Alors que le monde entier est inondé de masques chirurgicaux fabriqués en Chine, une jeune pousse française a développé un masque premium anti-pollution conçu et fabriqué en France. Son nouveau modèle sera lancé en septembre en Asie, deux semaines avant sa commercialisation en Europe.
« A mon retour de Corée du Sud je me suis installé à Paris où j’ai développé des allergies, alors que je n’en avais jamais eu, en raison de la pollution de l’air : c’est ce qui m’a poussé à chercher un masque adapté». En vain : en 2014, aucun masque, médical ou professionnel, ne retient les particules fines responsables de ses problèmes de santé. Matthieu Lécuyer, cofondateur et directeur général d’R-Pur, décide alors d’en concevoir un avec Flavien Hello, aujourd’hui P-dg de l’entreprise.
Les deux hommes se sont rencontrés en Corée du sud où ils séjournaient dans le cadre d’un échange universitaire, Flavien étudiant l’informatique et Matthieu le management. Deux profils différents qui se complètent bien. Souffrant tous deux de problèmes respiratoires une fois rentrés à Paris, ils décident de concevoir et fabriquer le masque anti-pollution qu’ils ne trouvent pas sur le marché.
Un produit de haute technicité
Ecole des arts et métiers, médecins, Air Paris… Ils s’adjoignent l’expertise de professionnels pour mettre au moins leur prototype après 18 mois de recherche et développement. « Nous sommes devenus experts de notre propre problématique » sourit le dirigeant.
Résultat : en 2016 le premier modèle commercialisé filtre des particules de 40 nanomètres grâce à une technologie de nanofiltration 10 fois plus efficace que la norme européenne FFP3.
Les deux étudiants devenus chefs d’entreprise font breveter leur invention, y compris au niveau international pour protéger leur technologie. Pour la production les comparses commencent par l’externaliser. En 2020, désirant gagner en indépendance, ils réunissent leur laboratoire et leur unité de production à Longjumeau, en banlieue parisienne.
C’est que les filtres sont fabriqués tandis que la partie textile continue d’être externalisée auprès de prestataires français. « En France, nous ne serons jamais assez compétitifs pour produire des masques médicaux, mais nous savons faire des choses très pointues avec une industrie forte », estime Matthieu Lécuyer.
Ainsi les masques R-Pur sont équipés d’un QR code permettant de les identifier et reliés à une application indiquant le degré d’usure du filtre.
Cap sur l’Asie
Bien sûr, ces masques prisés des cyclistes et les motards, ont été pris d’assaut pendant la pandémie, épuisant le stock en quelques jours. En juin, 10 000 pièces sont à nouveau mises en vente sur le site d’R-Pur et sont écoulées en 20 minutes. Les demandes affluent du monde entier, notamment des Etats-Unis, un marché à première vue prometteur mais sur lequel les deux dirigeants ne s’attardent pas : « C’est un gros investissement et les Américains sont moins sensibilisés à la pollution de l’air ».
A cet égard, le Covid-19 a mis un coup de projecteur sur ce sujet récent qu’est la pollution aux particules fines.
Au second semestre 2021, la startup envisage de lever 10 millions d’euros pour financer son internationalisation. Celle-ci a déjà débuté puisqu’un bureau a été ouvert à Hong Kong avant le début de la pandémie dans le but de conquérir les marchés asiatiques. Matthieu Lécuyer préfère se montrer discret sur des destinations précises. Outre la Chine, tout juste évoque-t-il du bout des lèvres Taïwan et la Corée du Sud.
C’est en Asie (et en ligne, Covid oblige), que sera lancé le 15 septembre le nouveau modèle de masque destiné aux piétons, plus léger que les modèles précédents. Soit deux semaines avant sa présentation eu Europe.
Sur ce segment premium, la startup bénéficie d’un atout de choix : elle n’a pas de concurrent. « Nous sommes les seuls au monde à proposer un produit aussi efficace », martèle Matthieu Lecuyer. Ce qui justifie son prix (de 99 à 149 euros en fonction du modèle et jusqu’à 299 euros pour une édition limitée).
Au terme d’une année 2020 qui a vu sa capacité de production multipliée par quatre et son chiffre d’affaires par 5,5 (à 7 millions d’euros) le dirigeant se montre confiant : « Le Covid-19 est arrivé au bon moment en ce sens qu’il a sensibilisé l’opinion publique sur la pollution aux particules fines ».
Sophie Creusillet