Nouveau Coup de théâtre à Lyon pour l’avenir d’Erai. Alors que l’on s’acheminait la semaine dernière vers la démission de Daniel Gouffé de la présidence du conseil d’administration d’Entreprises Rhône-Alpes International (Erai) et de son remplacement par un administrateur, il n’en a rien été, faute de candidat, de sorte que la réunion exceptionnelle du conseil d’administration convoquée vendredi 6 février dernier après-midi s’est terminé sans solution. Un groupe de travail formé d’administrateurs doit à présent élaborer un plan B (Ndlr : article actualisé le 12 février)*.
Pourtant, comme l’annonçait la Lettre confidentielle du 5 février (lire ici)**, un chef d’entreprise « consensuel », administrateur d’Erai, semblait prêt à s’engager pour prendre les rênes du bras armé du Conseil régional pour le soutien des entreprises rhônalpines à l’international. D’après des fuites dans la presse lyonnaise, confirmées par nos propres sources, il s’agissait de Pascal Nadobny, président d’Addev (fabrication de produits en plastique) et du comité Rhône-Alpes des conseillers du Commerce extérieur de la France (CCEF). Celui-ci aurait jeté l’éponge après avoir considéré que les conditions n’étaient pas réunies pour qu’il puisse mener à bien sa mission, en particulier concernant l’absence totale de garantie sur le soutien du conseil régional au-delà du 31 mars. Mais il a accepté de mettre en place le groupe de réflexion chargé d’élaborer le fameux plan B.
Un nouveau projet pour la plénière du 6 mars
Le défi n’est pas mince. Erai a obtenu une rallonge budgétaire pour tenir jusqu’au 31 mars. D’ici là, le conseil régional doit à nouveau se réunir le 6 mars. C’est une dernière chance pour la survie de l’agence, et c’est l’échéance que s’est fixée le groupe de travail. Mais le contexte politique local risque de compliquer les choses.
« La prochaine Assemblée plénière du Conseil régional, le 6 mars, se présente comme une réunion à haut risque, car il n’est pas certain qu’un nouveau projet pour Erai soit voté », a confié à la LC, le 9 février, François Turcas, président de la CGPME Rhône-Alpes depuis 1997 et administrateur d’Erai depuis 1987, qui fait partie du groupe de travail piloté par Pascal Nadobny. En effet, aux voix des écologistes pour repousser le projet pourraient s’ajouter celles d’une partie de l’Udi (Union des démocrates et indépendants).
Rappelons que ce dernier rebondissement dans le scénario de crise que traverse Erai s’inscrit dans un contexte politique particulièrement tendu en Rhône-Alpes, les élus d’EELV (Europe Écologie Les Verts) s’opposant aux socialistes, auxquels ils étaient pourtant alliés au sein de la majorité régionale, sur deux projets emblématiques : le projet de TGV Lyon-Turin, défendu par les socialistes mais auquel les Verts sont hostiles, et le dossier de plus en plus politisé d’Erai, sur fond de friction entre les deux partis au niveau national. Faute de majorité au sein du Conseil régional, les élus écologistes insistant pour une liquidation préalable de l’association, le projet de fusion d’Erai avec l’Ardi (Agence régionale de développement de l’innovation) a déjà dû être retiré sine die de l’ordre du jour de la dernière assemblée plénière du conseil régional, fin janvier*.
La détermination des Verts sur ce dossier semble forte, comme en témoignent les arguments de Jean-Charles Kolhaas, chef de fil d’EELV à l’assemblée régionale, qui sont détaillés dans la Lettre d’aujourd’hui**.
Pascal Nadobny pilote le groupe de réflexion
Pascal Nadobny a donc accepté de piloter le groupe de travail chargé d’élaborer un projet à soumettre à l’assemblée régionale. Il comprend, outre François Turcas, son homologue au Medef Bernard Gaud, le président de CCI Rhône-Alpes Jean-Paul Mauduy, le directeur de Bpifrance Rhône-Alpes Arnaud Peyrelongue, et Jean-Michel Daclin président d’Only Lyon Tourisme et congrès. A charge pour eux de présenter une synthèse, la trame d’un plan B.
Au regard de l’ordre du jour de leur première réunion, prévue jeudi prochain 12 février après-midi, la partie s’annonce très difficile, car il s’agit de tout revoir de fond en comble et le groupe de travail n’a qu’à peine trois semaines.
Qu’on en juge : recentrage des missions d’Erai plus son extension à l’Auvergne (qui doit fusionner avec Rhône-Alpes dans le cadre de la réforme territoriale), maintien des contrats et partenariats en cours, synergies commerciales et rationalisation avec l’Équipe régionale à l’export (CCI de région, Opérateurs spécialisés du commerce international/OSCI…), revue des outils de gestion, présentation du budget 2015, plan de restructuration éventuel, salaires, synergies à définir en cas de fusion avec l’Ardi…
Pour François Turcas, un rapprochement entre Erai et l’Ardi se justifie « à condition qu’il y ait de réelles synergies, que le développement international demeure le cœur » du nouvel organisme, qui devrait s’appeler Entreprise Rhône-Alpes International Innovation (Eraii).
Le président de la CGPME régionale, également CCEF, est un fervent partisan de la stratégie offensive impulsée par Daniel Gouffé à Erai, son président depuis 2005. Il réfute du reste toutes les critiques qui fusent à l’égard du président d’Erai, les unes après les autres. D’abord, que le réseau des bureaux, avec 27 implantations à l’étranger, serait trop vaste. « C’est facile de critiquer, affirme-t-il. Daniel Gouffé a donné une dimension internationale à l’organisme qu’il préside. Mais le budget d’Erai est ce qu’il est, insuffisant ». Pourquoi ne lui donne-t-on pas des moyens similaires au Bade-Wurtemberg ou à la Catalogne ? Est-ce que l’on veut que Rhône-Alpes ait une dimension mondiale ou veut-on simplement exister ?
L’intégralité des arguments du président de la CGPME Rhône-Alpes est détaillée dans la la LC d’aujourd’hui**. Ils témoignent de l’attachement des milieux d’affaires rhônalpins à cet outil qui a soutenu leurs projets d’expansion à l’international. En attendant, il doit commencer à plancher, avec les autres membres du groupe de travail, sur le fameux plan B.
François Pargny
avec Christine Gilguy
*NDLR : Une première version de cet article a fait l’objet d’une Alerte adressée à nos abonnés dès le 10 février. La présente version est actualisée à aujourd’hui, intégrant en italique la mention des deux nouveaux témoignages de François Turcas et Jean-Charles Kolhass (EELV) proposés au sommaire de la Lettre aujourd’hui.
**Rhône-Alpes : après le flop de la fusion avec l’Ardi, la locomotive Erai menace de dérailler
***Lire aussi dans la Lettre aujourd’hui :
– Spécial Rhône-Alpes : le plaidoyer de François Turcas pour Erai
– Spécial Rhône-Alpes : les arguments de Jean-Charles Kohlhaas (EELV) en faveur d’une liquidation d’Erai