Invité à donner sa vision du commerce mondial en 2025 et des grandes négociations de libre-échange en ouverture du deuxième symposium mondial des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF), le 7 mai à Miami, Pascal Lamy, ancien directeur général de l’OMC et tout nouveau délégué interministériel pour le projet de candidature de la France à l’Exposition universelle de 2025, a donné le « la » en critiquant l’approche adoptée de part et d’autre de l’Atlantique pour les négociation du projet de Partenariat transatlantique, le TTIP (Transatlantic trade and investment partnership), aujourd’hui aux prises avec des fortes résistances des opinions publiques.
Pour cet infatigable pourfendeur du pessimisme français et défenseur d’un libre-échange raisonné et intelligent, les négociateurs américains et européens n’ont pas compris de quelle manière le monde était en train de changer. En matière de commerce, on vit une transition d’un monde ancien, où les enjeux étaient dominés par « la protection des producteurs » à l’intérieur de frontières nationales, vers un monde où les nouveaux enjeux sont de « précaution » pour protéger les consommateurs, et se situent dans les normes et règles de qualité.
Pour Pascal Lamy, c’est pour ne pas avoir compris ce changement et adapté le discours -le « narratif » comme il dit- qui va avec que les négociateurs américains et européens « s’y sont très mal pris » dans la manière dont ils ont engagé les négociations pour le projet TTIP. Car ils ont utilisé les arguments « de l’ancien monde » pour vendre le projet à l’opinion publique, avec les études habituelles sur les retombées en terme de croissance et d’emplois, sans prendre la mesure des peurs qu’elles pouvaient susciter de part et d’autres de l’Atlantique. Et de citer les caricatures brandies comme « le risque de voir arriver du fromage pourri » chez les Américains ou du « poulet chloré » chez les Européens. Or, pour l’ancien directeur général de l’OMC, l’enjeu est ailleurs : « ce sera bon pour tout le monde à partir du moment où la convergence des normes et des règles sera faite par le haut et non pas par le bas ».
Christine Gilguy
Envoyée spéciale à Miami