L’Exposition internationale d’Astana EXPO-2017, consacrée aux « énergies du futur », va être l’occasion pour les entreprises françaises de tester au Kazakhstan une nouvelle stratégie de positionnement sur les marchés de la ville durable avec le concours du ministère de l’Économie et du redressement productif d’Arnaud Montebourg. La clé : un « simulateur 3 D » de conception française qui sera mis à la disposition de la municipalité d’Astana pour l’aider à définir ses besoins à court et moyen terme.
Bercy a ainsi débloqué une enveloppe exceptionnelle de 2 millions d’euros sur le budget Fasep (Fonds d’étude et d’aide au secteur privé), que gère la DG Trésor, pour ce projet. L’appel d’offre pour sa réalisation a été remporté en février 2014 par un consortium regroupant Eiffage, Egis et GDF Suez, et dont Eiffage est le mandataire.
L’EXPO-2017, qui bénéficie de l’engagement personnel du président Nazarbayev, a déjà suscité l’intérêt de nombreux pays étrangers. Au-delà de la construction du site d’exposition, encadrée par la société publique Astana EXPO-2017 JSC (voir la LC cette semaine*), les entreprises étrangères, en particulier françaises, convoitent les grands projets urbains de la capitale coordonnés par Astana Innovation JSC, mandatée par le puissant maire d’Astana, I. Tasmagambetov.
Le consortium travaille actuellement au recensement des technologies et savoir-faire des PME et ETI hexagonales
L’objectif du « simulateur 3D français », qui sera basé sur les expériences de simulation du « Laboratoire Phosphore » d’Eiffage, est justement d’aider la municipalité kazakhstanaise à identifier ses besoins à l’horizon 2017 et, au-delà, de mobiliser une offre groupée française globale sur la base de ce diagnostic.
A cet effet, le consortium français travaille actuellement au recensement des technologies et savoir-faire des PME et ETI hexagonales. Une plateforme en ligne, reliée aux pôles de compétitivité par l’entremise de la DGCIS (Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services), devrait être rendue publique en septembre prochain, après quoi les entreprises identifiées choisiront de participer ou non à ce « cluster industriel ».
Selon une source au cabinet d’Arnaud Montebourg, ce simulateur a pour vocation de dépasser le simple catalogue, en proposant aux autorités kazakhstanaises compétentes une offre ciblée et proactive. En travaillant main dans la main avec Astana Innovation pendant près de 12 mois, le cluster pourrait en effet accompagner très en amont la définition des appels d’offre envisagés par la municipalité. Une délégation d’Astana Innovation est d’ailleurs en visite de travail en France depuis le 30 juin pour s’entretenir avec les membres du consortium à Paris puis à Nice.
Pour le «cluster» industriel français, l’opportunité de positionner sur les prochains chantiers d’Astana, Almaty et Chimkent
A ce stade, de nombreuses zones d’ombre persistent quant aux projets de la Mairie d’Astana à l’horizon 2017 dans les secteurs de l’hôtellerie (« Welcome to Astana ! »), de l’efficacité énergétique (« Astana Green City ») et du transport (« Astana Mobility »). Des incertitudes renforcées par le contexte budgétaire restreint auquel est confronté le Kazakhstan depuis fin 2013, du fait notamment de l’arrêt des opérations d’extraction pétrolière sur le site de Kachagan.
Dans le domaine du transport, par exemple, le projet de tramway d’Astana, que convoitait de longue date Alstom, a dû être abandonné pour une solution plus économique de bus à haut niveau de service – BRT (appel d’offre à venir). Un revers difficilement compensé par le contrat de 107 millions d’euros signé en février 2014 avec Iveco pour la livraison de 350 bus à la mairie d’Astana. De nouveaux appels d’offres sont toutefois attendus. Selon une source proche du dossier, plusieurs pistes de projets seraient à l’étude, dont un système d’autopartage de voitures électriques en libre-service, une ligne de transport par câble et une mini rame de tramway en centre-ville.
Dans ce contexte, les enjeux du simulateur 3D dépassent largement le seul cadre d’EXPO-2017. Pour le « cluster industriel » français, cette boîte à outils est une opportunité de se positionner stratégiquement sur les grands projets urbains des municipalités d’Astana, d’Almaty et de Chimkent, qui manquent encore d’une vision claire aux horizons 2020-2050.
Pour Eiffage, mandataire du consortium, ce simulateur représente un gage de crédibilité important alors que le groupe espère ouvrir prochainement son premier bureau de représentation au Kazakhstan. Quant à Bercy, cette initiative, également testée à Santiago du Chili, a été conçue comme un préalable à de futures « chasses en meute » françaises à l’international : en cas de succès, le ministère espère que le dispositif sera étendu à d’autres villes ou d’autres marchés. Mais cette fois-ci, sur initiative privée.
Antoine Lury
*Lire dans la LC cette semaine : France-Kazakhstan : les Français tentent de rattraper leur retard sur les chantiers d »EXPO-2017