C’est un facteur qui plombe les perspectives du secteur du transport routier de marchandise et le service aux chargeurs : la pénurie de chauffeurs qui perturbe actuellement le secteur n’est pas prête de se résorber. Un nouveau rapport de l’IRU (International Road Transport Union), l’organisation international des transporteurs routiers, estime au contraire qu’elle doublera au cours des cinq prochaines années.
C’est le chiffre choc de ce nouveau rapport de l’IRU publié le 20 novembre, qui se base sur les données de 36 pays : plus de 3 millions de postes de chauffeurs routiers sont actuellement vacants dans les pays étudiés et ce chiffre devrait doubler d’ici 5 ans si la courbe ne s’inverse pas.
Principale cause de cette évolution : le vieillissement démographique. Seulement 12 % des conducteurs ont moins de 25 ans, et seulement 6 % sont des femmes.
Le phénomène touche tous les continents. Le rapport de l’IRU a été élaboré sur la base des données fournies par 4 700 entreprises de camionnage en Amérique, en Asie et en Europe, représentant 72 % du PIB mondial. En 2023, la pénurie de chauffeurs s’est encore aggravée, sauf en Europe et aux États-Unis, « où les pénuries se sont légèrement atténuées en 2023 en raison d’une baisse de la demande de transport en raison de l’inflation et d’un resserrement de la politique monétaire limitant la consommation et l’investissement ».
La Turquie et l’Ouzbékistan sont les deux pays les plus impactés avec respectivement 16 % et 15 % de postes non pourvus. La Russie n’est pas loin avec 14 %, suivie de la Chine (12 %), l’Argentine (11 %), le Mexique (9 %). L’Europe, avec 7 % de postes non pourvus s’en tire mieux grâce à une conjoncture déprimée.
Mais compte tenu du vieillissement démographique, la situation risque de devenir préoccupante selon l’IRU. « Si rien n’est fait pour attirer et retenir les chauffeurs, plus de 7 millions de postes de chauffeurs routiers pourraient être vacants d’ici 2028 dans les pays étudiés, dont 4,9 millions en Chine (20 % du total des postes), 745 000 en Europe (17 % du total des postes) et 200 000 en Turquie (28 % du total des postes) ».
Comment rendre cette profession plus attractive ? Ce sera la clé pour enrayer le phénomène. Le secrétaire général de l’IRU, Umberto de Pretto, en appel aux gouvernements : « Les opérateurs font leur part, mais les gouvernements et les autorités doivent redoubler d’efforts pour améliorer les conditions de travail et l’accès à la profession », estime-t-il. D’après le rapport, dans la plupart des pays étudiés, au moins 50 % des transporteurs routiers ont de sérieuses difficultés à recruter des chauffeurs qualifiés, et bon nombre d’entre eux sont également incapables de développer leur activité et perdent des clients et des revenus existants.
L’écart entre l’école et la route est un défi majeur auquel l’industrie est confrontée, selon l’IRU. L’âge minimum pour le transport international de marchandises se situe encore entre 21 et 26 ans dans certains pays. S’y ajoutent les coûts élevés de la formation (en France, 5250 euros pour un permis poids lourd et un certificat d’aptitude), de l’immatriculation et de l’assurance. L’IRU souhaite également un assouplissement des règles de recrutement des chauffeurs de pays tiers.