Après une année 2023 contrastée, les signaux semblent au vert depuis janvier pour le transport de marchandises par air ou mer et ce malgré de fortes incertitudes sur l’évolution des actuelles tensions géopolitiques. L’activité est tirée à la hausse par un regain de dynamisme du commerce international, souligne le dernier baromètre de l’Union des entreprises de transport et de logistique françaises (UTLF).
Le transport maritime a débuté l’année 2024 en fanfare. Haropa Port a en effet annoncé une augmentation de 16 % en moyenne annuel de la manutention de conteneurs au premier trimestre. Cette croissance est nettement plus importante que celle enregistré par les grands concurrents des ports français, à savoir Rotterdam (+ 2 %) et Anvers (+ 8,6 %).
Pas de quoi crier victoire non plus : l’étude de l’UTLF nuance ce bon résultat par un effet rebond à la suite des mouvements sociaux ayant ralenti l’activité portuaire en France entre janvier et avril 2023. Sur l’ensemble de l’année dernière, le tonnage des grands ports français a reculé de -4,6 % et jusqu’à -13 % pour les seuls conteneurs.
Du reste, l’Europe reste à la traîne. Le RWI/ISL Container Throughput Index, qui synthétise l’activité des principaux ports mondiaux, a en moyenne augmenté de 6 % au niveau mondial. En revanche, l’activité des ports du Nord de l’Europe (le Havre, Zeebrugge, Anvers, Rotterdam, Brême et Hambourg) a baissé de -5 % en 2023 et -13 % en deux ans.
L’ombre de la crise en mer Rouge
Du côté des taux de fret, ceux pratiqués par les ports tricolores ont baissé tout au long de l’année. Selon les données de l’Insee, ils affichaient au quatrième trimestre une baisse de 36 % en glissement annuel, essentiellement en raison d’une chute de la demande sur fond d’inflation. L’UTLF estime cependant nécessaire d’attendre les résultats du premier trimestre de cette année pour évaluer les conséquences de la crise en mer Rouge.
Suite aux attaques des Houthis qui ont compromis le trafic sur cet axe majeur du commerce entre l’Europe et l’Asie, les compagnies ont dérouté leurs navires via le Cap de Bonne Espérance. Certes, les taux de fret ont explosé en janvier dernier, rappelle le baromètre de l’association professionnelle : le Freightos Baltic Index a doublé et triplé sur la seule voie Asie-Europe.
Alors qu’ils étaient depuis retombée, les taux sont repartis à la hausse (+ 16,7 % sur la dernière semaine d’avril) en raison d’un regain de la demande et de la pénurie de capacité des compagnies maritimes. Les ports méditerranéens n’étant plus desservis par les services « Asie-Europe de Nord », les compagnies ont transféré leurs capacités vers les lignes « Asie-Méditerranée » avec pour corollaire une perte de 10 % des capacités sur la route reliant l’Asie à l’Europe du Nord.
Les taux de fret de l’aérien toujours en baisse
L’année 2024 a également bien commencé pour le fret aérien qui avait déjà amorcé une solide reprise en 2023. Selon les données de l’IATA, l’activité exprimée en tonnes-kilomètres de chargement (CTK) a progressé de 13,2 % sur un an au premier trimestre, et mars a été le quatrième mois consécutif de croissance à deux chiffres. Les capacités, exprimées en tonnes-kilomètres de chargements offertes, ont bondi de 11,4 % au premier trimestre. La Fédération internationale de l’aviation s’attend à une hausse de 4,5 % de l’activité pour 2024, notamment en raison du dynamisme de l’e-commerce.
Alors que les taux de fret ont dévissé de -32 % l’an dernier, ils sont restés supérieurs de 42 % à ceux pratiqués en 2019, avant la crise sanitaire. En France, après un rebond de 11 % au troisième trimestre, le coût du transport de fret par avion a retrouvé une tendance baissière, enregistrant une chute de -18 %.
En outre, et l’aérien et le maritime devraient profiter de la reprise du commerce international, estime l’UTLF. Selon les prévisions publiées par l’OMC en avril, les volumes échangés devraient augmenter de 2,6 % cette année et de 3,3 % en 2025. Cette reprise, qui repose sur une hausse du pouvoir d’achat en Europe, portée par la désinflation et une hausse des salaires, reste cependant suspendue à l’évolutions des tensions géopolitiques et à la tentation du protectionnisme.
Sophie Creusillet