Le Parlement et le Conseil européens sont parvenus à un accord sur la révision du règlement qui encadre depuis 15 ans les transferts de déchets. Le nouveau texte donne un tour de vis au contrôle de cette activité. Il prévoit notamment l’interdiction des exportations de rebuts plastiques à une liste de pays.
Il y a urgence. Le monde a produit 139 millions de tonnes de déchets plastiques à usage unique en 2021, soit six tonnes de plus qu’en 2019, selon un rapport de l’ONG australienne Minderoo publié en février dernier. Le nouveau règlement proposé par l’Union européenne a pour ambition « de veiller à ce que l’UE n’exporte pas ses défis en matière de déchets vers des pays tiers », précise un communiqué du Parlement.
Mesure phare de ce texte, l’interdiction d’exporter les rebuts plastiques ne concerne que les pays n’appartenant pas à l’OCDE, soit les pays les plus pauvres, disposant rarement des infrastructures nécessaires à leur traitement. Dans les pays à faibles revenus (moins de 1 000 dollars par an et par personne), 90 % des déchets sont soit brûlés soit jetés dans la nature, selon un rapport de la Banque mondiale daté de 2018.
Un meilleur contrôle des installations dans les pays tiers
Les exportations d’autres déchets (non dangereux) vers ces pays ne pourront s’effectuer qu’à leur demande et après avoir démontré qu’ils sont en mesure de les valoriser. L’UE prévoit d’établir une liste de pays autorisés à les importer. Concernant les pays de l’OCDE, la Commission surveillera les niveaux d’exportation et pourra les suspendre s’il n’y a pas de garantie que le traitement des déchets dans le pays concerné est durable.
En outre, les exportateurs devront veiller à ce que les installations dans les pays tiers soient contrôlées par des tiers indépendants. Enfin, les législateurs entendent « libérer le potentiel du marché européen des déchets ». Les notifications de transfert seront obligatoirement numérisées, via un système d’échange électronique de données.
La Commission a d’ailleurs estimé que, notamment grâce à la mise en place d’un système informatisé d’échange de données, cette nouvelle marche à suivre devrait permettre aux exportateurs et aux autorités de contrôle de réaliser 1,4 million d’euros d’économies par an.
Plus de 100 millions de tonnes échangées en 2020
Acteur important du commerce mondial de déchets, l’Union européenne a expédié vers des pays tiers environ 32,7 millions de tonnes de déchets en 2020 pour une valeur de 13 milliards d’euros par an, soit 75 % de plus qu’en 2004. Elle a également importé 16 millions de tonnes (pour 13,5 milliards d’euros). Sa balance commerciale est donc déficitaire de 500 millions d’euros. A ces échanges s’ajoutent ceux effectués entre les pays membres de l’UE, soit 67 millions de tonnes.
Cet accord entre le Parlement et le Conseil doit encore être approuvé par le Coreper (le Comité des représentants permanents des Etats membres au Conseil) et par la Commission de l’environnement du Parlement avant d’entrer en vigueur.
L’annonce de cet accord intervient alors que vient de se tenir à Nairobi un cycle de négociations entre 175 pays afin d’obtenir un traité contre la prolifération des déchets plastiques. Après cette étape kényane, deux autres sessions de négociations sont prévues : en avril prochain au Canada et en Corée du Sud fin 2024.
Sophie Creusillet