A l’instar du Canada *, les Etats-Unis ont à nouveau manifesté, la semaine passée, leur volonté d’accélérer les négociations en vue de conclure le Partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (PTCI/TTIP en anglais) sous l’administration de Barack Obama. « Les pourparlers ont débuté il y a deux ans et demi. Nous avons fait d’importants progrès mais pour respecter les échéances, nous devons passer à la vitesse supérieure », a commenté le représentant américain au Commerce, Michael Froman, lors d’une conférence à Londres organisé par l’Institut royal des affaires internationales, un puissant think-tank mieux connu sous le nom de Chatham House. Washington espère aussi apaiser les craintes de plus en plus audibles dans la sphère entrepreneuriale.
A l’issue de la dernière session de pourparlers à Miami, le 11e round depuis le lancement formel des discussions en 2013, le monde des affaires a clairement exprimé ses inquiétudes, de part et d’autre de l’Atlantique. « Malgré l’engagement politique affiché des deux parties, ces deux années de discussions ne se sont pas traduites par des progrès visibles et tangibles sur la table des négociations », a commenté, sur son blog, Garrett Workman, le directeur des Affaires européennes à la Chambre de commerce américaine. « Nous exhortons les deux parties à aller au delà des tactiques traditionnelle des négociations et avoir le courage de garantir un accord ambitieux de portée mondiale ». Même impatience au sein du lobby patronal européen. Dans un communiqué, Business Europe diffusait récemment un message similaire soulignant la nécessité de traduire les engagements politiques en résultats concrets.
«Intensifier les pourparlers au cours de 2016»
C’est dans ce contexte que Michael Froman et Cecilia Malmström se sont retrouvés le 11 décembre dernier à Bruxelles. Les deux hauts responsables en charge du Commerce ont passé en revue les progrès accomplis et fixé les grandes lignes de leur programme de travail pour l’année prochaine. « Nous sommes tombés d’accord pour intensifier les pourparlers au cours de 2016, notamment en multipliant les travaux techniques, entre les sessions formelles, et en augmentant les consultations au niveau ministériel », ont-ils annoncé dans un communiqué conjoint.
Le même jour, le représentant américain au Commerce rencontrait Phil Hogan, le commissaire en charge de l’Agriculture, afin de faire le point sur l’un des sujets sensibles de ces négociations. Si Washington milite pour une libéralisation complète des tarifs agricoles, Bruxelles veut garantir la protection de certains produits européens en imposant le respect des Indications géographiques (IG). Or les Américains sont plus que réticents à ouvrir leur marché au champagne français ou au Gorgonzola italien, s’ils perdaient la possibilité de faire usage librement du nom de ces produits. « Ils voudraient un accord similaire à ce qui a été conclu dans le Partenariat transpacifique (TPP/Transpacific Partnership). Les IG n’y sont pas interdites mais le respect de leurs droits spécifiques n’est pas non plus garanti », analyse une source au sein de l’exécutif européen.
Deux autres dossiers devraient également donner lieu à des passes d’armes entre les deux partenaires au cours du prochain round de négociation, prévu à Bruxelles en février 2016. D’abord la proposition européenne de créer l’Investment Court System’ (ICS), un système juridictionnel public des investissements, pour remplacer l’actuel mécanisme de règlement des différends entre investisseurs publics et privés (ISDS). Washington aurait déjà marqué son désaccord sur l’inclusion de certains éléments, notamment le mécanisme d’appel, point clé du projet conçu par Cecilia Malmström. Enfin, les Européens redoutent que l’offre américaine attendue sur l’ouverture de leurs marchés publics soit bien en dessous de leurs attentes.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
* UE/Canada : la mise en œuvre du CETA bute sur le règlement des différends investisseurs/Etat