« Dévaluation du yuan, effondrement boursier, baisse des prix de l’immobilier, crainte d’un ralentissement économique excessif, doutes sur la fiabilité des données publiées… » : dans son dernier Panorama, diffusé, le 18 septembre, à l’occasion de la présentation de ses évaluations risques pays, Coface s’interroge sur l’impact du ralentissement chinois sur les économies des autres pays asiatiques.
Selon l’assureur crédit export, la croissance de la Chine « ne devrait pas dépasser 6,7 % en 2015 et 6,2 % en 2016, alors qu’elle était de 14,4 % sur la période 2006-2007 ». « Le ralentissement chinois n’est pas nouveau, mais la vitesse surprend », a commenté Marie Albert (notre photo), économiste, responsable Risque pays. Les raisons sont multiples : surcapacité dans certains secteurs et endettement des entreprises qui pénalisent l’investissement, dégradation de la compétitivité-prix par rapport à des voisins d’Asie et passage à une croissance soutenue par la consommation plus que par l’investissement. « Mais le rééquilibrage vers la consommation est plus lent que ce qu’on avait anticipé », confiait avant la réunion au Moci Julien Marcilly, économiste en chef. De fait, le revenu disponible et les ventes de détail ont tendance à diminuer.
Pékin favorise la transition vers une économie de consommation
La moindre compétitivité-prix et le passage à un modèle progressif de consommation se reflètent inévitablement sur le commerce extérieur. Alors que « le surplus courant est tombé de 20 % en 2007 à 2 % aujourd’hui, il ne retrouvera jamais les niveaux d’avant », a prévenu Marie Albert. S’agissant des importations, elles augmentent en volume comme en valeur, illustrant ainsi une économie en transition, autrefois uniquement orientée vers l’export, avec un appétit croissant pour le moyen de gamme. Du côté justement des exportations, leur structure évolue, le commerce d’assemblage d’équipements électroniques et mécaniques perdant de son importance.
Le frein chinois sur son économie rend les marchés financiers volatils. Et les premiers pays touchés dans la région sont Hong Kong, la Mongolie et Singapour qui cumulent les handicaps. Les deux plateformes financières et commerciales que sont Hong et Singapour souffrent de la proximité de leurs marchés d’actions avec la Chine et de la forte exposition de leurs banques à la dégradation de la solvabilité des entreprises chinoises (en juin, Coface a classé la Chine en risque pays A4 sur une échelle qui en compte 7, de A 1 pour la meilleure évaluation à D). Enfin, le poids de leurs exportations à risque vers ce géant asiatique est considérable pour Hong Kong (74 % du produit intérieur brut) et n’est pas négligeable pour Singapour (15 %).
Risque de contagion modéré en Thaïlande, Malaisie, Indonésie, Vietnam
Quatre pays ont moins de soucis à se faire, car si la Chine est importante pour leurs exportations, la Thaïlande, la Malaisie, l’Indonésie et le Vietnam ont développé un modèle solide, qui profite aujourd’hui de la moindre compétitivité prix de leur grand concurrent. A cet égard, pour s’en convaincre, il suffit de se reporter au chiffre des investissements directs étrangers (IDE) au Vietnam. Entre les périodes 2004-2007 et 2008-2013, les IDE ont progressé de 1.8 point de PIB dans ce pays. Originaires notamment de Corée et du Japon, ils correspondent à une montée en gamme, notamment dans l’électronique. Le Vietnam est, d’ailleurs, devenu un hub pour la construction de Smartphones.
Le Vietnam bénéficie, au demeurant, d’un niveau d’éducation et d’infrastructures de qualité. Si bien qu’aujourd’hui il résiste bien à la conjoncture moins favorable en Chine. Le risque pour lui serait un recul du commerce mondial, en particulier des produits de montée de gamme, et un rétablissement par la Chine de sa compétitivité, qui n’est pas si éloignée de celle du Vietnam.
En ce qui concerne la Malaisie, Coface vient d’assortir son évaluation A2, qui traduit un bon risque, d’une perspective négative toutefois, tenant ainsi compte du nouvel environnement économique et politique du pays : sa forte dépendance à la demande externe, l’envolée de la dette des ménages, ce qui explique que la consommation marque le pas, l’importance relative dans une économie émergente de la dette publique (environ 60 % par rapport au PIB), la perte de confiance des investisseurs. « La monnaie nationale, le ringgit, a perdu 20 % depuis août par rapport au dollar et s’y ajoute un scandale politico-financier impliquant le Premier ministre Najib Razak », constatait Marie Albert.
Quant à l’Inde et aux Philippines, les risques de contagion financière sont limités avec la Chine tout comme le commerce en général, et ils profitent de la baisse des prix des matières premières.
François Pargny