Vivapolis, marque ombrelle à l’export de la ville durable à la française portée par Michèle Pappalardo, est l’un des deux rescapés des projets de « fédérateurs de filières » initiés en 2013 par l’ex. ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq, avec celle portée par David Sourdive dans la santé. Mais victime de son succès, elle doit trouver très vite les moyens de muscler sa force de frappe pour transformer l’essai.
Pour celle qui a présidé l’Ademe et occupé les fonctions de commissaire général au Développement durable, la solution viendra du futur Institut français de la ville durable, projet quelque peu retardé par les remaniements gouvernementaux successifs des derniers mois. Il s’appuie sur les travaux de la mission Ville durable menée par le conseiller d’État Roland Peylet à partir de janvier 2014. Nommé par l’ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault, Roland Peylet a remis son rapport en avril au nouveau Premier ministre Manuel Valls. Un tel Institut doit permettre, notamment, la constitution d’une offre intégrée de démonstrateurs dans un domaine par essence multi-sectoriel. Un tel démonstrateur 3D a été lancé pour le Kazakhstan*.
En attendant, Michèle Pappalardo, qui ne cache pas son intérêt pour le futur institut, continue à jongler avec son emploi du temps de magistrate à la Cour des comptes et de porte drapeau de Vivapolis, qu’elle assume depuis septembre 2013. Signe que la sauce a bien pris, son agenda ne comporte plus guère de trous. Cette semaine, elle était reçue successivement par Matthias Fekl, secrétaire d’État au Commerce extérieur, et Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du développement international. Dans les prochaines semaines, elle sera au Forum des PME France Chine de Chengdu, en marge de la Grande foire de l’Ouest, mais aussi à Pollutec Maroc (mi-octobre) et Lyon (début décembre). Et on lui demande d’accompagner le président de la République dans une prochaine visite au Kazakhstan.
« Nous faisons tout nous même », s’amuse la magistrate, qui reçoit en toute simplicité dans son petit bureau de la rue Cambon à Paris, partagé avec un autre magistrat, où s’empilent dossiers, notes et rapports **. Même le tout premier dossier de presse/bilan diffusé pour les un an de Vivapolis, le 26 septembre dernier, anniversaire fêté lors du sommet mondial des villes durables d’Istanbul.
Les « filières prioritaires à l’export » étaient cette semaine le thème d’un déjeuner organisé le 8 octobre par le Quai d’Orsay en présence de Laurent Fabius et de Matthias Fekl. Nul doute que l’avenir de ces initiatives a fait l’objet d’échanges alors que le ministre des Affaires étrangères doit encore dévoiler le nom des « fédérateurs » qui doivent reprendre le flambeau de trois autres filières : l’agroalimentaire, le numérique et la promotion des savoir-faire du tourisme.
Faire «le marketing de ce que qu’on sait faire»
Vivapolis, c’est quoi au juste ? « Ce n’est pas un label, c’est une marque », répond avec conviction Michèle Pappalardo, ajoutant qu’elle a permis de faire ce que les Français ne savent pas bien faire à l’international : «le marketing de ce que qu’on sait faire». «Nous, Vivapolis, essayons d’intervenir quand il y a des problématiques d’intégration de savoir-faire différents : les entreprises françaises n’ont pas besoin de nous pour vendre des tramways », explique-t-elle. « Nous ne voulons pas imposer un modèle, nous nous adaptons aux besoins. Mais après, c’est aux entreprises de faire leur offre », dit-elle encore.
Le choix d’éviter d’entrée la lourdeur d’une structure juridique dotée d’un budget propre a permis d’aller vite en besogne : « C’est public sans l’être, et c’est comme ça que ça marche ». A l’étranger, l’impact est positif, « sur le fond comme sur la forme ». La forme : l’offre se présente groupée et non dispersée, et l’implication de l’État français « rassure ». Quant au fond, les grandes thématiques portées par Vivapolis « parlent à des gens qui construisent des villes » que ce soit les conditions de vie, l’attractivité ou encore la gouvernance.
Des réalisations concrètes ont été obtenues : un site Internet bilingue créé à ses couleurs par Ubifrance, des dizaines d’entreprises adhérentes, une présence dans les grands salons…Des projets concrets d’éco-quartier à la française murissent comme par exemple en Chine (Shenyang) et en Turquie (Gaziantep).
Mais cela commence à faire beaucoup pour une organisation aussi légère, dont le principal organe de gouvernance est un comité de pilotage qui se réunit tous les 3 à 4 mois. Actuellement, Vivapolis s’appuie au quotidien sur un seul fonctionnaire à plein temps « prêté » par le ministère de l’Écologie (MEDD). Des opérationnels dans les institutions partenaires membres du comité de pilotage –pas moins de 6 ministères et d’une dizaine d’organismes et fédérations *** – prêtent main forte au gré des besoins.
La marque ne possède pas de budget propre non plus : les frais de mission de Michèle Pappalardo sont pris en charge par le Commerce extérieur, les partenaires et adhérents sont sollicités ponctuellement. Entre ses obligations de magistrate et sa mission, « l’équilibre devient compliqué », avoue-t-elle. Intégrer Vivapolis dans le futur Institut de la ville durable serait logique. C’ est la solution qu’elle pousse. Et elle devrait sans nul doute y jouer un rôle important.
Christine Gilguy
*Lire dans la LC n°108 du 3 juillet 2014 : EXPO-2017 : Bercy teste au Kazakhstan une nouvelle offre groupée « ville durable »
**Lire aussi, dans la prochaine édition du Moci (n° 1973 du 16-23 octobre) : Commerce extérieur : Vivapolis, une expérience de marketing de filière prometteuse
***Pour rappel, les membres du comité de pilotage sont : ministères : Écologie et développement durable (MEDD), Égalité des territoires et du logement, Redressement productif, Ville, Affaires étrangères et développement international, Commerce extérieur ; agences publiques : Ademe ; AFD ; Ubifrance ; CDC ; PFVT (Partenariat français pour la ville et les territoires) ; Advancity (pôle de compétitivité) ; AMGVF (Association des maires des grandes villes) ; organisations professionnelles : AFEP (entreprises patrimoniales), AFEX (architectes), PEXE (Eco-entreprises), Syntec-Ingeniérie.