C’est le moins que l’on puisse dire : ils sont agacés, souvent
sceptiques et demandent à voir. Qu’ils parlent au nom des industries
exportatrices ou des consultants spécialisés dans l’accompagnement des
entreprises, les professionnels livrent à la Lettre confidentielle du
Moci leurs premières analyses critiques du plan de redressement du
commerce extérieur présenté la semaine dernière par Nicole Bricq,
ministre du Commerce extérieur.
Plan
Bricq- Réaction 1
Le GFI doute de
la « culture d’exportation » des régions
Dans une interview
exclusive à la Lettre
confidentielle du Moci, Vincent
Moulin Wright, directeur général du GFI (Groupe des fédérations industrielles), que préside Pierre Gattaz,
doute de la capacité des Régions en matière de « culture de l’exportation ». Il
regrette la mise au placard du Commissariat général à l’internationalisation
des PME et ETI et s’interroge sur l’utilité de la création d’une BPI.
Le
Moci. Quelle est votre appréciation de la réforme initiée par la ministre du
Commerce extérieur Nicole Bricq visant à ramener la balance
du commerce extérieur hors énergie à l’équilibre d’ici cinq ans ?
Vincent Moulin Wright : Les objectifs fixés par le
Premier ministre à Nicole Bricq sont ambitieux. Nous constatons au GFI que le
dispositif actuel d’accompagnement à l’export des entreprises reste complexe et
très administratif même si des progrès de rationalisation importants ont été
faits ces dernières années. La création de « l’Equipe de France de
l’export » a apporté une meilleure coordination dans ce dispositif :
il est dommage que cela disparaisse. Pour le GFI, ce qu’il manque le plus à ce
dispositif, ce sont des ressources qualifiées en matière de savoir-faire
d’exportation et d’internationalisation, des agents expérimentés susceptibles
de donner des conseils de terrain aux entreprises et de les accompagner sur le
long terme. Nous souhaitons que ce dispositif d’accompagnement monte encore en
gamme et cible davantage ses actions.
« Nous regrettons que l’action initiée par le Commissariat
général à l’internationalisation des PME et ETI soit suspendue »
Le Moci. Que pensez-vous du rôle
central accordé aux Régions dans ce dispositif d’aide ?
Vincent Moulin Wright : Si on ne peut nier le rôle de
proximité que les régions apportent, il s’agit pour beaucoup d’une décision
politique ; mais y a-t-il eu une étude d’impact sur le sujet ? Cette
énième réforme va bouger les structures et la gouvernance, mais est-on sûr
d’accroître ainsi la culture de l’exportation ?
Nous
regrettons que l’action initiée par le Commissariat général à
l’internationalisation des PME et ETI soit suspendue. Nous avons sollicité à ce
sujet Nicole Bricq car le GFI avait travaillé de concert avec ce commissariat
pour mobiliser un Réseau d’experts chevronnés capables d’accompagner sur le
long terme des PME et ETI innovantes en régions. Une première région pilote
avait été ciblée (la Picardie)
avec les encouragements de la CCI
et des instances de la
Région. Nous souhaitons appliquer le même modèle que ce qui a
été réalisé par la
Fédération des industries mécaniques (FIM) avec le réseau
Acamas, qui assure un accompagnement stratégique pour de nombreuses PME du
secteur avec l’aide des régions, et qui fonctionne très bien. Nous sommes bien
sûr prêts à rediscuter de notre projet avec la ministre pour le faire évoluer.
Le Moci. Que pensez-vous de la
future Banque publique d’investissement (BPI) ?
Vincent Moulin Wright. Nous sommes encore
interrogatifs. La BPI
ne sera pas LA solution à tous les problèmes de financement de l’entreprise. La BPI veut d’abord, et c’est
légitime, agir sur le moyen-terme en confortant les fonds propres des
entreprises et le financement de l’innovation : que fera-t-elle de plus ou
de mieux que les structures actuelles qui fonctionnent bien comme le FSI (Fonds
stratégique d’investissement) ou Oséo ? Et puisqu’il s’agit d’argent
public, qui est rare en ce moment, il convient d’en faire usage avec
discernement.
La BPI veut aussi agir sur le
financement export et c’est salutaire pour les entreprises qui ne trouvent plus
assez de financement sur ce volet suite aux nouvelles normes de Bâle III. Mais,
la BPI ne va pas
régler la question du crédit à court terme qui est bien plus essentielle pour
les entreprises car il s’agit du court-terme : celles-ci ont besoin de
trésorerie et la BPI
ne résout pas cette question.
« Nous souhaitons reprendre un projet de réseau
d’accompagnement à l’export des entreprises associant les organisations
professionnelles, l’Etat, les régions et les CCI »
Le Moci. Quelles sont vos
priorités pour l’aide à l’export ?
Vincent Moulin Wright : Nous souhaitons reposer la
question de l’internationalisation des PME et des ETI et reprendre un projet de
réseau d’accompagnement à l’export des entreprises associant les organisations
professionnelles, l’Etat, les régions et les CCI. L’idée reste bonne,
sélectionner 10 à 15 000 PME et ETI innovantes pour les accompagner sur le long
terme à l’export.
Mais
pour l’industrie qui représente près de 85% de nos exportations, avoir de
bonnes performances à l’export est le résultat d’une vraie politique
industrielle. Et en la matière, les priorités du GFI concernent l’amélioration
de la compétitivité de l’entreprise avec notamment l’abaissement du coût du
travail, une plus grande flexi-sécurité du marché de l’emploi, la préservation
de notre avantage prix sur l’énergie, plus de réciprocités dans le commerce
extérieur des marchés publics et une fiscalité moins lourde pour nos
entreprises. Sur ce dernier point, les entreprises industrielles sont très
inquiètes car le budget 2013 prévoit d’alourdir encore les prélèvements
obligatoires pour les entrepreneurs sans construire symétriquement
l’indispensable réduction massive du coût de notre sphère publique.
Propos recueillis par Isabelle
Verdier
ÉGALEMENT PUBLIÉ DANS LA LETTRE CONFIDENTIELLE DU 20/09/2012 (EXTRAITS) :
Les OSCI sceptiques sur la solution d’accompagnement « longue durée » mise sur la table.
Gilles Rémy, le représentant des « privés » de l’accompagnement des entreprises à l’international, déplore dans la Lettre confidentielle du Moci que les professionnels qu’il représente n’aient pas été encore consultés et craint que l’accompagnement longue durée conçu par l’Etat ne se transforme en « accompagnement à perpétuité».
Philippe Guibert (FIEEC) désespéré d’attendre des simplifications qui ne coûtent rien…
Il confie à la LC les différentes mesures de simplification qui ne coûteraient pas grand-chose à l’Etat mais faciliteraient grandement la vie des entreprises exportatrices.
, abonnez-vous à la lettre confidentielle du Moci
ABONNEZ-VOUS À LA LETTRE CONFIDENTIELLE POUR EN RECEVOIR CHAQUE SEMAINE L’INTÉGRALITÉ