Cet article a fait l’objet d’une Alerte diffusée auprès des abonnés de la Lettre confidentielle dès le 25 septembre.
En marge de la présentation des résultats de Bpifrance pour le premier semestre 2017 le 25 septembre, Nicolas Dufourcq a dévoilé, dans un entretien accordé la veille au Journal du Dimanche (JDD), une partie de la solution que prépare la banque publique pour faciliter les transactions commerciales entre les entreprises françaises et l’Iran : une ligne de crédit d’un montant de l’ordre de 500 millions d’euros, qui sera dédiée au financement de crédits acheteurs dans ce pays où les banques françaises ne veulent plus accompagner le commerce international par crainte des sanctions américaines.
« Sauf cas de force majeure, nous serons à leurs côtés début 2018, a-t-il déclaré au JDD en évoquant les entreprises françaises. Nous sommes la seule banque française à pouvoir le faire sans encourir de sanctions américaines pour violation des règles d’embargo toujours en vigueur. Nous allons leur accorder des crédits acheteurs qui pourront atteindre jusqu’à 500 millions d’euros par an. Toutes les grandes entreprises sont sur la ligne de départ ».
Le guichet français de l’assurance-crédit export pas utilisé
Aucun détail n’a toutefois filtré concernant les aspects techniques de ce nouvel instrument, ni les contreparties iraniennes – notamment bancaires- avec lesquelles il fonctionnera. Jusqu’à présent discret sur ce projet qui est évoqué depuis des mois, le patron de Bpifrance a donc choisi de lever un peu le voile. Car le temps presse tant les frustrations sont grandes du côté des milieux d’affaires français, dont les projets commerciaux s’en trouvent freinés : si les groupes et grandes entreprises aguerries à l’export trouvent sans trop de difficultés des solutions à l’étranger et en payent le prix, ce n’est pas le cas des PME et ETI moins internationalisées, qui ne peuvent compter que sur deux petites banques françaises, Délubac et Wormser Frères, pour prendre en charge leurs transactions avec l’Iran.
Les missions d’entreprises se succèdent en Iran* –la dernière en date organisée par Medef International pas plus tard que les 17 et 18 septembre, avec la participation du secrétaire d’Etat Jean-Baptiste Lemoyne– mais ce frein aux échanges entre les deux pays persiste, deux ans après la signature de l’accord sur le nucléaire iranien qui a ouvert la voie à un allègement des sanctions internationales. Résultat : alors que le guichet de l’assurance-crédit publique française (géré par Bpifrance assurance export) est ouvert depuis 2016, il n’est pas utilisé.
Un accord-cadre d’un milliard d’euros avec l’Autriche
Cette situation est d’autant plus frustrante pour les Français que certains pays européens apparaissent plus allants dans ce domaine : le 21 septembre, la banque autrichienne Oberbank, petite banque provinciale qui n’a jamais rompu ses liens avec l’Iran et affirme gérer les comptes en euros de plusieurs banques iraniennes, a conclu un accord-cadre de crédit acheteur d’un milliard d’euros avec la banque centrale et 14 banques iraniennes, le premier du genre de la part d’une banque européenne. Elle bénéficiera de la garantie de l’agence de crédit export autrichienne OeKB (Oesterreichische Kontrollbank AG).
Ce type d’accord-cadre de crédit ou de garantie fleurissait encore au début des années 2000, y compris dans les grandes banques françaises, avant que les sanctions internationales ne soient aggravées, à la fin des années 2000. Selon un communiqué de la Central Bank or Iran (CBI), la banque centrale iranienne, ces ressources « seront allouées au financement de projets publics et privés d’infrastructures et de production approuvés », par les autorités iraniennes. Les secteurs ferroviaires, hydrauliques, photovoltaïques, la santé et la construction d’équipements sont concernés. La CBI n’a pas manqué, à cette occasion, de signaler qu’elle avait conclu des accords similaires avec la Corée du Sud et la Chine pour un montant de plus de 35 milliards de dollars. De son côté, l’Italie aurait mis en place une ligne de crédit de 4 milliards d’euros dédiée au financement de projets d’investissement italiens dans les infrastructures du secteur des hydrocarbures iranien.
Le nouvel instrument concocté par Bpifrance est donc très attendu : il facilitera notamment la ventes de biens d’équipements en Iran. Restera toutefois à trouver des solutions pour faciliter davantage les transactions courantes, qui concernent davantage les biens de consommation.
Christine Gilguy
*Lire dans la Lettre confidentielle du Moci :
–France / Iran : Ucaplast et Business France en force au salon Iran Plast
–Iran / Export : malgré les obstacles, l’engouement français ne se dément pas
Pour prolonger :
Guide 2017 des aides à l’export pour les PME & ETI