Le développement des données sur le commerce extérieur dans le monde et surtout leur disponibilité permet aujourd’hui d’approcher plus finement l’ampleur des fraudes en la matière. Une récente étude de la Cnuced (Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement, UNCTAD en anglais) donne ainsi un éclairage nouveau sur l’ampleur du commerce international clandestin -falsification de déclarations, sous-facturation de flux- de matières premières et les pertes en termes de revenus fiscaux et douaniers qu’il occasionne pour les budgets des pays producteurs concernés. Elle a été rendue publique pour le septième forum international des matières premières tenu les 15 et 16 juillet dernier à Nairobi.
Quelques exemples ? Entre 1990 et 2014, le Chili a enregistré 16 milliards de dollars (Mds USD) d’exportation de cuivre vers les Pays-Bas, mais ces flux n’apparaissent nulle part dans les importations néerlandaises… Idem pour 31,3 % des exportations de cacao officielles de la Côte d’Ivoire déclarées vers ce même pays européen de 1990 à 2014, soit 5 Mds USD (sur un total de 16 Mds USD …).
La sous-facturation des exportations de pétrole du Nigeria vers les Etats-Unis entre 1996 et 2014 atteindrait pour sa part 69,8 Mds USD, 24,9 % du total des expéditions nigérian d’or noir outre-Atlantique.
Autres exemples, entre 2000 et 2014, quelque 67 % des exportations totales d’or de l’Afrique du sud –pour une valeur globale de 78,2 Mds USD – ont été sous-facturées vers des destinations comme l’Inde, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume Uni. Quand à la Zambie, elle aurait officiellement expédié vers la Suisse près de la moitié de ses exportations de cuivre –soit une valeur de 28,9 Mds USD- entre 1995 et 2014, mais ces flux n’apparaissent pas dans le commerce extérieur de la Suisse…
Autant d’exemples qui mettent en relief l’ampleur de ce phénomène, la nouveauté de cette étude étant qu’elle entre dans le détail pour certains pays (Chili, Côte d’Ivoire, Nigeria, Afrique du Sud et Zambie) et certaines matières premières (cacao, cuivre, or, pétrole) dont ils sont particulièrement dépendants. Au total, ces pays perdraient ainsi 67 % -les des deux tiers- de leurs exportations, et d’énormes montants de revenus fiscaux et douaniers et autant en sources de devises.
Quels sont les causes de ces pratiques ? L’étude en cite trois principales mises en exergue par les recherches sur ce sujet : le profit financier bien-sûr, le contournement des contrôles fiscaux et douaniers, et enfin le contournement des barrières administratives. Pays producteurs comme pays importateurs sont tout autant concernés. De quoi alimenter la réflexion sur les moyens d’améliorer les retombées positives du commerce international sur les pays en développement, notamment ceux les plus dépendants de leurs matières premières….
C.G
Pour en savoir plus :
L’étude de la Cnuced en anglais est téléchargeable au lien suivant : http://unctad.org/en/PublicationsLibrary/suc2016d2.pdf