Deux chiffres entendus au Forum Togo-Union européenne de Lomé les 13 et 14 juin derniers, résument mieux que tous les autres l’ambition du chef de l’État togolais, Faure Essozimna Gnassingbé et de son gouvernement.
Atteindre en quatre ans 7,6 % de croissance
Ces chiffres ont été rappelés dans son discours de clôture du forum par le Dr Komi Selom Klassou, le Premier ministre : « notre objectif est de passer en quatre ans d’un taux de croissance du PIB réel de 5,1 % à un taux de 7,6 %. » On saura à l’horizon 2022, fin de cette première étape du Plan National de Développement (PND) du Togo, si le pari est gagné.
Car de ce résultat découlent beaucoup d’autres bonnes nouvelles pour ce petit État du golfe de Guinée, dont l’atout principal est aujourd’hui sa rade en eau profonde sécurisée, et le port de sa capitale, Lomé, classé une nouvelle fois meilleur hub de transbordement d’Afrique de l’Ouest et du centre par la fondation Africans Ports Awards.
2,5 points de croissance, toujours selon le Dr Klassou, cela représente la création de 500 000 emplois, une augmentation de 9,7 % du revenu par tête, une réduction des inégalités et une baisse considérable du taux de pauvreté.
La place la plus large possible au secteur privé
On comprend mieux ainsi cette mobilisation générale des énergies et des talents qui a présidé à l’organisation -parfaite- de ce premier Forum économique Togo-Union européenne.
Pendant plusieurs mois les équipes réunies autour de Kodjo Adedzé, le ministre du Commerce, de l’industrie, et du développement du secteur privé, Victoire Tomegah-Dogbé ministre du Développement à la base, de l’artisanat et de la jeunesse et directrice de cabinet du président et de Ablamba Sandra A. Johnson ministre déléguée et conseillère au cabinet, en charge du Climat des affaires, n’ont ménagé ni leur temps ni leur peine pour faire de ce coup d’essai un coup de maître.
Tout était organisé pour que le forum fasse la place la plus large possible au secteur privé. Tous les ateliers composant les sections parallèles et notamment ceux dédiés à la présentation des axes stratégiques du PND comportaient des volets « opportunités d’investissements au Togo et opportunités de financement. »
Les pauses étaient consacrées au réseautage et plusieurs salles dédiées au matchmaking B to B.
Plus d’1,3 milliard d’euros de projets d’investissement
Résultat : tous les objectifs fixés par le comité d’organisation ont été dépassés. On attendait 400 participants (dont 150 de l’Union européenne), il en est venu 1 250 à l’ouverture qu’il a fallu asseoir sur des chaises de fortune.
Au total, 141 bons projets « bancables » pour plus d’ 1,3 milliard d’euros ont été recensés en lieu et place de la centaine attendue pour moins de 500 000 euros. Mieux encore les projets phares du PND, ceux que recensent les trois grands axes stratégiques du plan (le hub logistique, les pôles de transformation agricole et manufacturière et d’industries extractives, et le pôle du développement social) ont vu leur enveloppe globale monter à 6,3 milliards d’euros.
Le forum a aussi été le lieu du lancement de la Chambre de commerce européenne au Togo et de la signature de divers textes dont la lettre d’adhésion du Togo au Centre de développement de l’OCDE.
L’investissement privé, nouveau paradigme de l’action extérieur de l’UE
L’Union européenne n’a pas boudé son plaisir. Elle l’a fait savoir par la voix de son principal représentant Jyrki Katainen, un des vice-président de la Commission pour qui ce forum était « un rendez-vous inédit en ligne avec le nouveau paradigme de l’action extérieure de l’UE permettant de faciliter la mobilisation d’investissements privés pour créer de la croissance et de l’emploi au Togo. D’ailleurs les différents financements de l’UE dédiés au soutien à l’investissement privé ont été présentés lors de l’évènement. »
Et de conclure :
« L’inclusion du Togo en 2018 dans l’initiative du G20 « Compact With Africa » qui soutient les réformes visant l’amélioration du climat des affaires, et son bond spectaculaire de 19 places dans le classement Doing Business 2018 ne sont donc pas un hasard. »
Et le vice-président de la Commission européenne a lancé une invitation à tous les investisseurs européens à saisir cette occasion unique pour diversifier leur portefeuille d’investissement et élargir leur couverture géographique pour un partenariat gagnant-gagnant entre l’Union européenne et le Togo.
Jyrki Katainen n’a pas été le seul à prodiguer encouragements et conseils. Qu’ils appartiennent au secteur privé comme Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique, au gotha de la science économique comme Dominique Strauss-Kahn, Carlos Lopes (ONU) ou Mario Pezzini (OCDE), ou à la haute finance comme Lionel Zinsou, Ade Ayemi. Ou qu’ils soient représentatifs des principales organisations financières mondiales comme Ronke-Amoni Ogunsulire, directrice pays à la Société financière internationale (Ghana, Bénin, Burkina Faso, Guinée, Niger, Togo), tous ont été d’accord pour dire que le moment était venu pour le Togo de franchir une étape.
Les Français dont les acteurs publics avaient laissé notre ambassadeur un peu seul, étaient toutefois bien représentés par Etienne Giros, président délégué du Conseil des investisseurs français en Afrique (CIAN) et président du Conseil européen des affaires pour l’Afrique et la Méditerranée (EBCAM).
Lui a eu raison d’être là : ce sommet restera comme un signal important d’une nouvelle ère dans les relations entre l’Europe et les États africains.
Vincent Lalu