Les passeports délivrés par la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne figurent toute en haut du dernier indice Henley, qui classe les passeports en fonction du nombre de pays où leurs détenteurs peuvent se rendre sans visa.
194 : c’est le nombre de pays, sur un total de 227, dans lequel vous pouvez vous rendre sans avoir à demander de visa si vous possédez un passeport français, allemand, italien ou espagnol. Occupent également la première place leurs équivalents singapouriens et japonais, qui caracolent habituellement seuls en tête de ce classement réalisé par le cabinet anglais de conseil en résidence et en citoyenneté Henley & Partners, à partir des données de l’Association internationale du transport aérien (IATA).
A la deuxième place, avec 193 destinations, la Corée du Sud s’associe à la Finlande et à la Suède. Tandis que quatre autres pays de l’UE – l’Autriche, le Danemark, l’Irlande et les Pays-Bas – se partagent la troisième place en offrant l’accès à 192 pays. Le reste du Top 10 est largement dominé par les pays européens, le Royaume-Uni grimpant deux rangs à la quatrième place avec un accès sans visa à 191 destinations, contre 188 il y a un an.
Forte progression des pays en développement
Les détenteurs de passeports australiens et néo-zélandais améliorent leur classement pour occuper la sixième place (189 destinations), tandis que les États-Unis conservent leur septième place (188). Enfin, la dernière place du classement est tenue par l’Afghanistan dont le passeport ne donne accès qu’à 28 pays sans demander de visa à l’avance. Alors que le Royaume-Uni et les États-Unis occupaient conjointement la plus haute marche du podium de l’indice 2014.
Au cours des dix dernières années, ce sont les Émirats arabes unis qui ont enregistré la plus forte progression avec un gain de 106 destinations et un triple-saut de 44 places de la 55e position à la 11e position. L’Ukraine (32e) et la Chine (non classée avec seulement 85 pays) ont quant à elle gagné 21 places sur la même période.
Ouverture et enrichissement vont de pair
En combinant les données de son indice et celles de la Banque mondiale sur les PIB mondiaux, Henley a créé un indicateur du pourcentage du PIB mondial que chaque passeport procure à ses détenteurs en l’absence de visa. Résultat : la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne arrivent en tête, suivies des Pays-Bas à la deuxième place, devant Singapour qui vient compléter le podium.
« Le discours global qui lie une plus grande performance économique à l’accès sans visa et à l’ouverture au commerce international, à l’investissement et à l’échange de compétences est à nouveau fortement mis en évidence », a commenté l’ancien économiste en chef de Lloyds Bank Trevor Williams, cité par le cabinet Henley.
Ce dernier s’est fait une spécialité ce qu’il a lui-même nommé « concept de résidence et de citoyenneté par l’investissement » dans les années 1990. Il accompagne investisseurs et entrepreneurs internationaux voulant acquérir un deuxième passe port et une deuxième nationalité via des programmes gouvernementaux visant à attribuer des passeports à ceux qui investissent dans leur économie. Pour obtenir un passeport chypriote, par exemple, ces hommes d’affaires doivent acheter sur l’île une propriété d’une valeur minimum de 2 millions d’euros et contribuer à hauteur de 150 000 euros aux fonds du gouvernement. Moyennant quoi ils ont accès sans visa à plus de 170 pays dont l’UE, le Royaume-Uni et le Canada.
Les passeports dorés dans le viseur de Bruxelles
Ces passeports dorés ne sont évidemment pas du goût de l’Union européenne, en particulier dans le contexte des sanctions contre les oligarques russes. S’ils sont interdits de visa depuis le début de la guerre en Ukraine, le Parlement européen n’en réfléchit pas moins à proposer des règles communes à tous les États membres pour leurs programmes de citoyenneté et résidence par l’investissement.
Auteure d’un rapport d’initiative législative invitant la Commission à présenter une proposition en ce sens, l’eurodéputé néerlandaise Sophia in ’t Veld (Renew Europe) estimait en mars 2022 que « ces programmes ne servent qu’à fournir une porte dérobée pour entrer dans l’UE aux individus suspects qui ne peuvent pas y entrer par la grande porte ». « Le moment est venu de fermer cette porte, pour que les oligarques russes et d’autres personnes disposant d’argent sale restent dehors, estimait-elle. Les gouvernements des États membres ont refusé de s’attaquer au problème, affirmant qu’il ne s’agissait pas d’une question européenne. Au vu de ce qui se passe actuellement, ils ne peuvent plus éluder le problème. »
Sophie Creusillet