le travail des artistes, le volet DPI du CETA profitera également aux agriculteurs et PME du secteur de l’alimentation. Ainsi, 145 des 1500 appellations géographiques européennes, comme le «Grana Padano», le «Roquefort», «Elia Kalamatas Olives» ou «Aceto Balsamico di Modena» – bénéficieront d’un statut spécial garantissant leur protection sur le marché canadien. Leurs noms ne pourront être utilisés au Canada que pour les produits importés des régions européennes d’où ils sont traditionnellement issus.
Le Canada n’a, de son côté, protégé aucune appellation.
Libéralisation du commerce des services
La moitié des bénéfices liés au CETA, en termes de PIB, devrait provenir de la libéralisation dans le secteur des services. La Commission européenne s’est félicitée des concessions faites par le Canada, qui a accepté une nouvelle libéralisation dans plusieurs domaines clés, tels que les services postaux, les télécommunications et le transport maritime, sans instaurer de périodes de transition.
Dans ce dernier secteur, par exemple, le Canada s’engage à accorder un accès au marché pour le dragage et les activités de transbordement, réservés aux opérateurs nationaux dans les accords antérieurs.
Mobilité professionnellefacilitée
La reconnaissance mutuelle des qualifications des travailleurs sera améliorée, et les transferts de personnels entre Europe et Canada facilités.
L’accord contient des dispositions importantes, notamment pour les personnes détachées au sein de leur entreprise, qui faciliteront les activités des professionnels et des investisseurs européens et canadiens. Une personne physique qui fournit un service en tant que «prestataire de services contractuel» ou «professionnel indépendant» pourra séjourner dans le pays de l’autre partie pendant 12 mois au lieu de 6 mois jusqu’alors ».
Protection des investissements :
Sur ce volet très controversé au sein de l’UE, les Canadiens ont accepté d’inclure les réformes proposées par la Commission pour répondre aux préoccupations des citoyens européens.
Premier changement : la référence explicite, dans le texte même du CETA, au droit des gouvernements de réglementer dans l’intérêt général ainsi que des normes plus précises et plus claires de protection des investissements.
La seconde rupture vise à garantir que les procédures de règlement des différends seront conduites de manière transparente et impartiale grâce à un système juridictionnel indépendant en matière d’investissements – composé d’un tribunal permanent et d’une cour d’appel qui a compétence pour réviser les décisions du tribunal.
Commerce et développement durable : respect de normes internationales
Plusieurs dispositions de fonds sont incluses dans le traité. Celui-ci prévoit, notamment, l’adhésion aux normes et accords internationaux.
Pour ce qui est du travail, cette adhésion implique le respect des règles adoptées au sein de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Concernant l’environnement, les engagements portent sur la mise en œuvre effective des accords multilatéraux comme, par exemple, les accords de Paris sur le climat. Les pratiques commerciales et d’investissements, soutenant des objectifs de développement durable (RSE, label écologique, commerce équitable), seront également encouragées.
K.L, à Bruxelles
*Voir sur le site de la Commission européenne : http://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/ceta/index_fr.htm