Sous le titre « Au-delà des frontières : les PME et l’export », le premier baromètre de Bpifrance Le Lab consacré exclusivement à l’export met en exergue les meilleures performances et perspectives des PME exportatrices par rapport à celles qui n’exportent pas. Publié le 16 février, il révèle également des caractéristiques intéressantes de leurs profils et de leurs stratégies.
« Les entreprises qui font de l’export sont des champions » a déclaré Olivier Vincent, directeur exécutif export de Bpifrance, introduisant la présentation des principaux résultats du tout premier baromètre de Bpifrance Le Lab consacré aux PME et l’export, devant un parterre de dirigeants d’entreprises et de professionnels de l’accompagnement export conviés à une matinée d’échanges sur le thème « Booster l’export » (ci-contre).
Réalisée à la demande d’Olivier Vincent, qui a pris ses fonctions en mars dernier, cette étude a été menée dans le cadre de la 78ème enquête semestrielle de conjoncture de Bpifrance Le Lab, à partir des réponses d’un peu moins de 5000 PME (sur 40 000 sondées). Elle comble un manque : alors que Bpifrance suit depuis des décennies comme du lait sur le feu le moral et les perspectives des PME à travers ces études, elle n’avait pas encore introduit de questions détaillées sur leur vision et perspectives à l’export. C’est chose faite, et cela tombe à point nommé alors que le gouvernement vient de lancer un nouveau plan export ayant comme objectif d’augmenter le nombre d’exportateur à 200 000 d’ici 2030, contre 146 000 en 2023.
Moins d’un tiers exportent…
Premier enseignement à retenir de ce baromètre : les PME qui exportent ou veulent exporter sont loin d’être majoritaires, à l’image du tissu économique français.
Ainsi moins d’un tiers, 27 % exactement, des PME interrogées ont exporté ces cinq dernières années, dont seulement 15 % régulièrement et 12 % de façon occasionnelle. Les non-exportatrices sont donc 73 %, et parmi elles, 66 % s’estiment « non concernées » par l’export, 4 % n’y voit aucun intérêt pour leur activité et 4 % n’y sont pas parvenues ou ne se sont pas encore lancées.
A noter également que les PME industrielles et celles de plus de 10 salariées sont davantage tournées vers l’international : elles sont respectivement 54 % et 34 % a avoir exporté au cours des cinq dernières années.
Ces résultats sont cohérents avec les caractéristiques de l’export français : les 1000 premières entreprises (moins de 1 %) concentrent 71 % des montants exportés en valeurs, alors que 93 % réalisent 5 % (source douanière, 2022). Et l’industrie pèsent 74 % du total des exportations de biens et services.
Celles qui exportent font mieux que les autres
Une fois ce tableau dressé, plus intéressant encore est la comparaison entre les réalisations des PME exportatrices et non-exportatrices et leurs perspectives pour 2024. Sans contexte, les premières sont plus allantes et performantes que les autres.
C’est le cas en matière de chiffre d’affaires. Les 15 % de PME exportatrices régulières ont enregistré une croissance de 1,6 % de leur CA en 2023, contre 0,3 % pour toute les autres (et -0,1 % pour les non-exportatrices). La performance est encore meilleures pour les exportatrices qui ont innové : + 2,6 %.
De même, les PME exportatrices investissent davantage : plus de la moitié des PME exportatrices ont investi en 2023 (41 % pour les non-exportatrices), et 35 % ont réalisé des investissements « verts » (28 % pour les non-concernées par l’export et 32 % pour les exportateurs potentiels). Elles sont aussi plus innovantes : 41 % des exportatrices contre 14 % pour les non-exportatrices.
Quant aux perspectives d’activité pour 2024, elles sont meilleures pour les exportatrices régulières : leurs carnets de commandes sont moins tassés que ceux des autres catégories, et ils sont également mieux orientés concernant l’activité et l’emploi.
23 % veulent exporter en 2024
C’est la bonne nouvelle de ce baromètre, même si l’on peut être déçu de la faiblesse de la proportion : sur l’échantillon, 23 % déclarent leur intention d’exporter en 2024, dont la quasi-totalité des PME exportatrices régulières, les deux tiers des occasionnelles, et un petit pourcentage de PME n’ayant aucune expérience de l’export (1%).
Où envisagent-elles d’exporter ? Sans surprise, l’UE remporte une majorité de suffrage avec 88 % de répondants, dont 41 % exclusivement.
Reste les 59 % qui compte exporter hors-UE. Les principales destinations citées sont l’Amérique du Nord et la zone Moyen-Orient/Afrique du Nord (ex-aequo avec 26 %), suivie par l’Europe hors-UE (21 %), l’Asie (20 %), l’Afrique sub-saharienne (12 %) et l’Amérique latine (11 %).
Principaux freins : les coûts de prospection en tête chez les exportateurs
Concernant les principaux freins à l’export, logiquement, ils ne sont pas les mêmes selon qu’on interroge les PME déjà exportatrices et celles qui ne le sont pas.
Pour les premières, expérimentée à l’export, le top 3 des freins cités sont les coûts de prospection élevés (27 %), la complexité administrative (26 %) et les risques de délais paiement (24 %). Les incertitudes et la volatilité des situations des pays visés ne recueillent que 19 %. On retrouve ces mêmes obstacles dans le top 4 des exportateurs occasionnels.
Pour les PME non-exportatrices, le tableau est très différent : l’insuffisance de la taille est citée par 49 % des répondants, largement en tête, le manque de compétence et la complexité administrative arrivant ex-aequo à 19 % de citation.
Enfin, pour les PME qui ont l’intention d’exporter, les freins sont différents selon les destinations visées : la complexité administrative arrive en tête avec 30 à 32 % de citations pour les zones hors UE (Europe, Moyen-Orient/Afrique du Nord, Asie). En revanche, ce sont les coûts de prospection élevés qui constituent le premier obstacle pour l’Amérique du Nord (31 %) tandis que le risque d’impayé est en tête pour l’Afrique sub-saharienne (42 %) et l’incertitude économique et politique pour l’Amérique latine (32 %).
Quant aux atouts compétitifs perçus par les dirigeants de PME, ils reposent d’abord sur les compétences propres de leur entreprise : qualité des produits et services, service client et notoriété. Sans surprise, les principaux désavantages cités sont les coûts du travail et la fiscalité, ainsi que les prix de vente et les coûts énergétiques.
Que conclure de ces résultats ?
Ils valident sans aucun doute le fait que l’export est un relais de croissance et de consolidation incontestable pour les entreprises, mais qui nécessite de la préparation, des ressources financières, de l’accompagnement et une volonté des dirigeants. Il faut s’inscrire dans « du temps long » comme l’a si bien dit Laurent Guiguen, directeur export du Petit Forestier, lors d’une table ronde ayant suivi la présentation des résultats.
Le directeur exécutif export de Bpifrance, pour sa part, s’est dit conforté par ces résultats dans la stratégie qu’il compte déployer auprès des PME et ETI pour les booster à l’export, avec trois piliers : « l’assurance », le « crédit » et le « développement ».
Christine Gilguy
Pour consulter l’intégralité de l’étude : cliquez ICI.