C’est sans doute le sujet qui lui aura permis de percer dans le paysage médiatique, mais aussi celui où il aura su utiliser au mieux des faibles marges de manœuvre laissées aux gouvernements individuellement, la Commission ayant la main dans le cadre du mandat qui lui a été confié par les États-membres. Le fait est que ces dernières semaines, à l’occasion de la tenue du 13ème round de négociations à New-York fin avril*, le secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger n’a pas ménagé sa peine sur les ondes ou les plateaux TV comme le terrain – Lot-et-Garonne, Seine-Maritime, Eure ou encore Paris-, pour rappeler inlassablement les lignes rouges françaises dans l’état actuel des négociations UE/Etats-Unis pour le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI, en anglais TTIP / Transatlantic Trade and Investment Partnership, ou, également TAFTA) et clarifier sa position, y compris vis à vis de son propre camp à gauche, non sans arrière pensées politiques alors que ce projet de traité est plus que jamais impopulaire.
C’est ainsi qu’avant de se rendre ce vendredi 13 mai à Bruxelles pour assister au conseil des ministres du Commerce, Matthias Fekl était hier, le 11 mai, à l’Assemblée Nationale pour une nouvelle audition par la commission des Affaires étrangères, présidée par Élisabeth Guigou et la commission des Affaires européennes, présidée par Danielle Auroi. Et au jeu des questions / réponses, c’est sans doute la question quelque peu ironique du député PS du Puy-de-Dôme, Jean-Paul Bacquet qui lui aura permis de mieux s’adresser à la gauche sceptique, voire hostile.
« Ce traité a-t-il un intérêt pour la France ? »
« Monsieur le ministre, je vous pose une question extrêmement simple, personnellement, je n’ai pas encore compris quel était l’intérêt de ce traité », a commencé l’ancien président d’Ubifrance (devenue depuis Business France), poursuivant en taclant légèrement au passage le secrétaire d’État : « Alors, je vais vous le poser d’une façon la plus simpliste qu’il soit, « mais je suis persuadé que l’électorat de ma circonscription comprendrait ce que j’ai dit, et je ne suis pas sûr qu’il aurait compris ce que vous avez dit » : ce traité a-t-il un intérêt pour la France ? ». Et de s’interroger : «Il y a de très belles réussites d’entreprises françaises aux États-Unis, auraient-elles mieux réussi avec ce traité, ou l’absence de traité n’aurait rien changé ? ».
Matthias Fekl ne s’y est pas trompé, choisissant de répondre en premier au député du Puy-de-Dôme. Et d’enchaîner du tac au tac en indiquant que lui n’a pas ressenti pour sa part de l’incompréhension lorsqu’il participait quelques jours plus tôt à un débat sur le TTIP chez lui dans le Lot-et-Garonne, et qu’au contraire, il estime pour sa part que les citoyens sont extrêmement attentifs sur le traité transatlantique et qu’ils ont très bien compris la position de la France. Pour le fond de la question, il a repris sa casquette de secrétaire d’État : « En l’état, ce traité n’a pas d’intérêt pour notre pays, ni pour notre économie, ni pour le respect d’un certain nombre de principes et de valeurs que je n’ai eu de cesse de rappeler depuis ma nomination … Et je pense que cela a été parfaitement compris, tout comme a été parfaitement comprise la position de la France, qui est de dire qu’aux vues de cette absence d’intérêt en l’état, nous étions contre ce traité » ».
Et d’enfoncer le clou vis à vis de son interlocuteur : « Je suis prêt, y compris dans le Puy-de-Dôme, monsieur le député, à venir rendre des comptes devant tous ceux qui le souhaitent ». Jean-Paul Bacquet le prendra-t-il au mot ? A suivre…
Christine Gilguy, avec Venice Affre
Pour prolonger :
– UE / État-Unis : ce qu’il faut savoir des avancées du 13e round de discussions du TTIP
– UE / États-Unis : les marchés publics, pomme de discorde dans les négociations TTIP
– France / TTIP : M. Fekl recueille les fruits politiques de sa persévérance