Après une année 2021 particulièrement faste en raison de la reprise post-Covid, les plus grands ports du monde ont affiché un net recul de leur trafic de conteneurs en 2022, selon le classement opéré par la plateforme dédiée aux professionnels du transport Upply. Les ports chinois dominent toujours le classement mondial.
Véritable baromètre du commerce international, le transport maritime a globalement suivi la tendance des échanges mondiaux l’an dernier avec un premier semestre porté par la dynamique de la reprise d’après Covid et un net ralentissement au cours des six derniers mois de l’année.
Les 20 premiers ports de conteneurs ont enregistré un trafic de 382,7 millions d’EVP d’équivalents vingt pieds (EVP), en légère hausse de 0,5 % par rapport à 2021.
Les plateformes asiatiques renforcent leur influence
L’Asie occupe 14 places du top 20 des ports au niveau mondial, soit une de plus qu’en 2021, Hambourg ayant cédé son 20e rang au Thaïlandais Laem Chabang. Dans le top 10, Singapour et Busan (Corée du Sud) maintiennent leur place (2e et 7e) malgré des trafics en baisse.
Au total, les ports asiatiques représentent 81,6% du trafic du top 20, contre 7,5 % pour les ports américains et 7,3 % pour les ports européens.
Les ports chinois tiennent le haut du classement dont ils occupent quatre des cinq premières places. L’Empire du Milieu truste huit places du top 22 dont ils ont assuré 55,1 % du trafic cumulé (contre 53,8 % en 2021). Hormis Hong Kong, tous ont vu leur activité augmenter en 2022. Les 10 premiers ports chinois ont enregistré un trafic cumulé de 212,8 M d’EVP en 2022, soit une croissance de 4,7 % par rapport à 2021 alors que des confinements ont émaillé l’année.
Ces restrictions ont affecté la production des usines, mais aussi parfois le fonctionnement de certains établissements portuaires. La croissance globale peut peut-être s’expliquer par le fait qu’en début d’année, la dynamique économique était encore très favorable, estime Upply.
Shanghai, numéro 1 mondial loin devant Singapour
Les résultats de Shanghai illustrent cependant les aléas de 2022. Le port connaît une modeste progression de 0,6 %, sans que cela ne remette en cause sa place très dominante de n°1 mondial, largement devant Singapour. Shanghai a été confronté à des périodes de confinements qui ont pesé sur sa croissance. Il se peut que cela explique en revanche en partie la bonne performance de Ningbo, car certains flux ont pu être alors redirigés.
Un autre port s’illustre dans le top 10 de 2022 : Beibu Gulf, près de la frontière avec le Vietnam. Il enregistre la plus forte croissance du top 10, celle-ci étant portée par le développement du commerce entre la Chine et l’Asie du Sud-Est. Le top 10 lui-même reste quasiment inchangé, si ce n’est que le port de Yingkou en est sorti, remplacé par celui de Liangyungang.
Les ports américains très affectés par les congestions
Aux États-Unis, les ports de la façade Ouest ont été significativement affectés par les phénomènes de congestion, qui ont perturbé l’activité et poussé à des redirections au profit de la côte Est. Si l’on cumule les résultats des ports de Los Angeles et Long Beach, cet écosystème logistique reste la principale porte d’entrée des États-Unis, avec un trafic cumulé de 19 millions d’EVP qui la place au 9e rang mondial.
En revanche, si l’on scinde les résultats de Los Angeles et Long Beach, les plateformes américaines se retrouvent dans le dernier quart du top 20 mondial. Dans cette configuration, Rotterdam conserve son 10e rang malgré une baisse de 5,5 %. Le 2e et désormais dernier port européen du top 20, puisque Hambourg en est désormais sorti, parvient également à se maintenir à la 12e place. Une stabilité en trompe l’œil puisque les résultats de 2022 intègrent à la fois les chiffres d’Anvers et de Zeebrugge, suite à leur fusion.
En Europe, les ports du range Nord occupent les premières places
Sur le Vieux Continent, les résultats préliminaires montrent un recul du trafic de 5 %. Les trois ports du range Nord constituant le trio de tête, inchangé depuis 2021, représentent 56 % du trafic cumulé du top 10 européen. Rotterdam devance toujours son voisin belge Anvers, désormais fusionné avec Zeebrugge, ainsi que le port allemand de Hambourg. Tous trois ont connu un déclin dans des proportions assez similaires, aux alentours de 5%.
A Rotterdam, le trafic (exprimé en tonnes) a chuté de 9,6 % et le nombre de conteneurs de 5,5 %. « La différence s’explique par une forte augmentation des arrivées de conteneurs pleins en provenance d’Asie au cours des neuf premiers mois de l’année, en raison de la forte demande de biens de consommation, a indiqué l’autorité portuaire. Dans le même temps, les exportations ont baissé et beaucoup plus de conteneurs vides ont été réexpédiés. »
Autrement dit, durant une bonne partie de l’année 2022, le premier port européen a continué à souffrir des perturbations logistiques qui ont commencé en 2021, engendrant une congestion des terminaux et des centres de distribution au sein du port et dans l’hinterland. Conséquences : le fret en transbordement s’est déplacé vers d’autres ports ayant de la capacité disponible.
Pour l’autorité portuaire de Rotterdam, la principale explication du déclin de 2022 réside dans la guerre en Ukraine et les sanctions à l’encontre de la Russie. Avant la guerre, plus de 8 % (en EVP) du trafic de conteneurs de Rotterdam était lié à la Russie. « Rotterdam détenait une part de marché de 40 % dans ce trafic. Ces volumes ont pratiquement disparu après le mois de mars », souligne le port dans un communiqué. Un argument également mis en avant par Anvers ou par Brême, 4e port du range nord présent dans ce top 10.
Les ports espagnol leaders en Méditerranée
Avec trois ports dans le top 10, l’Espagne se distingue toujours sur la façade méditerranéenne, malgré une année particulièrement difficile pour Valence qui a notamment subi un déclin important de l’export de conteneurs pleins et surtout du trafic de transbordement, en baisse de près de 17 %. Les deux autres ports espagnols du top 10, Algésiras et Barcelone, réalisent une bonne performance avec un nombre de conteneurs quasi stable.
La concurrence de l’autre rive de la Méditerranée est pourtant sévère. Tanger Med poursuit sa croissance, avec une progression de 6 % en 2022, qui porte le trafic du port marocain à 7,6 millions d’EVP (M EVP).
Dans le top 10 européen, seul l’italien Gioia Tauro fait mieux, avec une croissance estimée à 7,1 %. Au Pirée, en revanche, les chiffres disponibles à ce stade laissent entrevoir un recul significatif que l’on peut attribuer aux difficultés économiques et aux soubresauts de la politique zéro Covid de la Chine.
Haropa ferme ce top 10 amsi hors top 10, signalons la performance très honorable du port de Marseille qui, avec une progression de 3 %, atteint les 1,53 M EVP et bat ainsi un nouveau record.
S.C.