Trois secteurs prioritaires pour des coopérations et partenariats se dégagent du dernier forum d’affaires franco qatarien, orchestré par Medef International et la Chambre de commerce du Qatar dans les salons du Quai d’Orsay le 24 juin, en marge de la visite officielle de Cheikh Tamin bin Hamad Al Thani en France : l’énergie, le Mondial 2022 et les TIC. Trois secteurs qui ont fait l’objet d’échanges nourris entre les hommes d’affaires français et qataris au cours d’ateliers tenus à huis-clos, et dont une brève restitution a été donnée à l’issue du forum, à laquelle la Lettre confidentielle a assisté (lire aussi : Paris-Doha : les priorités de la diplomatie économique).
Energie : des besoins divers
D’après Denis Simoneau, membre du bureau exécutif et directeur des Affaires européennes et internationales de GDF Suez, les besoins du Qatar et donc les perspectives de partenariats sont nombreuses dans les domaines du gaz -où Total et GDF Suez sont solidement implantés-, de l’électricité (augmentation des besoins), les énergies renouvelables (solaire, éolien), les services liés à l’efficacité énergétique, la lutte contre la pollution.
Les domaines où les savoir-faire français vont s’efforcer de contribuer à relever les défis : une approche globale « énergie-eau-alimentation » ; la formation des ressources humaines ; la lutte contre l’émission de CO2 ; les technologies vertes ; le nucléaire, car « il y a des interrogations au Qatar ». « Nous avons devant nous d’immenses chantiers, nous souhaitons confirmer ce partenariat et avons de solides perspectives dans ce sens» a assuré le dirigeant français.
Mondial 2022 : des « budgets éblouissants »
Les chantiers liés à la préparation du Mondial 2022 –dont personne n’a évoqué l’éventuelle remise en cause lors de ce forum- sont ceux qui font le plus rêver les hommes d’affaires français, avec ses projets d’infrastructures aux « budgets éblouissants », comme l’a indiqué Christian Dumond, patron de la filiale qatari de RATP-SNCF.
Le budget global annoncé par le Qatar pour cette coupe du monde de football –qui prévoit, notamment, la construction d’une dizaine de stades et de nombreuses infrastructures d’accueil et de communications – atteint, selon les sources, entre 130 et 140 milliards de dollars. Près de dix fois plus que le Mondial brésilien, qui a pourtant fait grincer des dents dans les favellas. Les appels d’offres ont commencé à sortir à l’automne 2013.
D’après Christian Dumont, les participants à cet atelier auraient convenu de mettre en place des « workers charts » pour les chantiers à venir, une façon de taire les éventuelles critiques sur les conditions réservées aux ouvriers étrangers.
Des projets commencent à se concrétiser. QDVC (Qatar Diar/Vinci), Véolia Environnemenrt et Bouygues sont ainsi pré-qualifiés sur un vaste projet de réhabilitation d’infrastructures de distribution d’eau. Dans les transports publics, Systra et Egis sont impliqués dans des études de conception, Vinci dans la construction. La sécurité pourrait aussi faire l’objet de partenariats.
TIC : cyber-sécurité et e-government
Troisième et dernier secteur qui a fait l’objet d’un atelier lors de ce forum : le vaste secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC), « un sujet important » où les possibilités de coopération et de partenariats sont là aussi « nombreuses », selon Jean-Michel Lagarde, le président exécutif de Thales Communication & Security.
Dans le domaine satellitaire, où la technologie française a déjà été choisie par Doha (lancement du premier satellite qatarien par Arianespace en août dernier), les hommes d’affaires ont décidé de travailler à définir des projets communs, notamment dans le domaine orbital.
La cybersécurité a été abordée « de manière approfondie, » d’autant plus qu’il s’agit d’un sujet « majeur » pour le Qatar, où il est nécessaire de « maîtriser toute la chaîne ». Orange, Atos, Thales ont des savoir-faire, une chaire de cybersécurité financée avec le concours de Vinci a formé les premiers experts qatariens en début d’année. Il y a de nouvelles coopérations possibles entre la France et le Qatar dans la R&D, la formation ou encore l’élaboration des solutions, a indiqué le dirigeant français.
Toujours dans le domaine des TIC, l’e-government – la numérisation d’un certains nombre de services publics et informations administratives- est un autre domaine pour lequel les Qatariens sont demandeurs de savoir-faire français. Mais « nous sommes un peu moins avancés », a reconnu Jean-Michel Lagarde et il est nécessaire «de définir plus précisément les besoins et les services ». Enfin, en matière d’innovation , il est envisagé la création d’un « centre d’excellence » au sein du Parc scientifique et technologique de Doha dans les domaines de la cyber-sécurité et de l’e-government.
Abduulla Ghanim Al Ghanim, haut représentant du ministère qatari de l’Économie et du commerce, a conclu en rappelant notamment aux hommes d’affaires français que le plan national Qatar National Vision 2030 « est la base pour tout ce que nous faisons ». Et en vantant les ouvertures en matière d’investissements étrangers : facilitations fiscales et pas besoin, selon lui, de partenaire qatari dans des domaines comme l’agriculture, l’éducation, l’énergie, l’industrie, le tourisme, les TIC, le logement…
Ce forum d’affaires, pour l’instant dominé par les grandes entreprises, était le deuxième organisé par la France et le Qatar, un an presque jour pour jour après la première édition, en juin 2013, à l’occasion de la visite de François Hollande dans l’émirat. Cette visite avait aussi été marquée par le lancement d’un Conseil de chefs d’entreprises France Qatar – dont Yves-Thibault de Silguy, vice président de Vinci, assure la présidence côté français- qui avait pour objectif de rapprocher les entreprises et définir des secteurs de partenariat. Il semble que la formule fonctionne, en attendant d’y voir plus de PME…
Christine Gilguy