Entre phénomène climatiques, conflits armés et tensions géopolitiques, la navigation des porte-conteneurs devient de plus en plus difficile. Dans un rapport paru le 26 janvier, la Cnuced (Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement) s’inquiète des conséquences sur le commerce international et constate d’ores et déjà des hausses sans précédent des coûts de transport et de la réduction des transits.
Conflit en mer Noire, assèchement du canal de Panama, attaques houthies en mer Rouge… Les perturbations du commerce mondial s’enchainent et les conséquences de chaque crise se combinent à celle des autres pour créer une situation hautement inflammable, dont la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (Cnuced) se dit « profondément préoccupée ».
Selon elle, les transits hebdomadaires par le canal de Suez ont en effet chuté de 42 % au cours des deux derniers mois tandis que le canal de Panama, en partie impraticable en raison d’une baisse des niveaux d’eau, a enregistré en décembre une baisse de 36 % en glissement annuel du nombre total de transits. « Les conséquences à long terme du changement climatique sur la capacité du canal font craindre des effets durables sur les chaînes d’approvisionnement mondiales », s’inquiète l’organisme onusien.
Toutes les routes sont concernées
Alors que, les taux de fret étaient redescendus après avoir atteint des sommets lors de la crise sanitaire, ils sont désormais repartis à la hausse de façon assez généralisée, comme de nombreux analystes l’ont déjà constaté. Au cours de la dernière semaine de décembre le taux de fret spot moyen s’est envolé de 500 dollars par conteneur, soit la plus forte hausse hebdomadaire jamais enregistrée.
Lors de la troisième semaine de janvier, les taux spot moyens de transport de conteneurs au départ de Shanghai ont augmenté de 122 % par rapport à début décembre. Ceux entre Shanghai et l’Europe ont plus que triplé (+ 256 %) sur la même période.
Signe de l’ampleur de la réaction en chaine provoquée par les perturbations de ces deux canaux indispensables au transport international de marchandises, les routes maritimes qui ne les empruntent pas sont également touchées. C’est le cas des tarifs des routes entre la Chine et la côte ouest des Etats-Unis qui ont bondi de 162 %.
Un an pour mesurer l’impact de la crise actuelle
Les contournements effectués par les navires ne pouvant plus emprunte ces canaux se traduisent non seulement par un allongement du temps de transport, entrainant une augmentation des dépenses celle des primes d’assurance. En outre, alors que l’heure est à la décarbonation d’un secteur particulièrement polluant, la situation contraint les navires à aller plus vite pour compenser le temps des contournements. Ils consomment plus de carburant et émettent donc plus de CO2.
Dans son communiqué, la Cnuced s’inquiète également des conséquences de ces blocages sur les prix des denrées alimentaires et de l’énergie. « Bien que les tarifs actuels des conteneurs représentent environ la moitié du pic atteint lors de la crise de Covid, la répercussion de la hausse des tarifs de fret sur les consommateurs prend du temps, et l’impact total devrait se manifester dans un délai d’un an », anticipe son communiqué.
D’ici là, la Cnuced incite à « une adaptation de toute urgence de l’industrie du transport maritime et d’une coopération internationale solide pour faire face au remodelage dans les plus brefs délais de la dynamique du commerce mondial ».
Sophie Creusillet