Avec l’intensification ce week-end des attaques des rebelles houthis depuis le Yémen contre des navires croisant en mer Rouge, plusieurs armateurs européens, dont CMA CGM, ont pris la décision de stopper leurs navires. Certains ont déjà organisé le rerouting vers ou depuis l’Asie par le cap de Bonne espérance, au sud du continent africain.
Le ton monte en mer Rouge. Dernière attaque en date : lundi 18 décembre au matin, une explosion a retenti prés des côtes du Yémen, dans le détroit de Bab el-Mandeb, un lieu stratégique entre la Corne de l’Afrique et la péninsule arabique où transitent chaque année 10 % du trafic mondial d’hydrocarbures et 12 % du commerce international. Cet incident, signalé par un capitaine, a eu lieu à proximité de son navire, à environ 5 kilomètres des côtes yéménites. Le Bureau des opérations commerciales maritimes britanniques (UK MTO), installé à Dubaï, a émis une alerte.
Depuis une quinzaine de jours des navires appartement à des compagnies européennes sont l’objet d’attaques de la rébellion houtie, armée par Téhéran et le Hezbollah libanais, en soutien aux Palestiniens de la bande de Gaza. Maersk, Hapag-Lloyd, MSC et CMA CGM ont déjà fait les frais de ce regain de violence. Dans ce contexte, ces quatre armateurs, parmi les plus grands au monde, ont décidé de stopper la navigation de leur porte-conteneurs dans la zone.
« Nous avons donc décidé d’ordonner à tous les porte-conteneurs de CMA CGM dans la région qui doivent passer par la mer Rouge de rejoindre des zones sûres et d’interrompre leur voyage dans des eaux sûres, avec effet immédiat et jusqu’à nouvel ordre », annonçait samedi 16 décembre un bref communiqué de l’armateur marseillais.
Quid de ces navires qui ne peuvent pas rester indéfiniment à l’arrêt ?
La solution : contourner l’Afrique
MSC, le taïwanais Evergreen et le coréen HMM (Hyundai Merchant Marine) ont d’ores et déjà opté pour un rerouting via le Cap de Bonne-Espérance. « Les autres compagnies devraient suivre, confie au Moci Héloïse Roux, Team Lead Ocean Procurement chez le commissionnaire en ligne Ovrsea. Sur un Shanghai-Le Havre, contourner l’Afrique rallonge de 10 à 15 jours le temps de navigation. Même s’il est encore trop tôt pour la chiffrer, il y aura une augmentation des coûts et certainement des congestions ainsi qu’un allongement des temps de transit. » Les contrats d’assurance devraient également devenir plus chers.
« En outre, si le rerouting est plus cher et plus long, il intervient en période de préparation du Nouvel An chinois, alors que les bateaux sont pleins et que les capacités baissent, ce qui entraîne des surcoûts », explique Héloïse Roux. S’il est difficile à l’heure actuelle d’anticiper l’évolution de la situation, « les armateurs ne paniquent pas, ce sont de grandes organisations ayant l’habitude de gérer des situations d’urgence, mais nous avons en revanche reçu beaucoup d’appels de chargeurs inquiets de la situation en mer Rouge ».
Si cette crise venait à se prolonger, bloquant une part importante du trafic maritime mondial, le train pourrait redevenir un moyen de transport pertinent entre la Chine et l’Europe, selon l’experte d’Ovrsea.
Sophie Creusillet