La Chambre de commerce et d’industrie de Région Paris Île-de-France (CCIP Î-d-F) vient de réaliser une enquête auprès de 500 entreprises qu’elle a accompagnées à l’international. Elle fait apparaître un taux de satisfaction de 56 %, avec 55 % qui ont accru leur chiffre d’affaires à l’export, selon les résultats que nous avons pu consulter en avant-première et qui seront diffusés demain 1er décembre, à l’occasion de la cérémonie de clôture de la semaine francilienne « Faites de l’International », qui sera marquée par la remise des prix du neuvième palmarès Moci des PME et ETI leaders à l’international.
Un résultat plutôt opportun à l’heure où se prépare une nouvelle réforme majeure du dispositif d’appui à l’internationalisation des entreprises*. A cet égard, Jean-Claude Karpeles, délégué du président de la CCIP Î-d-F aux Affaires européennes et internationales, ne boude pas son plaisir en commentant ce sondage en exclusivité au Moci. Pour lui, à cet égard, pas question « de rendre un service de valeur à l’international dans une dimension ‘low cost’ ».
« Ce sondage permet de répondre en partie à cette exigence de mesure de la performance »
Mais d’abord ce taux de satisfaction de 56 %. « L’un des atouts propres à toutes les CCI est la connaissance des problématiques du chef d’entreprise dans leur globalité ; nous sommes à leurs côtés depuis la création et pour toutes les étapes de leur développement, veut croire Jean-Claude Karpeles. Les pouvoirs publics nous demandent de plus en plus comment nous mesurons au niveau de l’entreprise la valeur de notre accompagnement : ce sondage permet de répondre en partie à cette exigence de mesure de la performance ».
Il cite également, parmi les atouts des CCI, « notre expertise du terrain», et « les liens exceptionnels de la CCI de Paris Île-de-France avec les CCI françaises à l’étranger», « un formidable réseau d’entreprises françaises expérimentées dans le monde ».
Reste les 44 % de non satisfaits. « Il nous appartient de nous réinventer, de nous adapter aux nouvelles attentes, aux nouveaux modes d’échanges d’affaires, estime le délégué du président de la CCIP I-d-F. Le numérique a bien sûr bouleversé la donne. C’est pourquoi nous finalisons, notamment pour les primo-exportateurs, des outils d’auto-diagnostics virtuels ». Pour lui, après les nombreuses réorganisations menées ces dernières années dans le dispositif d’accompagnement des entreprises à l’international -régionalisation, coordination nationale, professionnalisation des équipes, charte de bonnes pratiques et socle commun de produits- « le positionnement des équipes des CCI dans les domaines de l’initiation, de l’information de base, du diagnostic et de la préparation à l’international s’est imposé ».
64 % rencontrent des freins à l’international, internes et externes
Parmi les résultats de l’enquête, un chiffre interpelle : si 55 % des entreprises disent avoir accru leur chiffre d’affaires, seulement 37 % disent avoir recruté, ce qui paraît peu lorsqu’on veut s’inscrire dans la durée. Pour Jean-Claude Karpeles, il faut laisser du temps au temps : « Quand on connait la structuration de nos exportateurs et les difficultés administratives à l’embauche, c’est un bon début », estime-t-il. « La question des embauches est un sujet permanent mais c’est le chef d’entreprise qui détermine le moment au regard de ses besoins. Sachons être à l’écoute et surtout, croyons en nos entrepreneurs. De la confiance d’aujourd’hui naitront les embauches de demain ».
Autres résultats marquants de cette enquête, les deux tiers des interrogés (64 %) déclarent avoir rencontré des freins à leur développement international. 54 % citent des freins internes (en tête le financement avec 54 %, suivi de l’absence de ressources humaines 28 % et de la méconnaissance des marchés 25 %) et 79 % des freins externes (en tête les obstacles réglementaires, sanitaires, administratifs pour 76 %, suivis des risques politiques pour 28 % et de la concurrence locale pour 27 %).
« La conquête de nouveaux marchés ne s’improvise pas et être volontaire n’est hélas par l’alpha et l’oméga », reconnaît Jean-Claude Karpeles. Pour ce dernier, aider les entreprises à surmonter ces obstacles relève d’actions multiples et conjuguées. « Dans de très nombreux cas, desserrer les freins rencontrés est de la compétence de l’État, de la négociation diplomatique : nous agissons au nom des entreprises dans ce domaine auprès de l’État. Mais le rôle principal des CCI est d’informer, de mettre en garde et de suggérer des solutions pour « gérer » les freins, afin de ne pas laisser l’entrepreneur seul » résume l’élu consulaire.
« Cette multiplicité d’attentes conforte la mission que se sont données les CCI de France »
En ce qui concerne les objectifs recherchés par les entreprises dans leurs démarche d’internationalisation, difficile d’établir une hiérarchie selon les résultats de l’enquête : l’identification de contacts est le plus cité (54 %) mais celle des marchés cibles n’est pas bien loin (49 %) ; démarrer un CA export (34 %) est presque aussi cité que développer un CA export existant (30 %), pour ne citer que les quatre premiers objectifs.
Jean-Claude Karpeles n’est pas surpris : « Cette multiplicité d’attentes conforte la mission que se sont données les CCI de France et que nous avons réaffirmée ces derniers jours », explique-t-il.
Et de dérouler un processus bien huilé : « Première étape, nous analysons, avec l’entreprise ses potentialités, ses faiblesses et la stratégie internationale qu’elle peut mettre en œuvre. Dans cette perspective, nous animons des échanges d’expériences et de bonnes pratiques entre primo-exportateurs et entreprises plus expérimentées. Vient ensuite la préparation au marché-cible qui passe par la qualification des produits et la structuration d’une démarche commerciale vers le marché visé. Cela signifie fournir des informations juridiques, fiscales, réglementaires sur ce marché, et aider aux premiers repérages via des entretiens experts, des formations spécifiques, des salons internationaux ciblés, etc. Enfin nous aidons l’entreprise à choisir son prestataire sur le marché cible et à lui proposer un cahier des charges, qui devrait inclure une information réciproque, entre ce prestataire et la CCI d’origine de l’entreprise sur les actions menées avec elle. Plus un dirigeant est informé, préparé et suivi dans son projet international, meilleures sont ses chances de réussite ».
« Le rôle de l’État en matière de commerce extérieur reste central’ »
On n’aurait pas mieux décrit l’apport d’une CCI dans un parcours de l’export où les chambres espèrent avoir un rôle majeur. A cet égard, Jean-Claude Karpeles n’élude pas la question qu’on lui pose sur le positionnement des CCI dans la réforme en préparation, qui pourrait entraîner une nouvelle répartition des tâches et des territoires entre Business France et les réseaux consulaires. « La CCI Paris Île-de-France est bien sûr impliquée dans la réflexion en cours qui, de notre point de vue, va dans le bon sens, et nous avons rencontré la plupart des acteurs en charge de la consultation actuelle, explique l’élu consulaire. Nous sommes soucieux de la prise en compte de nos savoir-faire dans la chaîne de ‘l’international’ ».
Selon lui, « le rôle de l’État en matière de commerce extérieur reste central, d’abord sur tous les aspects réglementaires et administratifs, mais aussi comme pilote politique et stratégique du dispositif d’appui. A ce titre, son agence Business France à un rôle de coordination opérationnelle indiscutable ». Ce qui ne doit pas empêcher une remise à plat : « Au-delà, une analyse politique et économique doit être faite pour positionner les uns et les autres, poursuit Jean-Claude Karpeles. La part d’argent public consacrée à la mission, la solidité de la présence opérationnelle sont des éléments qui devront être pris en compte ».
« Nous n’imaginons pas de rendre un service de valeur à l’international dans une dimension ‘low cost’ »
Reste une question de taille : comment concilier la chute des ressources budgétaires programmée dans le Projet de loi de finance 2018, qui est de l’ordre de 37 millions d’euros pour la seule CCI Paris Ile-de-France et le maintien d’un service d’appui aux entreprises efficace à l’international ? Jean-Claude Karpeles renvoie l’État, mais aussi les Régions, à leurs responsabilités : « Servir les entreprises et le développement économique de nos territoires doit rester notre ambition et notre raison d’être, et nous n’imaginons pas de rendre un service de valeur à l’international dans une dimension ‘low cost’, déclare-t-il. Il faut donc que l’État et la collectivité régionale, qui a une partie des compétences, déterminent clairement le rôle des opérateurs et que nous ayons les moyens d’agir : l’État a exprimé une forte ambition concernant le développement de l’exportation, nous sommes prêts à y contribuer ».
Christine Gilguy
*Lire à la Une de la Lettre confidentielle d’aujourd’hui : Aides à l’export / Réforme : les ministres donnent leur feu vert à C. Lecourtier
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