« Je ne sais pas si il y a de quoi faire sauter la
ministre du Commerce extérieur… mais je vais formuler des propositions au
Premier ministre ». C’est ainsi que Nicole Bricq, plutôt affable et
décontractée mais pressée par le temps, a commencé son commentaire des
principales mesures recommandées par le Rapport Desponts / Bentejac sur l’évaluation
des dispositifs de soutien à l’internationalisation des entreprises. Avant d’expliciter la principale idée qu’elle en avait tiré : faire entrer les acteurs du dispositif « dans l’ère 2.0 ».
Jacques Desponts et Alain Bentejac venaient d’en détailler
les principales conclusions lors d’une conférence de presse, le 26 juin, qui a
marqué la publication de ce rapport réalisé dans le cadre de la modernisation
de l’action publique, en vue d’arbitrages qui seront faits lors de la réunion du
Comité interministériel de modernisation de l’action publique (Cimap) prévue le
17 juillet prochain (1).
Se gardant de commenter dans le détail les mesures les plus sensibles
telles que la fusion de certains organismes, les problèmes de gouvernance ou
encore la création d’une grande agence de l’international regroupant les
principaux opérateurs tels que Ubifrance et les CCI, la ministre du Commerce
extérieur a laissé filtrer, dans un rapide discours, celles qu’elle
retiendrait, sous une forme ou une autre.
Fédérer les acteurs autour de projets concrets
La ministre a indiqué que « la première tâche consiste
à fédérer les acteurs » et que le meilleur moyen de le faire sera de les faire
travailler « ensemble » sur des projets concrets. L’objectif
principal étant de « simplifier » la vie aux entreprises, elle a
appelé à « entrer dans l’ère de l’export 2.0 ».
Concrètement, il s’agit d’abord, pour Nicole Bricq, d’assurer
« un accès unique à l’appui export pour les entreprises à travers un
portail internet unifié, un annuaire de l’export, une hotline d’orientation… ».
Il s’agit aussi de mettre en place « un réseau social des entrepreneurs
pour permettre le dialogue direct entre les entreprises et des mises en
relations ». Elle souhaite également la création d’une « véritable
communauté française de l’export » et l’amélioration « immédiate »
du service aux entreprises « à travers des projets partagés ».
Autres orientations : la mise en place d’une cellule
interministérielle pour « répondre aux entreprises qui rencontrent des
obstacles à leur développement international ». Et l’accélération de la modernisation de la
délivrance des visas, une promesse du gouvernement qui tarde à se concrétiser. « Deux
autres ministères s’y sont engagés (ndlr : le ministère des Affaires
étrangère et celui de l’Intérieur) mais c’est encore un problème en Russie où
je me suis rendue la semaine dernière » a indiqué la ministre, qui propose
de labelliser les entreprises pour leur faciliter l’accès à ce précieux sésame.
Egalement retenue l’idée d’améliorer la synergie entre la
recherche d’investisseurs étrangers et l’accompagnement des entreprises à l’international :
« Ubifrance et l’AFII ont des missions complémentaires (…) il faut sans
doute se poser la question de la fusion entre ces agences », a estimé la
ministre. Nicole Bricq a également évoqué, sans aller dans le détail, « un
rapprochement entre les deux grands réseaux d’appuis publics que sont Ubifrance
et CCI International » et la création « de maisons de l’international
dans lesquelles les entreprises ont accès à tous les services et tous les
acteurs ».
Elle a aussi cité « la mise en œuvre d’une bannière
unifiée derrière laquelle se retrouveront les opérateurs spécialisés qui
interviennent en soutien des exportations aux côtés d’Ubifrance ». Et, s’adressant
plus particulièrement à Pierre-Antoine Gailly, président de la CCI de Paris Ile-de-France et vice-président de l’Uccife présent au premier rang, qui a cette semaine vertement critiqué la
politique d’offre intégrée aux régions lancée par Ubifrance et Erai (2), elle a concédé que « sans renier la
spécificité des uns et des autres, il faut éviter redondances et concurrence,
cher président ».
Pour terminer, Nicole Bricq a renvoyé au rapport d’étape « Marque
France », qu’elle suit avec ses collègues Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin,
dont la remise est prévue aujourd’hui 27 juin, pour retrouver son idée de « fédération
d’acteurs ». Et surtout au 17 juillet, pour le Cimap. Se disant convaincue qu’il « faut un saut qualitatif », elle a prévenu qu’elle ne serait pas seule à décider : « sur la base de ce travail », « la machine gouvernementale va se mettre en marche » pour définir « un plan d’action ». Et ce sera le Premier ministre, dans le cadre du Cimap, qui tranchera. Contrainte de quitter la conférence de
presse après la deuxième question, pour se rendre à l’OCDE, où elle devait
prononcer un discours sur la responsabilité sociale des entreprises, elle a
laissé les participants – dont les représentants des principaux organismes du dispositif – sur leur faim…
C. G.
(1) Lire dans la Lettre
confidentielle de cette semaine : « Les mesures choc de la
Mission Desponts / Bentejac pour réformer le millefeuille des soutiens à
l’export »
(2) Lire dans la Lettre
confidentielle de cette semaine : « Pierre-Antoine Gailly veut
une sorte de Yalta de l’international avec Ubifrance »