L’humeur des milieux d’affaires français à l’étranger est, sans surprise, pessimiste, mais ils prévoient un retour à la normale à partir de fin 2021 : telle est la tendance principale qui ressort de la première édition du Baromètre international des affaires* créé par le Comité national des conseiller du commerce extérieur de la France (CNCCEF) et CCI France international (CCIFI), l’association regroupant les Chambre de commerce et d’industrie françaises à l’étranger.
Mené dans 120 pays entre le 8 septembre et le 8 octobre 2020 par les deux réseaux, cette enquête d’opinion a permis d’interroger plus de 2000 dirigeants sur la situation et les perspectives de leurs entreprises dans le contexte de la crise mondiale liée à la Covid-19. Trois catégories d’entreprises ont répondu : des entreprises locales ayant des courants d’affaires avec la France, des filiales françaises et des entreprises françaises de l’étranger (EFE).
« Ce n’est pas catastrophique »
Selon les résultats publiés le 9 décembre, si 55 % des interrogés anticipent une contraction de leur chiffre d’affaires et une baisse de 10 à 20 % de leur résultats, 45 % prévoient un maintien ou une augmentation de leur chiffre d’affaires. La perception du climat des affaires dans leur zone géographique est défavorable pour 57 % d’entre eux, mais cette proportion tombe à environ 54 % pour leur pays d’implantation.
Toutefois, 60 % ont une perception assez défavorable de l’avenir et une forte proportion – 43 %– ne voient un retour à la normale qu’entre le second semestre (S2) 2021 et le premier semestre (S1) 2022.
« Ce n’est pas la joie, mais ce n’est pas catastrophique non plus » nuance Alain Bentéjac, le président du CNCCEF, à l’origine de cette initiative avec Renaud Bentégeat, président de CCIFI. « Cela dépend beaucoup des géographies, mais il n’y a pas une très grande différence de tendances entre les zones développées que sont l’Europe, l’Amérique du nord et l’Asie alors que l’on aurait pu attendre plus d’optimisme en Asie, zone qui est repartie plus tôt. Les plus pessimistes sont en Afrique et au Moyen-Orient, où la situation est plus dégradée » remarque-t-il.
Plus de pessimisme en Afrique et au Moyen-Orient
Les mesures de soutien et de relance mis en œuvre par les gouvernements expliquent en partie ce relatif optimisme dans les pays occidentaux et en Asie, avec la mise en œuvre de mécanisme de prêts et garanties et/ou de chômage partiel qui ont limité les dégâts. Alors qu’au Moyen-Orient ou en Afrique, les mesures de soutien ont été moins massives ou inexistantes.
Ainsi, plus de 60 % des 400 sondés en Afrique ont une perception défavorable du climat des affaires sur le continent, actuellement et pour l’avenir, et 58,8 % prévoient une baisse de leur C.A. Quelque 40 % prévoient de suspendre leurs investissements, voire de se retirer de leur pays d’implantation. Toujours en Afrique, 37 % envisage une reprise à partir S2 2021 (contre 20 % au premier semestre) et 20 % ne parviennent pas à se projeter.
Au Moyen-Orient, la perception du climat des affaires dans cette zone est défavorable à assez défavorable pour plus de 64 % de la centaine de sondés, et ils sont 67,3 % à prévoir une baisse de leur C.A. Un tiers envisage un arrêt de leurs investissements. Pour l’avenir, un quart des sondés ne se projettent pas mais 37 % anticipent une reprise à partir du S2 2021.
Moins de pessimisme dans les autres zones
Ailleurs, les tendances sont sensiblement moins pessimistes. A commencer par l’Europe. Quelques exemples.
En Europe, la perception du climat des affaires est favorable à défavorable pour près de 57 % des 640 entreprises sondées mais 40 % voient une reprise entre le S2 2021 et le S1 2022. Ils sont 53,6 % à prévoir une baisse de leur C.A. Mais près de 60 % des sondés maintiennent leurs investissements et 20 % comptent les augmenter.
En Amérique latine et Caraïbes, 54,7 % des 200 répondants prévoient une baisse de leur C.A. et 67 % estiment le climat des affaires dans cette zone défavorable. Mais 62 % maintiendront ou augmenteront leurs investissements. Ils sont 48 % à considérer que la reprise interviendra dès le S2 2021.
En Amérique du nord, les 240 sondés (avec une forte proportion de services) ne sont que 27,9 % à anticiper une baisse de leur C.A dans les prochains mois (et 50 % le maintenir ou l’augmenter) et une large majorité (78 %) maintiendra, voir augmentera ses investissements. La perception du climat des affaires n’est défavorable que pour 48 % environ des répondants, et 30 % anticipent un retour à la normale fin 2021.
En Asie-Océanie, si 54,7 % des 500 sondés prévoient une baisse de leur C.A. dans les prochains mois, 44 % envisagent une reprise entre le S2 2021 et le S1 2022. La perception de climat des affaires est défavorable pour plus de 55 % des sondés mais plus des trois quarts (75,8 %) maintiendront ou augmenteront leurs investissements.
Globalement, selon le baromètre, les filiales françaises, qui constituent 35 % de l’échantillon, tirent leur épingle du jeu alors que les entreprises françaises de l’étranger (17,5 % de l’échantillon), qui ont moins bénéficié de la manne des aides des gouvernements, notamment dans les pays émergents, sont « plus vulnérables ».
Ce baromètre, qui vise, selon Alain Bentéjac, à faire remonter le « ressenti des entrepreneurs un peu partout dans le monde » dans ce contexte de crise inédit, est une première. Convaincu que le nombre de participants pourra être encore augmenté à l’avenir pour gagner en représentativité, le président du CNCCEF assure qu’il sera renouvelé « deux à trois fois par an ».
Christine Gilguy
*Pour accéder aux résultats détaillés, cliquez ICI