Le retour au pouvoir de Donal Trump ainsi que les tensions géopolitiques font planer l’incertitude sur les perspectives du trafic maritime en 2025 alors que les alliances maritimes sont en pleine reconfiguration. FranceAgrimer vient de publier les offres de desserte des ports français mais sans garantie qu’elles restent stables en cas de ralentissement économique trop prononcé. Revue de détail.
Véritable baromètre du commerce mondial, le trafic maritime conteneurisé devrait afficher cette année une croissance en net ralentissement, passant de 3,3 % en 2024 à 2 % cette année, selon l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Dans sa nouvelle lettre de veille trimestrielle sur le transport maritime, FranceAgrimer rappelle que les projections de Clarksons Research font état d’une croissance de 3 % cette année. Alors 3 % ? 2 % ? Dans un contexte aussi difficile qu’incertain, l’exercice traditionnel des prévisions annuelles du secteur relève de la divination.
Les attaques houthies en mer Rouge, la sécheresse du canal de Panama ou encore la guerre en Ukraine ont rappelé que le transport maritime, essentiel au commerce international, était particulièrement vulnérable aux tensions géopolitiques et au changement climatique. Malgré ces turbulences, le trafic a continué de se développer l’an dernier, en grande partie grâce à la vigueur des importations nord-américaines.
Demande américaine et ralentissement chinois
Disposant d’une économie en bien meilleure forme que celle de l’Europe, les opérateurs aux États-Unis ont également anticipé la mise en place de droits de douane par l’administration Trump II en surstockant. Conséquence : alors que la demande chinoise est faible, c’est cette demande américaine qui a tiré la croissance en 2024, avec des importations en hausse de 14,8 %. Les congestions sur les ports de la côte Est témoignent de ce regain d’activité dans les ports états-uniens.
C’est dans cette conjoncture que se redessinent les alliances maritimes. Et leur couverture des ports français « constitue l’un des enjeux majeurs de la conteneurisation en France, notamment pour les logisticiens et les chargeurs », souligne France Agrimer. Depuis le 1er février, Maersk et Hapag-Lloyd opère dans le cadre de l’alliance Gemini, qui propose de ne plus faire escale à Marseille et au Havre pour ses grandes routes tout en continuant à desservir ces ports à l’aide de navettes.
Moins 11 % de capacité
La réorganisation des alliances maritimes devrait entrainer une baisse de 11 % des capacités entre l’Asie et le range Nord, selon Le chargeur, la lettre d’information d’Ovrsea. « De nombreuses entreprises ont reporté leurs appels d’offres annuels en attendant la fin des festivités du Nouvel An chinois, espérant bénéficier de conditions plus favorables, analyse la newsletter. Par ailleurs, afin de sécuriser des volumes sous contrats, certaines compagnies offrent des remises allant jusqu’à 28 % sur les contrats de plus de six mois, ce qui reflète la complexité actuelle des négociations entre chargeurs et compagnies maritimes. »
Les nouvelles alliances maritimes et les ports français
Les compagnies de l’Ocean Alliance (CMA CGM, Cosco, OOCL, Evergreen) ont étendu leur coopération jusqu’à 2032. Après le départ de Maersk de l’Alliance 2M, MSC navigue en solitaire, tandis qu’après le départ de Hapag-Lloyd, HMM, One et Yang Ming se sont réunies au sein de Premier Alliance. Dans sa lettre de veille, France Agrimer récapitule les services proposés par ces nouvelles alliances. A savoir :
– Entre l’Extrême-Orient et le range Nord ou la Méditerranée :
MSC rejoint Premier Alliance : quatre services (deux touchant Marseille et deux Le Havre).
Ocean Alliance : deux services au Havre, deux à Marseille et un à Dunkerque.
– Transatlantique :
MSC : toujours quatre services aux Havre (deux avec les États-Unis, deux avec le Canada) et deux à Marseille (un avec la côte Ouest, un avec la côte Est).
Ocean Alliance et One (Premier Alliance) : deux services avec la côte Est, un service avec l’Australie en passant par New York et Miami.
CMA CGM et One : un service entre le Havre et la côte Ouest. Marseille dispose d’un service pour le Canada mais à perdu celui de la côte Est.
HMM : un service entre Le Havre et la Ouest, via Miami er la canal de Panama.
– Vers l’Afrique :
MSC renforce sa présence et entre en forte concurrence avec Hapag-Lloyd qui a récemment racheté deux spécialistes de la zone (DAL et Nile Dutch).
Reste à savoir si cette reconfiguration des alliances favorisera la compétitivité des ports français, en perte de vitesse par rapport à leurs concurrents du range Nord ou du pourtour méditerranéen. Et si elle satisfera transporteurs et chargeurs. En octobre dernier, l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF) invitait « les chargeurs à la plus grande vigilance dans leurs relations avec les compagnies maritimes membres de ces nouvelles alliances, tant en matière de conduite et suivi des prestations que de pratiques tarifaires ».
Sophie Creusillet
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