Après Davos, c’est à Pékin que Xi Jinping s’est à nouveau posé, les 13 et 14 mai, comme le nouvel apôtre de la mondialisation et du libre-échange. Réunissant autour de lui vingt-neuf dirigeants de la planète, dont Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan, le président chinois a présenté lors d’un sommet international de deux jours sur les « Routes de la soie » son projet titanesque visant à cimenter les relations commerciales de Pékin avec l’Eurasie et l’Afrique. Il ambitionne de ressusciter l’antique Route de la soie, qui acheminait à dos de chameau des produits de l’Empire du milieu vers l’Europe et vice-versa, à travers l’Asie centrale. La version 2017 consiste en une série d’investissements dans des projets ferroviaires, autoroutiers, portuaires ou énergétiques. Et Pékin ne lésine pas sur les moyens : Xi Jinping a promis 113 milliards d’euros supplémentaires qui viendront s’ajouter aux 800 milliards déjà mis sur la table par la Banque chinoise de développement.
Mais si les vingt-neuf dirigeants présents semblaient acquis à sa cause, les leaders occidentaux ont quant à eux jeté un froid sur l’enthousiasme du président chinois. A l’exception de l’Italien Paolo Gentiloni, aucun dirigeant du G7 n’a participé au sommet, donnant l’impression, qu’à l’ouest du globe, les responsables craignent une nouvelle forme d’hégémonie chinoise. Plusieurs pays européens ont d’ailleurs refusé de s’associer à un communiqué sur le commerce préparé par Pékin.
Ces Etats- parmi lesquels l’Allemagne, la France, le Portugal, l’Estonie, la Hongrie ou la Grèce – ont jugé que ce texte ne faisait pas suffisamment mention des préoccupations des Européens en matière de transparence des marchés publics ou de normes sociales et environnementales. L’UE réclame depuis longtemps que la Chine accorde un accès plus libre à son propre marché, qui reste encore trop souvent fermé aux entreprises étrangères.
Développer des synergies entre les projets phares
Mais ce positionnement ne traduit pas pour autant un refroidissement des relations entre la Chine et l’UE. Si le projet « Une ceinture, Une route » (One Belt One Road) est jugé à Bruxelles comme une façon d’assoir la domination chinoise sur le commerce international, certaines initiatives intéressent de près les Européens.
A l’issue du 17e sommet UE / Chine en 2015, les dirigeants des deux blocs avaient ainsi préconisé le développement de synergies entre leurs projets phares, soit le Plan d’investissement pour l’Europe ou « plan Juncker », d’une part – dans lequel la Chine s’est engagée à participer à hauteur de 10 milliards d’euros -, et l’initiative « Une ceinture, Une route », d’autre part. Des discussions sont en cours pour mettre en place un Fonds commun visant à « accroître notre coopération en matière d’investissement », a indiqué Yang Yaniy, l’ambassadeur chinois auprès de l’UE à Bruxelles.
Dans une tribune publiée le 15 mai sur le site Euobserver, très consulté par les responsables à Bruxelles, ce diplomate chinois vante les mérites du projet de son pays « guidé par un esprit d’ouverture et de coopération constructive ». Il appelle les dirigeants des Vingt-huit à s’associer à l’ambitieux projet porté par Pékin, les deux blocs pouvant servir de moteur pour « maintenir la paix dans le monde et promouvoir le développement et la prospérité ».
Autant de sujets qui figureront à l’agenda du prochain sommet EU/Chine, programmé le 2 juin prochain à Bruxelles. Car si les relations commerciales entre les deux blocs restent tendues, en particulier sur la question de l’acier, l’un comme l’autre cherche à remplir le vide laissé par Donald Trump, qui, en janvier, a signé l’acte de retrait des États-Unis du Partenariat transpacifique.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
Pour prolonger :
–Chine / Commerce : le concept géant de route de la soie englobe l’Asie, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe
–Chine / Route de la soie : la France écartée des sillons chinois ?