Élections à venir en Espagne, en France, en Allemagne, référendum constitutionnel en Italie, négociations avec le Royaume-Uni après le Brexit… Pour Julien Marcilly, « le risque numéro un qui pèse sur l’économie en Europe est politique ». Lors d’une conférence de presse, le 17 octobre, intitulée « Économies européennes : le risque politique va-t-il gâcher la fête en 2017 ? », le chef économiste de Coface a pris le cas de la Grèce pour illustrer ses propos. « En 2014, selon lui, la reprise économique était là, certes timide, mais elle a été tuée dans l’œuf par la montée du risque politique ».
« Le risque politique s’est accru de 14 points »
A partir de ce constat, Coface a décidé, pour la première fois, de mesurer le risque politique en Europe de l’Ouest. Son modèle reprend huit variables, certaines déjà utilisées pour la mesure du risque politique dans les nations émergentes -croissance économique, développement, chômage, corruption-, d’autres étant ajoutées pour tenir compte des spécificités de l’environnement européen : solde budgétaire structurel, euroscepticisme, sentiment anti-immigration, morcellement politique.
Dans la pratique, l’assureur-crédit s’est concentré sur quatorze pays de l’Union européenne (UE) : Royaume-Uni, Belgique, Danemark, Allemagne, Irlande, Suède, Portugal, France, Espagne, Italie, Autriche, Pays-Bas et Finlande.
« En moyenne, a rapporté Julien Marcilly, le risque politique s’est accru de 14 points. Il a augmenté dans tous les États, la hausse étant la plus sensible où elle était déjà la plus élevée, comme la Grèce et l’Italie où tous les indices posent problème ». Mais, a-t-il précisé, « après la Grèce, ce sont en Autriche, aux Pays-Bas et en Finlande que le risque politique a le plus augmenté relativement, car il y était particulièrement faible avant. Et dans ces trois pays, se sont les trois derniers indices qui se sont détériorés : euroscepticisme, sentiment anti-immigration et morcellement politique ».
Quel degré de précarité au Royaume-Uni ?
En revanche, au Royaume-Uni, le risque politique a peu augmenté, en raison d’un taux de chômage particulièrement favorable. « Sauf, a reconnu Julien Marcilly – c’est une lacune de notre modèle – que nous n’avons pas pu calculer le degré de précarité ».
En s’appuyant sur l’indice d’incertitudes politiques à trois mois EPU (Economic Policy Uncertainty) du cabinet Baker, Bloom et Davis, d’après lequel cet indice a doublé entre 2001 et 2016, Coface a déterminé que l’incertitude a amputé de 0,2 % la croissance économique entre 2005-2006 et 2011-2012. L’effet serait plus élevé sur l’investissement que sur la consommation, car les ménages doivent assurer des besoins incompressibles.
Coface a cherché aussi à prévoir l’impact d’un choc similaire au Brexit chez les voisins du Royaume-Uni. Ainsi, dans l’Hexagone, on perdrait 0,7 % point de PIB, soulignait-il, « si, par exemple, Marine Le Pen gagnait les élections législatives ou pouvait se reposer sur une majorité parlementaire confortable ». Alors, l’impact sur les entreprises françaises serait notamment une hausse de 1,2 % du nombre des défaillances. Ce serait pire en Espagne, avec – 1,2 point de PIB, et moindre en Allemagne, avec – 0,4-0,5 point. Encore « ce n’est que le choc immédiat », reconnaissait Julien Marcilly. Car, autre lacune du modèle, Coface n’a pas calculé l’effet boule de neige qui peut se produire après un tel choc…
François Pargny
Pour prolonger :
– Risque pays / Export : Coface dégrade cinq pays, dont le Royaume-Uni
– Conjoncture / Monde : le FMI craint l’impact négatif du protectionnisme sur la croissance
– Royaume-Uni / UE : pour Pascal Lamy, « on ne saura pas clairement avant 10 ans le résultat du Brexit »
Et aussi :
Notre dernier Atlas des risques pays, 8e édition – 2016 (Moci)