C’est finalement l’offre française d’Alstom et Egis qui remportent, au nez et à la barbe de ses rivaux chinois, le marché du métro de Belgrade, grâce au déploiement notable de l’arsenal de la diplomatie économique française. Franck Riester, ministre délégué en charge du Commerce extérieur, a signé jeudi 26 novembre un accord intergouvernemental (AIG) avec le ministre des Finances serbe Sinisa Mali (notre photo), en présence du président, Aleksandar Vucic, scellant ce succès.
Neuf ans après la signature, renouvelée en 2014, d’un accord de partenariat et d’une déclaration d’intention entre la France et la Serbie pour la construction de deux lignes de métro dans la capitale serve d’un montant total de 4,4 milliards d’euros (Md EUR), les deux pays ont donc signé cet accord intergouvernemental encadrant la participation française pour la première phase du chantier de la ligne 1 (16,5 km de voies et 18 stations).
Un prêt du Trésor et des crédits bancaires garantis par Bpifrance
L’offre de ce premier financement tricolore, portant sur 534 M EUR, est composée d’un prêt du Trésor direct de 80 M EUR, couvrant les prestations d’assistance technique et une partie du lot électromécanique (matériel roulant, signalisation, communication) ainsi que de crédits bancaires garantis par Bpifrance Assurance Export d’un montant maximal de 374 M EUR.
Le texte doit encore être présenté au Parlement pour ratification début décembre et Alstom doit remettre officiellement son offre commerciale début 2021.
Le constructeur français n’est pas la seule entreprise tricolore impliquée dans ce vaste chantier qui doit à terme décongestionner la capitale serbe. Egis a en effet pour sa part assuré les études de préfaisabilité technique et réalise actuellement les études de faisabilité sur les deux premières lignes. La société d’ingénierie se positionne également sur l’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) générale (également appelée Project Management & Construction Management, PMCM) de la phase 1.
En mai 2020, afin de sécuriser la participation des entreprises françaises dans le projet serbe, la France a octroyé un don exceptionnel issu du Fasep (Fonds d’étude et d’aide au secteur privé, géré par le Trésor)de 8,3 M EUR pour la réalisation d’études complémentaires confiées à Egis (l’étude conceptuelle d’une troisième ligne de métro, la faisabilité de la phase 1 du métro prenant en compte les orientations futures de développement du réseau de métro incluant trois lignes, ainsi que les études d’avant-projet de la phase 1). En 2012, un premier Fasep de 3,7 M EUR avait été octroyé pour les études de préfaisabilité.
L’offre française revient de loin
Il s’agit d’excellentes nouvelles pour les entreprises françaises car, en dépit de l’accord de partenariat signé entre la France et la Serbie en 2011, ce grand projet a bien failli leur passé sous le nez.
En effet, en avril 2019, profitant d’un refroidissement entre les deux pays, une offre chinoise « clé en main » avait surgi. Elle associait ChinaPower au géant chinois de la construction ferroviaire CRRC pour la réalisation des deux lignes de métro assortie d’une offre de financement global de 4 Md d’euros.
Il aura fallu attendre la visite d’Emmanuel Macron à Belgrade en juillet 2019 et celle du président serbe Aleksandar Vucic à Paris l’été dernier pour détendre les relations entre les deux pays et pour réaffirmer l’implication de la France comme partenaire stratégique. Bref, un bel exemple de diplomatie économique.
Sophie Creusillet