Yannick Jadot, l’eurodéputé écologique français, défendra le 8 mars en session plénière du Parlement européen (PE) son rapport* sur le projet de résolution parlementaire visant à établir un mécanisme européen d’ajustement des émissions de carbone aux frontières – ou « taxe carbone aux frontières »-, fruit d’un consensus dégagé entre les trois Commissions Environnement, Commerce international et Affaires économiques.
Lors d’un point d’étape à la presse en visioconférence le 3 mars sur ce sujet clé du commerce international européen du futur, Yannick Jadot, rapporteur de ce projet de résolution au titre de la commission de l’Environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du PE, s’est montré à nouveau confiant sur les chances d’adoption du rapport : « il est soutenu assez largement au Parlement européen » a-t-il déclaré.
Il avait déjà présenté les grandes orientations de ce projet de résolution en octobre dernier, lors d’un précédent point presse dont nous avions largement rendu compte (cliquez ICI).
La seule crainte de l’eurodéputé écologiste français : les manœuvres de certains de ses collègues allemands issus du Parti populaire européen (PPE) qui chercheraient, selon lui, à « casser les compromis que nous avons trouvé en commission, notamment sur la question des quotas gratuits ». Le projet parlementaire prône en effet la fin du système des quotas gratuits, qui a donné lieu à des dérives et s’est avéré inefficace pour inciter les industriels à innover pour réduire leurs émissions de CO2. « Jusqu’à présent, les parlementaires français du PPE soutiennent le projet » a précisé Yannick Jadot.
Et de rappeler que le principe d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières fait aujourd’hui l’objet d’un consensus large dans toutes les institutions européennes en raison des attentes fortes de la population européenne dans ce domaine.
Lutter contre le « dumping climat »
Aux yeux du rapporteur Jadot, loin d’être un instrument de protectionnisme incompatible avec les règles de l’OMC, cet instrument mettrait au contraire les industriels européens sur un pied d’égalité avec les industriels des pays tiers, qui ne sont pas soumis aux mêmes contraintes environnementales, luttant ainsi contre le « dumping climat » et incitant les pays tiers à accentuer leurs efforts pour réduire l’impact carbone de leurs activités.
« C’est d’abord un outil au service d’une politique climatique » a estimé l’eurodéputé Vert. D’autres objectifs sont toutefois mis en avant par les parlementaires, comme la préservation de l’emploi, la réindustrialisation et l’innovation.
Rappelons que l’objectif climatique de l’Union européenne (UE) est de réduire d’ici 2030 de 55 à 60 % ses émissions de gaz à effets de serre (l’objectif final fait encore l’objet de discussion au sein des institutions européennes).
Les produits ciblés : ciment, chimie, sidérurgie
Dans ce cadre, la chasse aux « fuites de carbone », qui passent notamment par une régulation plus forte desimportations de produits « carbonés », est commencée.
Le projet de résolution du PE cible, dans une première étape, les importations de matières premières et produits industriels de base fortement carbonés tels que le ciment, les produits chimiques ou encore les produits sidérurgiques.
Quatre grandes options sont sur la table pour ce mécanisme : un mécanisme proche de l’actuel système européen d’échange de quotas d’émission (ETS) connu sous le sigle ‘SEQE-UE’, des droits de douane spécifiques, une forme de taxe à la consommation qui favoriserait les produits vertueux nationaux ou importés, et même un rabais (ou subvention) aux exportations.
Le rapport parlementaire penche pour sa part pour un système ETS qui serait le « miroir » du système existant dans l’UE une fois réformé, s’appliquant aux exportateurs des pays tiers. Principale raison de ce choix : il a l’avantage de « fixer un objectif de production maximum de gaz à effet de serre » a expliqué l’eurodéputé. « En commission de l’Environnement, nous avons obtenu un wording [libellé] qui prévoit d’aller rapidement du système actuel à un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières », s’est réjoui Yannick Jadot.
« Aucune option n’est pour l’instant écartée » a toutefois indiqué Yannick Jadot, dont le rapport présente et discute tous les cas de figure. Ce point de vue du Parlement européen, qui espère la mise en place d’un tel mécanisme au plus tard en 2023, devrait peser dans le choix final de la Commission.
Rendez-vous le 8 mars à 17 H 00 pour le débat parlementaire, avant un vote programmé le lendemain. A suivre…
Christine Gilguy
*Pour prolonger :
Le lien vers le rapport complet : cliquez ICI.