Si la lutte contre le terrorisme était au coeur de la réunion des ministres européens des Affaires étrangères du 19 janvier à Bruxelles, la question du présent et de l’avenir des relations entre l’Union européenne (UE) et la Russie a également donné lieu à d’intenses tractations. « Nous avons eu quatre heures de débats vifs sur les relations avec la Russie », a confirmé le ministre polonais des Affaires étrangères, Grzegorz Schetyna.
Les sanctions – qui seront réexaminées en mars prochain, à l’aune de la mise en œuvre des accords de Minsk – n’étaient pas, cette fois, à l’ordre du jour. C’est un document confidentiel, rédigé par la Haute Représentante, Federica Mogherini, qui a servi de base à la réunion de travail. Selon les informations recueillies par la Lettre confidentielle du Moci, le texte fournirait « matière à réflexion » sur la façon dont l’UE pourrait, à l’avenir, s’engager avec Moscou.
La chef de la diplomatie européenne suggère un processus « sélectif, progressif et ajusté en fonction de la réaction de la Russie ». Elle propose notamment le lancement d’une étude interne qui analyserait les options et les limites pour relancer les relations commerciales avec la Russie et plus globalement avec l’Union économique eurasiatique (Russie, Arménie, Kazakhstan, Belarus), formellement lancée le 1er janvier dernier.
Federica Mogherini met aussi en avant un dialogue, ou une coopération, s’agissant du régime des visas, de l’énergie, du changement climatique ou encore une reprise partielle de la coopération sur le ‘Partenariat pour la modernisation’. Selon elle, il ne s’agirait pas de faire du « business as usual », les mesures devant être étroitement liées au respect, par Moscou, de ses engagements, ainsi qu’à sa « bonne foi » dans la mise en oeuvre des accords sur l’accord commercial UE-Ukraine et sur la fourniture de gaz russe à l’Ukraine.
Il n’est pas sûr qu’elle soit suivie sur toute la ligne. Alors que la haute représentante soulignait, à l’issue du Conseil, un relatif consensus sur la question, les commentaires recueillis en coulisses démontrent que le dossier continue de diviser les 28. Pour le Luxembourgeois Jean Asselborn, par exemple, une « discussion sur une coopération avec l’Union eurasiatique » doit être envisagée. Même son de cloche pour l’Autrichien Sebastian Kurz qui considère que l’UE a besoin d’une stratégie pour « asseoir les relations avec la Russie sur une base solide à long terme ». À l’inverse, le ministre lituanien Linas Linkevicius s’est montré opposé à une stratégie envers la Russie. « Je ne pense pas qu’il y ait un modus operandi qui devrait être changé (…) ou des sanctions levées. Il n’y a pas de raison ni même de prétexte pour cela ».
Kattalin Landaburu, à Bruxelles