Michel Bauza, directeur exécutif du Volontariat international en entreprise (VIE) chez Business France, nous a accordé courant avril un entretien exclusif initialement destiné à notre numéro spécial Guide de l’accompagnement à l’export. Il y fait le point sur la situation des VIE dans le contexte de la crise sanitaire liée au Covid-19 et met l’accent sur les principales évolutions du dispositif. Nous en proposons la primeur aux lecteurs de la Lettre confidentielle.
Le Moci. Comment gérez-vous la procédure des Volontaires internationaux en entreprises (VIE) dans le contexte du Covid-19 ?
Michel Bauza. Depuis janvier, après l’apparition du coronavirus en Chine, Business France s’est doté d’une cellule de crise VIE, elle-même en contact avec la cellule de crise et de soutien du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, pour gérer la sécurité des VIE en poste. Nous avons commencé par la Chine, puis très rapidement la Corée du Sud et Singapour, pour arriver petit à petit à l’Europe, avec l’Italie notamment, et finalement aujourd’hui l’ensemble des 130 pays d’affectation des Volontaires internationaux en entreprise.
Dans toutes les zones, tous les pays, nous avons des relations hebdomadaires avec les correspondants VIE des ambassades et les équipes sont à 100 % en télétravail pour assurer la continuité et l’accompagnement le suivi des jeunes et des entreprises. A commencer par l’information des VIE sur les consignes de sécurité et les difficultés qui peuvent impacter une entreprise en particulier.
« A ce jour, plus de 80 % de nos VIE opèrent en télétravail dans le monde »
A ce jour entre les jeunes qui ont terminé normalement leurs missions et ceux qui ont démarré en début d’année, le nombre total de VIE n’a pas beaucoup varié avec un peu moins de 10 500 volontaires en poste, compte tenu des premiers pays touchés en Asie. Quelque 12 % des VIE sont actuellement en France certains de façon temporaire pour travailler dans leur entreprise ou en télétravail. A ce jour, plus de 80 % de nos VIE opèrent en télétravail dans le monde.
Pour un jeune, le VIE est une expérience formatrice irremplaçable. On l’a vu pour le SRAS et on le verra après le coronavirus, le programme VIE sera toujours plébiscité, d’abord par le jeune qui veut se former au sein d’une entreprise à l’international, ensuite par l’entrepreneur qui a besoin de collaborateurs mobiles, agiles et de recruter des talents.
On le voit bien avec le succès des rencontres ou forums pour que les entreprises et les jeunes se rencontrent, comme le forum Grands Comptes tous les ans en octobre. La semaine dernière, durant la période de confinement s’est tenu notre premier événement virtuel totalement dématérialisé entre 35 entreprises et 2 000 jeunes, soit le double de ce que nous avions escompté, pour les missions du second semestre. C’est bien la preuve que le VIE reste l’expérience numéro un des jeunes ayant l’ambition d’aller plus loin.
Renforcement du VIE à temps partagé et de la diversité
Le Moci. Comment évolue la procédure des VIE ?
M.B. Depuis plusieurs mois, nous avons renforcé les possibilités de VIE à temps partagé, pour les TPE/PME ce qui nous a amené à conclure des accords avec l’IMED, association spécialisée dans ce type de VIE, mais aussi la Région Auvergne Rhône-Alpes et la Fédération des industries mécaniques (FIM).
Nous renforçons aussi notre plan d’action VIE Diversité, le terme pouvant revêtir plusieurs formes. En premier lieu l’origine culturelle : pour une entreprise, c’est évidemment un atout d’employer au Maghreb ou au Moyen-Orient un jeune maîtrisant l’arabe. Mais il a aussi le genre : aujourd’hui, 41 % des VIE sont des jeunes femmes. Nous travaillons ainsi avec des organisations comme l’Association pour l’égalité vers l’emploi Nos Quartiers ont des Talents (NQT) ou Engagement Jeunes.
« A la fin de leur période à l’étranger, 92 % de tous ces jeunes sont en activité »
Le Moci. Que deviennent les jeunes après leur période de VIE ?
M.B. Concernant le profil d’études des jeunes, trois catégories représentent chacune au moins 30 % du total : les ingénieurs, les diplômés en management et les diplômés de l’université titulaires d’un Master 1 ou 2. Pour le reste, il s’agit de bacheliers, de techniciens ou de jeunes avec une expérience professionnelle variée, comme les métiers du patrimoine vivant ou artisan.
A la fin de leur période à l’étranger, 92 % de tous ces jeunes sont en activité, dont 52 % dans la même entreprise et 40 % dans une autre, d’après une étude d’avril 2018, que l’EDHEC NewGen Talent Centre a réalisée avec Business France auprès d’un échantillon représentatif de 1 552 VIE de retour de mission. D’ailleurs, dans 7 cas sur 10, le VIE s’est vu proposer un emploi, qu’il a, au final, accepté ou pas.
En outre, 85 % des participants à l’étude ont déclaré que cette expérience avait été un accélérateur de carrière et 78 % occupent un poste à l’international. Enfin, nous organisons nos équipes pour être plus simple pour nos clients que sont les entreprises et les jeunes. Spécialisation, simplification et dématérialisation sont priorisées pour gagner en efficacité.
Le soutien des Régions
Le Moci. Quel est le regard des Régions vis-à-vis des VIE ?
M.B. Pilotes de l’économie sur leurs territoires, les Régions depuis longtemps financent une partie du ticket d’entrée pour le premier VIE dans une entreprise, aide qui peut aller de 50 % en Région Sud à 100 % dans les DOM TOM ou dans les Pays de la Loire. Elles sont conscientes que favoriser et fidéliser des jeunes talents est ensuite un vrai atout en termes d’attractivité.
Les Pays de la Loire apportent aussi un soutien en matière d’hébergement et de coaching, et même de recrutement, Business France dans ce cas, réalisant une présélection des jeunes selon les besoins de l’entreprise. Le 5 mars dernier, la Région Sud et Business France ont ainsi organisé, dans le cadre de la Team France Export Sud, le 1er VIE Export Day Sud qui a permis de familiariser au dispositif 80 entreprises, 15 écoles et 110 jeunes
Propos recueillis par François Pargny