Les nuages semblent s’accumuler sur les économies des pays émergents. La Banque mondiale a ainsi revu à la baisse ses perspectives de croissance pour 2022, à 4,1% contre 4,3 % auparavant, dans un contexte marqué par une situation sanitaire incertaine et une accentuation du déséquilibre entre économies avancées et émergentes. Des prévisions qui confirment les tendances mises en exergue par d’autres analystes*.
Après un fort rebond en 2021, dont l’institution a néanmoins revu à la baisse ses perspectives de croissance de 5,7 % à 5,5 %, la croissance mondiale devrait s’établir à 4,1 % en 2022 et 3,2 % en 2023, sous l’effet de l’essoufflement du rattrapage de la demande et du retrait des mesures de soutien budgétaire et monétaire à travers le monde.
Alors que la propagation rapide du variant Omicron laisse présager que la pandémie va continuer à perturber l’économie mondiale à court terme, la décélération enregistrée dans les grandes économies, en particulier la Chine et les Etats-Unis va peser sur la demande extérieure des pays émergents et en développement.
L’écart se creuse entre pays avancés et émergents ou en développement
De plus, les gouvernements de ces pays ne disposent pas d’une marge de manœuvre suffisante pour soutenir l’activité si nécessaire alors qu’ils doivent faire face à la flambée du variant Omicron, aux perturbations persistances de chaînes d’approvisionnement, aux pressions inflationnistes et à de fortes vulnérabilités financières. La banque mondiale redoute « un atterrissage brutal » de l’économie dans les pays émergents, accompagnée d’une divergence progressive des taux de croissance.
Les économies avancées devraient voir leur taux de croissance fléchir de 5 % en 2021 à 3,8 % en 2022 et 2,3 % en 2023. Selon les analystes de la Banque mondiale, cette progression du PIB sera suffisante pour rétablir les niveaux de production et d’investissement observés avant la pandémie.
Dans les économies émergentes et en développement, en revanche, la croissance devrait reculer de 6,3 % en 2021 à 4,6 % en 2022 et 4,4 % en 2023. D’ici à 2023, les économies avancées auront totalement retrouvé leur niveau de production pré-Covid, tandis que la performance des économies émergentes et en développement restera inférieure de 4 % à leur tendance pré-Covid.
Les perspectives régionales de la Banque mondiale
-Asie de l’Est et Pacifique : la croissance devrait ralentir à 5,1 % en 2022 avant de remonter faiblement à 5,2 % en 2023.
-Europe et Asie centrale : la croissance devrait ralentir à 3 % en 2022 et 2,9 % en 2023.
-Amérique latine et Caraïbes : la croissance devrait marquer le pas à 2,6 % en 2022 avant de remonter légèrement à 2,7 % en 2023.
-Moyen-Orient et Afrique du Nord : la croissance devrait s’accélérer à 4,4 % en 2022 avant de ralentir à 3,4 % en 2023.
-Asie du Sud : la croissance devrait s’accélérer à 7,6 % en 2022, puis retomber à 6 % en 2023.
-Afrique subsaharienne : la croissance devrait s’accélérer légèrement pour ressortir à 3,6 % en 2022 et 3,8 % en 2023.
La montée de l’inflation hypothèque les politiques de relance
Pour de nombreuses économies vulnérables, le recul est encore plus important : la production des économies fragiles et touchées par un conflit et celle des petits États insulaires seront inférieures de respectivement 7,5 % et 8,5 % à leur tendance pré-pandémique.
De plus, la montée de l’inflation qui atteint des niveaux historiques partout dans le monde, frappe particulièrement les travailleurs à faible revenu. Pour la contenir, les pays en développement procèdent au retrait de leurs mesures de soutien à la relance alors que la reprise est loin d’être acquise en raison de l’accroissement de leur dette, des fluctuations des prix des matières premières dont ces pays sont exportateurs et d’un approfondissement des disparités de revenus.
Bref, même si prédire l’avenir de l’économie mondiale est aujourd’hui un exercice d’équilibriste, le clivage du monde entre pays avancés et pays émergents ou en développement est quant à lui certain.
SC
*Pour prolonger, lire : Prévisions 2022 : les supply chains et les prix seront tendus jusqu’au deuxième semestre (EH)