Face aux retards de livraison des marchandises importées par voie maritime en raison des tensions persistantes sur le marché du fret, les entreprises de la Ficime, la Fédération des entreprises internationales de la mécanique et de l’électronique demandent une suspension des pénalités de retard dans les commandes publiques. D’autres fédérations montent au créneau.
Six semaines et demie. C’est, en moyenne, le retard enregistré par le fret maritime allant dans certains cas jusqu’à 3 mois, selon une enquête menée récemment par la Ficime auprès de ses membres.
En outre, le coût du fret s’est envolé ces derniers mois. Le Freightos Baltic Index, qui mesure le prix de transport par conteneur, est ainsi passé de 2291 USD à 4267 USD entre le 13 novembre 2020 et le 16 avril dernier.
Alors que la demande européenne et américaine de produits en provenance d’Asie est actuellement exponentielle et que la pénurie de conteneurs perdure, le coût du fret maritime ne cesse de grimper. Une épine dans le pied du commerce international puisque que 90 % des marchandises échangées dans le monde le sont par voie maritime.
Une situation que n’a évidemment pas arrangé le blocage par l’Ever Given du canal de Suez par lequel sont acheminés plus de 70 % des importations françaises. Les retards provoqués devraient mettre des semaines à se résorber.
Ces tensions qui pèsent sur le fret maritime suivent une année 2020 qui a vu le commerce maritime mondial baisser de 4,1 % selon une estimation réalisée en novembre par la Cnuced.
Les pénalités sur les retards de livraison pèsent 7 % du chiffre d’affaires
Pour ne pas être indûment pénalisées par les retards de livraison et faire face aux conséquences financières des tensions actuelles sur le transport, la Ficime, qui regroupe 450 importateurs et distributeurs français et internationaux, a demandé au gouvernement le 22 avril dans un communiqué de presse de suspendre les pénalités de retard que mentionnent les contrats de vente des marchés publics, quel soit le mode de transport.
Ces pénalités, marchés publics et commerce B2B réunis, représentent en effet 7 % du chiffre d’affaires en moyenne des entreprises sondées par la fédération professionnelle, allant jusqu’à 25 % pour certaines d’en elles.
C’est au cours d’une rencontre réunissant, la semaine ayant précédé la publication du communiqué, les acteurs de la filière logistique au ministère de la Mer, organisée sous l’égide de Loïc Millois, conseiller Ports et Transports maritimes, que Laurence Fauque, déléguée générale de la Ficime, a évoqué cette possibilité. « Mes interlocuteurs se sont montrés réceptifs à cette demande et prêts à la relayer auprès du gouvernement qui est aujourd’hui le plus à même d’agir à court terme pour aider les entreprises qui font aujourd’hui face aux tensions sur le fret », confie au Moci cette avocate spécialisée en droit des affaires.
Concrètement, cette demande de suspension des pénalités de retard adressée à l’Etat, ne peut concerner que les contrats de vente signés dans la cadre de marchés publiques. Quid des contrats privés ? « L’Etat ne peut pas intervenir dans des contrats privés, mais il peut solliciter la solidarité des différents acteurs de la filière », espère Laurence Fauque.
Les fédérations mènent actuellement un lobbying actif
Si ce sujet n’a pas été évoqué lors de la rencontre, le 20 avril, entre Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l’Industrie, et Eric Trappier, le nouveau président de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), secteur également concerné par les conséquences de ces pénalités de retard, c’est essentiellement, selon le service de presse de l’UIMM, en raison du format de cette rencontre « d’installation » : il s’agit d’une première prise de contact entre une ministre et le président d’une fédération en poste depuis seulement cinq jours.
Agnès Pannier-Runacher a, en revanche, fait un point de situation avec des représentants de l’industrie, le 14 avril, sur les tensions d’approvisionnement. A cette occasion, la ministre a appelé les acheteurs publics à prendre en compte les difficultés actuelles et à ne pas appliquer de pénalités de retard lorsque cela est justifié.
Alors que les tensions sur le fret, l’envolée du prix des matières premières et le retard de livraisons constituent selon la Ficime une « triple peine » pour les entreprises importatrices, ces dernières appuient en ce moment de tout leur poids pour obtenir cette suspension des pénalités de retard dans les contrats de vente.
Sophie Creusillet