Président de la CGPME Rhône-Alpes depuis 1997 et administrateur d’Entreprise Rhône-Alpes International (Erai), bras armé à l’international de la Région, depuis 1987, François Turcas est connu pour son franc parler. Pour la Lettre confidentielle, le président de l’organisation patronale rappelle l’importance pour les entreprises rhônalpines d’Erai, association fondée en 1987 à l’initiative du premier vice-président de la Région de l’époque, Alain Mérieux, et défend la stratégie offensive impulsée depuis 2005 par l’actuel président d’Erai, Daniel Gouffé, à contre-courant des critiques à l’égard de ce dernier*.
François Turcas, qui a décidé de s’engager dans la recherche d’une solution pour Erai en intégrant le groupe de travail mis en place par quelques administrateurs pour trouver un plan B sous la conduite de Pascal Nadobny* réfute ainsi toutes les critiques qui fusent à l’égard du président d’Erai, les unes après les autres. D’abord, que le réseau des bureaux, avec 27 implantations à l’étranger, serait trop vaste*. « C’est facile de critiquer, affirme-t-il. Daniel Gouffé a donné une dimension internationale à l’organisme qu’il préside. Mais le budget d’Erai est ce qu’il est, insuffisant ». Pourquoi ne lui donne-t-on pas des moyens similaires au Bade-Wurtemberg ou à la Catalogne ? Est-ce que l’on veut que Rhône-Alpes ait une dimension mondiale ou veut-on simplement exister ?
Le pavillon régional à Shanghai est « une très belle vitrine »
Pour François Turcas, qui est aussi conseiller du commerce extérieur de la France (CCEF), Erai s’est efforcé de saisir « les opportunités, d’être souple comme les TPE et PME ». Même s’il reconnaît qu’en certaines circonstances l’organisme a pu manquer de « réactivité », il s’emporte quand on conteste « le dynamisme » de la structure. D’ailleurs, l’inusable patron de la CPME Rhône-Alpes, réélu l’an dernier à l’unanimité pour un nouveau mandat de trois ans, estime qu’Erai a effectué un parcours sans faute jusqu’en 2010, année de l’Exposition universelle de Shanghai.
« C’était un projet surdimensionné pour ses seules ressources. Le coût de l’Espace Rhône-Alpes à Shanghai était astronomique et çà aurait dû être à la Région de supporter directement la charge de ce pavillon ». Certes, reconnaît-il, « la Région a, par la suite, repris les actifs », mais, selon lui, « après ce déséquilibre, les finances d’Erai étaient engagées sur une mauvaise pente ». Après l’exposition universelle, Rhône-Alpes a été un des seuls acteurs mondiaux à ne pas détruire son pavillon. « C’est aujourd’hui une très belle vitrine. Le projet à l’époque était intelligent et c’est par de telles structures que la France trouvera son salut », assure encore le président de l’organisation patronale.
Erai est aussi critiqué pour opérer pour la province du Québec et la région Aquitaine. « Mais c’est une ouverture réciproque avec le Québec », s’enthousiasme François Turcas, selon lequel la province canadienne offre « des synergies » et notamment « des entrées dans des pays, des régions dans lesquelles les entreprises de la région ne sont pas ». Quant à l’Aquitaine, certes, répond-il, « aujourd’hui, nous allons privilégier le tandem avec l’Auvergne, mais quand j’ai un bureau de 15 places au Canada et que 8 seulement sont prises, pourquoi je n’en offrirai pas une à une entreprise d’Aquitaine ? ».
C’est « de l’argent qui rentre », c’est ce qu’il appelle « un souci de rentabilité, une gestion saine ». Il faudrait être « malade pour ne pas accepter cela », ponctue-t-il dans un discours toujours très offensif, n’hésitant pas à égratigner au passage « certains élus qui ne comprennent pas, qui n’ont pas de formation à l’international ». Et de déplorer la « précipitation » qui a prévalu pour réformer Erai. « Il aurait été si facile de mettre l’association en tutelle, en pensant à ses 126 salariés et aux 320-370 sociétés en contact avec elle et dont certaines, au bout du monde, aujourd’hui craignent d’être abandonnées », s’insurge-t-il.
« Il n’y a jamais eu de malversation chez Erai »
François Turcas affirme n’avoir appris que par une note le mandat confié l’an dernier par la Région à MCG Managers, un cabinet spécialisé dans le management de transition, pour conduire la préfiguration de la fusion. Selon lui, « il n’y a jamais eu de malversation chez Erai, seulement un manque de transparence ». Et d’indiquer qu’il est « d’accord » s’il s’agit d’instiller « plus de rigueur et plus de synergie avec Business France, l’OSCI et d’autres pour parvenir à plus d’efficacité ».
Tout comme il est partisan d’un rapprochement entre Erai et l’Agence régionale de développement de l’innovation (Ardi), mais à condition que la fusion projetée par le Conseil régional « génère de réelles synergies et que le développement international demeure le cœur » du nouvel organisme, qui devrait s’appeler Entreprise Rhône-Alpes International Innovation (Eraii).
Mais pour l’heure, François Turcas se défend de toute critique à l’égard de Jean-Louis Gagnaire, vice-président de la Région délégué au Développement économique qui a gérer ce dossier. « C’est un homme intelligent, de bonne volonté, qui tente de trouver des solutions » dans un contexte politique difficile. Dans l’immédiat, il va devoir garder les manches retroussées …
François Pargny
* Si vous avez raté les précédent épisodes, lire :
–Rhône-Alpes : Erai se cherche un plan B après un nouveau coup de théâtre
–Rhône-Alpes : après le flop de la fusion avec l’Ardi, la locomotive Erai menace de dérailler
Et, dans la Lettre d’aujourd’hui :
– Spécial Rhône-Alpes : les arguments de Jean-Charles Kohlhaas (EELV) pour une liquidation d’Erai