Négocié depuis des mois, le texte de recommandations du Parlement européen (PE) sur le projet de Partenariat transatlantique (TTIP/Transatlantic Trade and Investment Partnership) a été adopté le 28 mai par les membres de la Commission du commerce international (INTA). « Ce vote a injecté une dose de caféine dans ces négociations », s’est félicitée Emma McClarkin, porte-parole du groupe des Conservateurs et Réformistes. En adoptant cette résolution, les eurodéputés ont en quelque sorte donné leur feu vert au TTIP, dernière étape avant le vote en plénière prévu à Strasbourg le 10 juin prochain. Si le texte n’a pas de valeur contraignante, un rejet aurait néanmoins compliqué les pourparlers, rendant leur issue plus improbable encore, car le PE dispose d’un droit de veto sur l’accord final.
Anticipant les critiques des « anti TTIP », les principaux groupes politiques du PE ont souligné que leur soutien au futur traité de libre-échange ne se ferait pas à n’importe quel prix. « Il y a des intérêts offensifs et défensifs qui devront être correctement équilibrés », a souligné Godelieve Quisthoudt-Rowohl, rapporteur fictif pour le PPE. « Nous les avons indiqués dans le texte sans créer de nouvelles lignes rouges », susceptibles, selon elle, d’affaiblir la position de l’Union européenne (UE) dans ces négociations.
Autre son de cloche du côté des Socialistes et Démocrates (S&D). Pour Bernd Lange, rapporteur et Président de la Commission INTA, les députés ont justement gravé dans le marbre des « exigences claires et des lignes rouges » tels que le respect des normes sociales et environnementales ou l’exclusion des services publics. Le texte renforce aussi les intérêts offensifs de l’UE sur les marchés publics américains, un volet prioritaire pour la majeure partie des familles politiques du PE. « Il est temps maintenant que les Etats-Unis fassent des propositions pour faire évoluer une situation injuste et protectionniste pour les entreprises européennes », a indiqué Marietje Schaake, rapporteur fictif pour le groupe des Libéraux et Démocrates (ALDE).
Les Verts dénoncent le compromis sur l’ISDS
Concernant le très controversé mécanisme d’arbitrage investisseur/Etat (ISDS/Investor State Dispute Settlement), les partis à droite de l’échiquier politique ont assuré qu’ils en accepteraient le principe si le système était d’abord réformé comme promis par la Commission européenne. Objectif à moyen terme : créer une cour permanente internationale pour régler ces différends. D’ici là, le système devra respecter « le droit des Etats à réguler, fonctionner de manière transparente, empêcher tout recours abusif ou encore intégrer un mécanisme d’appel », avait indiqué, lors d’un débat au PE en avril, Cecilia Malmström, la Commissaire en charge du Commerce.
Des propositions qui n’ont pas convaincu le groupe des Verts qui dénonce le compromis adopté en commission INTA. « Pour que le rapport Lange passe l’étape de la Commission du commerce international et atteigne la plénière, il aura fallu le reniement du groupe socialiste sur ce qu’il considérait jusqu’à maintenant inacceptable entre deux continents démocratiques munis de systèmes juridiques indépendants et performants: les fameux tribunaux privés arbitraux -ou ISDS », a dénoncé Yannick Jadot (Vert, France), vice-Président d’INTA. Il rappelle les avis adoptés par plusieurs comités du PE, consultés sur le dossier. Les commissions Emploi, Environnement, Affaires juridiques, Affaires constitutionnelles et Pétitions avaient en effet rejeté l’inclusion de la clause ISDS, estimant que les juridictions nationales étaient largement habilitées à trancher en cas de différends entre investisseurs et Etats.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles