En ces temps de disette budgétaire, pour soutenir le commerce et l’investissement français dans le monde, il est urgent de trouver les meilleures sources financières. « Mobiliser les fonds souverains est, et restera une priorité », souligne-t-on ainsi au ministère du Commerce extérieur. Il a été ainsi demandé à l’Agence française pour les investissements internationaux (Afii) « de se relancer » sur les fonds souverains.
« Une mission qui ne sera pas remise en cause par la fusion de l’Afii avec Ubifrance pour créer une grande agence capable de parler avec les Agences de promotion de l’investissement et du commerce dans le monde (qui s’appellera peut-être France International Entrepreneurs), puisque les deux lignes de métier, investissement étranger et accompagnement à l’international des entreprises françaises, seront maintenues », explique-t-on à la Lettre confidentielle au ministère des Affaires étrangères (MAE).
Principale région visée, le Golfe. Faire appel à la Chine, dont le président se trouve à l’heure actuelle en visite à Paris, paraît bien insuffisant, voire « prématuré », convient-on tant au ministère de l’Économie et des finances qu’au MAE. A la Chine, on préfère les amis très fidèles et très riches du Golfe. Il est vrai que la France a déjà entamé son opération de séduction auprès des pétromonarchies depuis le début de l’année. Et que sur les quelque 70 fonds souverains existant dans le monde, la région de la péninsule arabique se distingue tout particulièrement. Outre le plus puissant de la planète, le fonds saoudien Sama Foreign Holdings, le Golfe compte aussi les fonds émiriens Abu Dhabi Investment Authority (ADIA) et Mudabala Development Company ou encore le Qatar Investment Authority (QIA) et le Koweït Investment Authority (KIA).
En janvier dernier, Nicole Bricq s’est rendue aux Émirats arabes unis et à Oman dans le but de stimuler la coopération financière en matière de crédits export. Parallèlement, le Trésor et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) menaient une mission en Arabie saoudite et la direction financière de la CDC discutait avec Mubadala de soutien aux crédits export français. Un conseiller économique du Trésor, Hervé Le Roy, venait aussi d’être officiellement chargé de coordonner les actions de Bercy en matière de coopération avec les fonds souverains.
Plus récemment, dans le cadre de la diplomatie économique développée par Laurent Fabius, le MAE a créé une commission chargée de discuter de projets d’investissement avec l’Arabie saoudite. Cette structure, qui rassemble le Trésor, la CDC et la banque publique d’investissement Bpifrance, est présidée par Jacques Maire, le patron de la direction des Entreprises et de l’économie internationale au Quai d’Orsay, qui est chargée du suivi du dossier.
« Nous sommes en phase de réflexion et la commission ne s’est encore réunie qu’une seule fois », insiste un proche du dossier, qui assure que « rien, aucun projet n’est ficelé à ce jour ». Et l’interlocuteur de la LC de se montrer « surpris », sinon excédé, par des annonces qui auraient filtré, via le ministère du Redressement productif, de projets d’exportations françaises dans des domaines sensibles, comme l’armement et le nucléaire, qui seraient garantis avec de l’argent saoudien.
« Ce qui est vrai, en revanche, précise-t-on au MAE, c’est que les fonds souverains sont intéressés par du solide. Leur première priorité, ce sont des placements sûrs. Et du moment qu’ils ne risquent pas de perdre leur capital, alors ils ne recherchent pas de gros rendements ». La France est un pays stable, « il faut encore le faire savoir », assure l’interlocuteur de la LC, qui estime « qu’on n’a pas assez dragué ces gens-là », évoquant notamment la Banque islamique de développement, avec laquelle « il serait bon de s’associer pour le financement de projets avec des Français ».
François Pargny