L´agence Ubifrance a organisé le 23 février dernier des «Rencontres B to B Irak», à l´occasion de la venue à Paris d´une délégation irakienne. Forte d´une quarantaine de membres, celle-ci couvrait quatre secteurs d´activité (santé, électricité, bâtiments/travaux publics, et agriculture-agroalimentaire). Une assistance nombreuse d´hommes d´affaires français y assistait car le marché irakien aiguise les appétits, même s´il s´est avéré moins prometteur que prévu après l´intervention anglo-américaine.
Alors que les exportations directes françaises demeurent très modestes (521 millions d´euros en 2010), ce sont surtout les perspectives de contrats, voire d´implantation locale, qui intéressent les entreprises françaises. De fait, dans le secteur pétrolier, Technip, Total (18,75% du champ pétrolier d´Halfaya), et Perenco (licence d´exploration au Kurdistan) ont déjà signés des contrats. Lafarge est évidemment le principal investisseur français et même étranger, car le groupe détient trois cimenteries (deux au Kurdistan, une à Kerbala) et a racheté récemment un bétonnier local (27 centrales à béton dans le pays).
En matière de transports, CMA CGM dessert le port d´Umm Qsar. Dans l’industrie, Schneider Electric est de nouveau présent à Bagdad tout comme Sanofi Aventis. Pour la distribution, le doubaïote Majid Al Futtaim, détenteur de la franchise Carrefour pour l´ensemble du Moyen-Orient, envisage toujours d´y ouvrir deux supermarchés, en commençant par le Kurdistan. Enfin, dans le secteur automobile, Renault envisagerait d´installer une ligne d´assemblage de camions en Irak. Pour sa deuxième édition depuis le changement de régime en Irak, la foire internationale de Bagdad, qui avait mobilisé 41 entreprises en 2010, se déroulera du 1er au 5 novembre prochain.
Reste quand même des difficultés, comme un système bancaire peu efficient et bureaucratique. HSBC est la seule banque occidentale présente localement grâce au rachat (à 70%) de la banque Dar es Salam, mais elle justifie des tarifs élevés par le fait que, sur 500 salariés, 350 sont dédiés à la sécurité. Justement, ceux-ci peuvent également rebuter une PME. Même si désormais il y a un réseau de relais officiels français à Bagdad (ambassade, mission économique, Centre français des affaires, considéré comme un peu cher, Agence française de développement, Proparco) et à Erbil (consulat et Maison de l´agriculture et de l´environnement). Concernant le transport jusqu´en Irak, alors qu´Aigle Azur avait inauguré en grande pompe une liaison unique Paris-Bagdad aller-retour, la compagnie refuse à présent de donner une date pour la mise en service régulière de cette ligne. Selon certaines sources, il n´y aurait pas assez de passagers potentiels.
Dans son dernier bulletin, le cabinet en gestion des risques Geos, tout en relevant une hausse significative de l´insécurité dans des régions jusque là épargnées, met en garde contre une seconde menace d´instabilité inconnue auparavant : «si la faim et l´injustice sont les moteurs de la révolte arabe, une intensification du mouvement irakien ne doit pas être négligée». Sans doute pour conjurer cette menace, le gouvernement irakien qui s´est constitué en décembre dernier a décidé de reporter la loi qui augmentait les tarifs douaniers (tarif unique de 5% depuis 2003) et devait entrer en vigueur au début de la semaine prochaine.
Jean-François Tournoud