L’énergéticien français, qui candidate à l’appel d’offre pour la construction d’une nouvelle centrale nucléaire dans le sud de la République tchèque, a annoncé le 29 juin l’ouverture à Prague de sa succursale EDF Nuclear Czechia. Objectif : accélérer la coopération avec les industriels tchèques et consolider son offre face à la concurrence sud-coréenne et américaine.
A deux jours du passage de relais entre la France et la République tchèque pour la présidence de l’Union européenne, cette annonce, officialisée en présence du ministre délégué en charge du Commerce extérieur Franck Riester, tombe à point nommé. Alors que les Européens cherchent des alternatives aux hydrocarbures russes, elle vient également souligner l’excellence de la filière française.
Le gouvernement tchèque, qui entend faire passer la part du nucléaire dans la production d’électricité du pays d’un tiers à plus de la moitié à l’horizon 2040, a lancé en mars dernier un appel d’offre international pour la construction d’un réacteur à Dukovany. Invoquant des questions de sécurité, il a exclu les fournisseurs russes et chinois, mais, outre EDF, le sud-coréen KHNP et l’américain Westinghouse ont manifesté leur intérêt. Le constructeur doit sélectionner son fournisseur d’ici à la fin de l’année, pour un début de construction en 2029 et une connexion au réseau en 2036.
EDF tisse son réseau de fournisseurs en Europe centrale…
En attendant, EDF, chef de fil de la filière nucléaire française à l’export pour les marchés des nouvelles centrales, tisse sa toile et peaufine son offre d’un réacteur de technologie EPR1200. Le même jour que l’annonce de la création de EDF Nuclear Czechia, l’entreprise a rassemblé les partenaires français et tchèques de premier rang à la Chambre de commerce tchèque à Prague pour la signature d’une charte de valeurs. Intègreront la chaîne de valeur : BAEST Machines & Structures, Bouygues Travaux Publics, Framatome, GE Steam Power, Hutní Montáže, I&C Energo, Metrostav DIZ, Reko Praha, Sigma Group, et Škoda JS.
Par ailleurs, EDF, Bouygues Travaux Publics et Metrostav DIZ ont renforcé leur collaboration avec la signature d’un accord de coopération tripartite, axé sur le génie civil. Il permettra de sécuriser une part locale significative sur les activités de construction.
L’annonce de l’arrivée de l’énergéticien français en République tchèque, dont 40 % de l’électricité sont produits dans des centrales brûlant de la lignite (un charbon de basse qualité), intervient moins d’un an après celle de l’ouverture d’un bureau en Pologne, où EDF ambitionne de décrocher un contrat pour quatre à six réacteurs EPR. Le 22 juin dernier, EDF a signé cinq nouveaux accords de coopération avec des entreprises polonaises (Polimex Mostostal, Sefako, Tele-fonika Kable, Uniserv et ZRE Katowice), en sus de ceux signés en décembre 2021 avec Zarmen, Rafako, Dominion, Egis Polska et EPG.
… et pousse ses pions partout dans le monde
A ce jour, les deux seuls EPR mis en service sont ceux de la centrale nucléaire chinoise de Taishan (1 750 MW chacun) qui fournissent l’équivalent de la consommation annuelle de 5 millions de Chinois. Ceux d’Olkiluoto en Finlande, d’Hinkley Point au Royaume-Uni et de Flamanville en France sont toujours en construction.
Mais malgré les retards accusés par ces projets, l’intérêt pour les réacteurs de cette technologie ne faiblit pas. A des niveaux d’avancement variés, des projets existent également aux Pays-Bas, en Slovénie, au Canada, au Brésil, en Afrique du Sud, en Arabie saoudite, au Kazakhstan, en Indonésie et en Inde.
Signe du volontarisme de l’énergéticien tricolore dans la filière nucléaire, il a annoncé en février dernier le rachat à l’américain General Electric des turbines Arabelle, qui équipent notamment les EPR, comprenant non seulement l’ingénierie et la production de ces équipements, mais aussi les services de maintenance. Ironie de l’histoire, cette activité était héritée du rachat par General Electric du pôle Energie d’Alstom en 2015…
Sophie Creusillet