Un bon signe pour la suite ? Pour la première fois depuis 2004, l’Union européenne (UE) et le Mercosur – Mercado Común del Sur, en français Marché commun du Sud – ont procédé, le 11 mai dernier, à l’échange de leurs offres tarifaires. Objectif : relancer les négociations en panne depuis plus d’une décennie et conclure un accord de libre-échange de bloc à bloc. Mais certains sujets qui fâchent comme la viande bovine ou l’éthanol ont été remis à plus tard…
Le Mercosur est « un marché très attrayant » mais « toujours sujet à d’importants droits et frais de douane », a souligné Cecilia Malmström devant les eurodéputés réunis en plénière la semaine passée. Les exportateurs européens paient 4 milliards d’euros par an en droits de douane « qui pourraient en gros être éliminés avec un accord ambitieux », a précisé la commissaire au Commerce. Avec un marché de 260 millions de personnes, le bloc sud-américain présente « d’importantes opportunités », ont reconnu les élus du groupe des Socialistes et Démocrates.
Les mesures protectionnistes actuellement en vigueur « signifient en effet que d’amples secteurs du marché des biens, des services et des marchés publics restent hors de portée des entreprises européennes », a expliqué David Martin, porte-parole du groupe pour les questions de commerce international. « Mais les négociations devront protéger nos secteurs sensibles », a également insisté Nicolas Danti, rapporteur du S&D sur l’accord UE/Mercosur.
La viande bovine et l’éthanol exclus de cette première offre
Répondant aux préoccupations des eurodéputés et de plusieurs États membres menés par la France, la Commission a finalement accepté d’exclure la viande bovine et l’éthanol de cette nouvelle offre tarifaire, alors que dans la précédente elle avait proposé un quota de 78 000 tonnes de bœuf. Sur ces produits particulièrement sensibles, les « offres seront définies plus tard », explique-t-on à la Commission européenne qui attend notamment les conclusions d’une étude d’impact commandée par le commissaire à l’Agriculture, Phil Hogan et dont les résultats sont attendus à l’automne.
Mais Cecilia Malmström semble bien déterminée à faire avancer le dossier malgré les réticences sur le volet agricole. « Nous sommes très conscients de la crise dans le secteur mais il faut avoir les bons chiffres », a-t-elle nuancé, évoquant un excédent commercial pour la viande porcine et les produits laitiers. « 60 % de nos importations agricoles depuis le Mercosur sont du soja et de la nourriture pour animaux, un accord de libre-échange supprimerait les droits de douane », a-t-elle rappelé soulignant aussi que le Mercosur n’avait à ce jour signé aucun autre accord régional de libre-échange. Les priorités de l’UE sont avant tout l’ouverture des marchés du bloc sud-américain dans les secteurs des services et des marchés publics où les entraves sont encore nombreuses. « Sans compter la corruption qui détériore le climat des affaires et la sécurité juridique des entreprises européennes basées dans la région », ajoute une source au sein de l’exécutif européen.
Côté sud américain, les éleveurs bovins ont mal accueilli la dernière proposition européenne, qualifiée par les représentants du secteur comme « une mauvaise nouvelle ». Le puissant lobby des exportateurs de viande d’Argentine, du Brésil, du Paraguay et de l’Uruguay a rappelé qu’ils avaient plaidé pour l’inscription d’un quota annuel de 300 000 tonnes de bœuf afin de soutenir la reprise des pourparlers. « Nous avons obtenu la certitude que ces produits seront bien inscrits dans le cadre des négociations », a tempéré, Rodolfo Nin Novoa, le ministre des Affaires étrangères uruguayen dont le pays assure la présidence tournante du Mercosur. À l’instar du gouvernement argentin, mené par le libéral Mauricio Macri, il souhaite lui aussi « dépolitiser » le bloc pour le ramener à sa mission première, à savoir la relance du commerce et de l’investissement.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles